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SUD THAILANDE - La crise politique repousse les perspectives de paix

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Udeyismail (archives)
Écrit par Agence France Presse
Publié le 6 janvier 2014, mis à jour le 29 juillet 2019

Les négociations de paix entre la rébellion du sud de la Thaïlande et le pouvoir central à Bangkok, déjà mal en point, sont un peu plus compromises avec la crise politique qui secoue la capitale depuis deux mois, alors que le conflit dans le sud du royaume dure depuis dix ans.

Près de 6.000 personnes ont été tuées en cette décennie marquée par des fusillades ou des attaques à la bombe quasi quotidiennes dans les trois régions de l'extrême-sud thaïlandais, Pattani, Yala et Narathiwat.

Ce conflit complexe mené par des insurgés musulmans se poursuit, avec son cortège de victimes souvent civiles, des bouddhistes ou des musulmans soupçonnés de pactiser avec Bangkok, sans réel impact ni prise de conscience dans le reste du pays.

Tout a commencé le 4 janvier 2004 avec une attaque de la rébellion sur un entrepôt de l'armée, dans cette zone frontalière de la Malaisie qui n'est rattachée à la Thaïlande que depuis un siècle.

La date a été retenue comme marquant le début du conflit, bien que des groupes rebelles armés aient été actifs depuis longtemps dans la région, notamment dans les années 1970 et 1980.

Population musulmane, état bouddhiste

Le conflit puise ses racines dans une colère profonde contre les tentatives d'assimilation de la population musulmane locale, d'ethnie malaise, par un Etat majoritairement bouddhiste.

Les rebelles, sans lien avec la mouvance terroriste internationale, ne cessent depuis d'affronter l'armée thaïlandaise, dont 30.000 hommes sont stationnés dans la zone.

En 2013, plusieurs "rounds" de négociations sans précédent avaient été accueillis avec un optimisme prudent. L'un des principaux groupes armés, le Barisan Revolusi Nasional (BRN, Front national révolutionnaire, BRN), fuyant jusqu'alors toute publicité, avait même émis des revendications en cinq points et une feuille de route de 32 pages, levant un peu la confusion sur les motivations d'une rébellion très secrète.

Mais à l'automne, les discussions se sont interrompues, faute de réponse du gouvernement sur ces cinq principales revendications.

Et la rencontre prévue en décembre a été repoussée sine die, le gouvernement thaïlandais de Yingluck Shinawatra étant alors aux prises avec une contestation massive dans les rues de Bangkok.

Des négociations conditionnées par les manifestations

Le chef du Conseil de sécurité nationale, Paradorn Pattanatabut, a affirmé que le processus de paix pourrait reprendre en janvier "si la situation s'améliore du côté des manifestations". Mais la situation ne donne aucune signe d'amélioration, l'opposition ayant annoncé le boycott des législatives de février et menaçant de redescendre d'ici là massivement dans la rue.

"Il n'y aura aucune discussion en janvier", a confié à l'AFP une source proche des discussions. Ce nouveau retard pourrait remettre en cause un processus de paix fragile.

De plus, du côté du pouvoir central, des personnalités respectées comme Paradorn et Tawee Sodsong, à la tête de l'administration des provinces du sud, pourraient ne plus être là lors des prochaines rencontres.

"Les personnalités ont leur importance lors d'un processus. Au fil du temps, ils ont noué de bonnes relations avec l'autre partie", souligne Srisompob Jitpiromsri, de l'université de Pattani et observateur des pourparlers.

Certains observateurs voient comme un bon signe le fait que le BRN ait émis une feuille de route et envisage désormais une possible fin négociée des violences, un changement d'attitude notable par rapport à son intransigeance des débuts.

Les rebelles revendiquent une reconnaissance du BRN comme une "organisation de libération", la libération de leurs partisans emprisonnés, la présence d'observateurs internationaux aux discussions, et, point essentiel, la "souveraineté" de la Nation de Pattani.

Sans être un Etat autonome, détaché de la Thaïlande, elle jouirait d'une plus grande autonomie, ce qui supposerait une politique de décentralisation, peu probable en cette période de troubles où le gouvernement marche sur des oeufs.

L'absence du conflit dans les revendications des manifestants suscite une certaine aigreur dans l'extrême sud de la Thaïlande, où les habitants ont l'impression d'être oubliés.

"Nous n'en pouvons plus des manifestants anti-gouvernement", explique Danyal Abdulloh, membre à Pattani d'un mouvement de jeunesse en faveur de la paix, soucieux du retour des dirigeants actuels à la table des négociations.

Aidan JONES - AFP mardi 7 janvier 2014
 

AFP
Publié le 6 janvier 2014, mis à jour le 29 juillet 2019

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