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PEUPLE FLUO: Expo sur les Lissous au regard moins "ethno-réducteur"

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Écrit par La rédaction de Bangkok
Publié le 4 mars 2011, mis à jour le 17 décembre 2020

Le photographe français Marc Lathuillière expose à partir de ce soir et jusqu'au 3 avril au Museum Siam "Le Peuple Fluo", une exposition photo consacrée à un village de la tribu Lissou. A travers son travail, l'artiste veut aller à l'encontre d'une perception du monde extérieur sur cette société dite "traditionnelle" et montrer comment elle vit au XXIème siècle, de façon moderne

C'est une plongée métaphorique et loin des clichés sur les Lissou qu'offre le photographe français Marc Lathuillière avec son exposition "Le Peuple Fluo", qui prend place aujourd'hui et jusqu'au 3 avril, au Museum Siam, dans le cadre du festival culturel La Fête 2011. Dans ce bâtiment à l'architecture victorienne, anciennement ministère du Commerce, l'artiste expose en couleurs et en trois catégories ses ?uvres sur les habitants du village de Ban Sam Kula, situé près de Phrao à mi-distance entre Chiang Mai et Chiang Rai.

Huit grandes images de mise en scène sont entièrement composées, telles des tableaux, comme ce chef de village songeur devant une structure de tubes de PVC bleus, ce chasseur entouré de lumières fluorescentes dans la jungle, ou cette jeune femme vêtue d'une tenue à petits pois surmontée par des pots de gelée colorés en guise d'épaulettes.

Peuple fluo

Six autres photos, plus petites, représentent des situations prises dans le vif du moment, notamment lors du jour de l'an lissou, qui a généralement lieu au même moment que le nouvel an chinois. Le photographe a pu placer des tubes fluorescents encerclant un arbre sacré, autour duquel le village de 300 âmes a dansé une bonne partie de la nuit. Enfin, un diaporama de 36 clichés montre le créateur se mettre dans la peau du figurant, se faire encercler de films plastiques, et les Lissou devenir photographes. Une coiffe des plus originales, faite de dreadlocks et de lumières LED, sera aussi exposée avec quelques fluorescents utilisés.

Changer notre regard figé sur ce peuple

Le photographe a souhaité casser le cadre mental et le regard figé que l'on applique sur ces minorités "exotiques" et aussi forcer à accepter le fait qu'ils vivent aussi au XXIème siècle. "On ne peut pas s'empêcher de regarder les Lissou comme s'ils étaient intemporels. Tous les éléments de leur vie quotidienne deviennent "traditionnels" à nos yeux ? Pourquoi un vêtement lissou serait-il plus traditionnel qu'un costume cravate, puisqu'ils sont portés depuis à peu près le même nombre d'années", a-t-il expliqué, juste avant son vernissage de ce soir à 18 heures.

Peuple fluo

A leur rencontre, le touriste dégaine l'appareil photo, mitraille, porté par l'illusion qu'il se trouve en présence de tribus, comme un véritable fantasme à immortaliser, explique l'artiste qui a pu rester un mois sur place, tout seul et sans guide, notamment grâce à sa maîtrise du thaïlandais.

Il y a découvert un village qui, malgré son côté authentique, se trouve complètement dans l'économie globalisée de l'époque moderne : "D'abord, les habitants sont touchés par l'exode rural : des hommes et des femmes partent travailler à l'extérieur. Les jeunes s'habillent de façon tendance, un peu comme le style emo japonais, avec les cheveux en pétard, les caleçons Calvin Klein qui sortent du pantalon, des boucles d'oreilles énormes et captent tout avec les paraboles TV malgré le fait que les téléphones ne reçoivent pas de réseaux. Ensuite, les villageois ont dû abandonner la culture de l'opium. Certains sont initiés à des cultures vivrières dans une ferme gouvernementale en cultivant des produits destinés à d'autres pays, tels que les radis et le persil."

Peuple fluo

Quant au choix de la couleur fluorescente, il s'est imposé de lui même. Les Lissou en portent beaucoup sur leurs vêtements et leurs ornementations.

A l'image d'un peuple fluo qui, contrairement aux apparences, vit, évolue, s'ouvre et ne se limite pas aux poses tant appréciées par les touristes en quête d'images cartes postales.

P.B. vendredi 4 mars 2011

Le Peuple Fluo
Date : du 5 mars au 3 avril. Tous les jours de 10H00 à 18H00 (sauf lundi)
Lieu : Museum Siam >> Express boat pier 7 (Rajinee pier)
Voir la description détaillée de l'exposition "Le Peuple Fluo" sur le site Internet de La Fête
Voir le site Internet du photographe Marc Lathuillière

Cinq ans de rebondissements et d'embûches

Depuis 2006, Marc Lathuillière cherchait un village lissou assez préservé. Pour cette raison, il n'a pas opté pour les communautés trop proches de la frontière de la Birmanie, zone de culture de pavot et de nombreux trafics, où les étrangers ne sont pas les bienvenus. Conseillé par un ethnologue thaï, il s'est rendu dans un village lissou, mais au visage moderne, un peu bétonné. Sur place, un homme lui suggère d'aller à Ban Sam Kula. 2007, première prise après avoir convaincu le chef du village. Une de ces photos nommée "The crop" se retrouve dans l'exposition. Pour diverses raisons, le projet reste en suspend pendant deux ans. Le photographe, en quête de financement, va alors rentrer en contact avec l'Attaché Culturel de l'Ambassade de France en Thaïlande, Stéphane Négrin, qui l'encourage à réaliser ce projet. Marc Lathuillière retourne donc à Ban Nam Kula durant 1 mois. Il se heurte d'abord au problème du matériel, de la logistique, notamment pour acheminer les tubes fluorescents au village, etc. Même les détails les plus simples, comme un simple tournevis qui manque, complique son travail. Puis, frappé par un virus proche de la coqueluche, il tombe dans un puissant état de fatigue, le rendant "à plat". "Le plus dur, c'était de garder le sourire lorsqu'on doit en permanence convaincre, lorsque la fatigue physique et mentale sont présentes". Au final, le photographe a décrit "Le Peuple Fluo" comme son projet le plus éprouvant et le plus compliqué à mener à bout.
P.B. vendredi 4 mars 2011


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