Les minorités montagnardes brandissent la notion des droits de l’homme pour défendre leur pratique traditionnelle des brûlis qui menace la santé publique dans le nord de la Thaïlande actuellement asphyxié par la fumée.
Le nord de la Thaïlande étouffe actuellement sous une gangue de fumée dans le contexte d’une agriculture traditionnelle recourant à la pratique des brûlis comme chaque année avant la saison des pluies.
Depuis plusieurs jours, les taux de microparticules si fines qu’elles pénètrent profondément les voies respiratoires excèdent largement le seuil critique de 120 microgrammes par mètre cube d’air au-delà duquel la santé humaine est menacée. On enregistrait hier plus de 200 microgrammes par mètre cube à Chiang Mai où l’emblématique massif du Doi Suthep se laisse deviner derrière un écran de fumée. Et c’est dans la province frontalière de Mae Hong Song que la situation est la plus préoccupante avec des taux supérieurs à 400 microgrammes par mètre cube d’air. Cette année, les hôpitaux des 8 provinces septentrionales ont déjà traité plus de 22.000 patients pour des problèmes respiratoires et près de 17.000 pour des troubles cardiaques.
En dépit d’une résolution gouvernementale du 21 janvier interdisant les feux de forêt jusqu’au 30 avril, plus de 700 hectares ont été brulés entre le 18 février et le 20 mars. Les menaces d’arrestation peinent à endiguer une pratique pluriséculaire que les minorités montagnardes entendent bien perpétuer en actionnant les leviers politiquement corrects de la Thaïlande moderne. Des représentants de l’ethnie karen ont ainsi saisi la Commission nationale des droits de l’homme. Ils estiment que ces mesures restrictives empiètent sur leur pratique traditionnelle de rotation des cultures et s’appuient sur une autre résolution gouvernementale du 3 août 2010 qui visait à ressusciter le mode de vie des Karens.
Alors que fonctionnaires et élus locaux multiplient actuellement les réunions de crise, il convient de relativiser la capacité des autorités thaïlandaises à juguler un phénomène récurrent. Comme le montre cette carte publiée par la NASA le territoire du nord de la Thaïlande est enchâssé entre le Laos et la Birmanie. Or ce sont dans ces deux pays que les départs de feu sont les plus nombreux. En notant que les vents dominants suivent des trajectoires est-ouest, on comprend mieux pourquoi l’ancien royaume du Lanna est condamné à tousser chaque année à la même époque. Selon une responsable de l’agence thaïlandaise de contrôle de la pollution qui publie des mesures en temps réel, le ministère des Affaires étrangères s’est saisi de la question. Des représentants thaïlandais, laotiens, birmans, vietnamiens et cambodgiens se réuniront les 30 et 31 mars pour envisager ensemble des mesures préventives pour réduire la pratique des brûlis.
E.D. (http://www.lepetitjournal.com/bangkok) mardi 26 mars 2013
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