Trois politiciens du parti Puea Thai, évincé du pouvoir le 22 mai 2014 par les généraux thaïlandais, ont été accusés lundi de sédition, tandis que la dissidence augmente à Bangkok en amont du quatrième anniversaire du coup d’Etat de la junte.
Les militaires thaïlandais ont déposé une plainte après que des personnalités du parti Puea Thai ont critiqué les organisateurs du coup d’Etat, lors d’une conférence de presse la semaine dernière, pour ne pas tenir leurs promesses de restaurer la démocratie.
Le parti soutient les anciens premiers ministres Thaksin Shinawatra et sa sœur Yingluck, dont les gouvernements ont tous deux été renversés par des coups d’Etat en 2006 et 2014. Ces deux personnalités restent populaires auprès de nombreux Thaïlandais, malgré le fait qu’elles ont fui le pays.
Alors que la junte a annoncé des élections pour février 2019, elle refuse encore de lever son embargo sur la politique et notamment l’interdiction des rassemblements de plus de cinq personnes.
Mais la critique vis-à-vis du régime monte et les opposants testent de plus en plus les limites de cette mainmise qui, selon eux, n’est destinée ni plus ni moins qu’à donner du temps aux généraux pour construire une coalition politique avant le vote et éviter le débat public.
Lundi, Watana Muangsook, Chaturon Chaisang et Chusak Sirinil, tous trois du Puea Thai, ont tous été accusés de sédition, tandis que cinq autres dirigeants du parti ont été incriminés pour avoir violé l’interdiction de rassemblement, a déclaré le vice-chef de la police nationale aux journalistes.
"Ils ont été convoqués pour entendre les charges déposées à leur encontre par la (junte) jeudi", a déclaré Srivara Rangsibhramanakul, ajoutant que la police ne procèderait pas à la détention des prévenus tant que l’affaire sera en cours.
Les trois vétérans du Puea Thai ont maintenu leurs critiques contre les militaires tandis qu’ils se faufilaient à travers la foule rassemblée à l’extérieur du bureau de police qui scandaient des mots de soutien.
"Ce gouvernement abuse des lois, il les utilise pour empêcher les gens d’enquêter sur eux", estime le secrétaire général du Puea Thai, Phumtham Wechayachai.
Le régime durcit sa ligne alors qu’il se prépare à des manifestations pour le quatrième anniversaire du coup d’Etat, mardi, des militants ayant annoncé qu’ils marcheraient vers la Maison du gouvernement dans la matinée.
La police a signalé qu’ils établiront ‘une zone d’accès restreint" autour du bâtiment.
Le mouvement pro-démocratie dirigé par un groupe d’étudiants militants a indiqué qu’ils étaient soumis à une surveillance croissante en amont de la marche prévue.
Dans une déclaration, le groupe a affirmé que leur technicien son a été convoqué dans un camp militaire dimanche soir qu’ils sont sans nouvelles de lui depuis.
Depuis le 17 mai, selon un groupe d’avocats défenseurs des Droits de l’Homme, plus de 50 personnes ont reçu une visite, un appel ou une surveillance d’officiers.
L’AFP a tenté de joindre le porte-parole de la junte pour commenter, sans succès.
Titipol Phakdeewanich, professeur en politique basé dans le Nord-Est de la Thaïlande, affirme que des officiers ont rendu visite à des activistes de la région, bastion du parti Puea Thai.
"Ils utilisent également leur réseau dans des zones locales…. Certains militaires vont dans les villages et demandent aux habitants de ne pas aller (au rassemblement de Bangkok)", a expliqué Titipol à l’AFP, ajoutant que lui-même a reçu un appel de l’armée lui demandant s’il avait prévu de rejoindre la marche.