La Commission nationale anti-corruption de la Thaïlande (NACC) a annoncé jeudi qu'elle allait enquêter sur plusieurs hauts fonctionnaires et les employés de la compagnie Thai Airways à propos de pots de vin payés il y a plus de dix ans par Rolls-Royce.
En janvier, le Serious Fraud Office, service britannique de lutte contre les fraudes graves, a annoncé que Rolls Royce avait versé des sommes considérables pendant trois décennies pour obtenir des contrats en Indonésie, en Thaïlande, en Inde, en Russie, au Nigeria, en Chine et en Malaisie (lire notre article).
Rolls Royce a reconnu avoir commis des fautes et a accepté de payer une amende d'environ 770 millions d'euros aux autorités britanniques pour régler l'affaire.
Mais l'enquête britannique a suscité des investigations dans certains des pays où les pots-de-vin ont été reçus.
La NACC a déclaré jeudi qu'un comité d'enquête avait mis au jour des "soupçons raisonnables" d'irrégularités.
"Il y a suffisamment de faits et de témoins pour enquêter sur les allégations", a déclaré Sansern Poljiak, secrétaire général du NACC.
Selon le communiqué, l'enquête serait centrée sur "le ministre des Transports, son adjoint, le conseil d'administration de THAI Airways et le sous-comité d'investissement à long terme de Thai Airways" entre 2004 et 2005 à propos d'un accord visant à acheter six avions équipés de moteurs Rolls-Royce.
Aucun suspect n'a été mentionné dans le communiqué.
À cette époque, le gouvernement était dirigé par Thaksin Shinawatra, un Premier ministre démocratiquement élu qui a été renversé par un coup d'Etat militaire en 2006. Deux ministres des Transports ont servi pendant cette période.
Le conseil d'administration de Thai Airways à cette époque comprenait des hommes d'affaires importants dont cinq officiers supérieurs de l'armée de l'air et un général de police.
L'enquête britannique, la plus importante jamais déployée dans ce pays, a permis de découvrir 36 millions de dollars en pots-de-vin et des incitatifs versés entre 1991 et 2005 à des intermédiaires - notamment des agents de l'État de Thaïlande et des employés de Thai Airways pour aider le groupe britannique à remporter de juteux contrats de vente de moteurs d'avions.
La loi thaïlandaise impose un statut de prescription à la plupart des crimes, et certaines des infractions présumées qui auraient eu lieu avant l'entrée en fonction de Thaksin ne peuvent plus faire l'objet de poursuites.
Les demandes d'indemnisations civiles peuvent encore être formulées, même si rien n'indique que les autorités prévoient de le faire.
Thai Airways a lancé sa propre enquête après que l'enquête britannique a été rendue publique.
La corruption est endémique en Thaïlande. Le royaume se classe actuellement au 76e rang sur 168 pays selon l'indice annuel de perception de la corruption de Transparency International.
La junte militaire actuelle qui a pris le pouvoir en 2014 a promis d'éliminer la corruption.
Mais les critiques disent que les enquêtes sous la junte étaient ciblées, visant essentiellement les opposants politiques tandis que des hauts-gradés étaient eux-mêmes été accusés de corruption.
D'autres estiment que l'action de l'armée a eu un certain effet, notamment sur la suppression des bakchichs indispensables pour sécuriser de grands contrats gouvernementaux.