Plus d'un demi-million d'internautes avaient déjà rejoint mardi un nouveau groupe Facebook créé par un universitaire critique du roi de Thaïlande après que le réseau social a bloqué sa version précédente sous la pression du gouvernement.
Le groupe Facebook "Royalist Marketplace", qui comptait plus d'un million de membres, a été bloqué en Thaïlande lundi soir après que le ministère du numérique a menacé de poursuites judiciaires contre l’entreprise américaine en vertu de la loi sur la criminalité informatique du royaume.
Facebook a dit être obligé de se soumettre, tout en assurant qu’il engagerait une bataille juridique pour disputer les arguments du gouvernement thaïlandais.
Quelques heures avant la mise au ban de Royalist Marketplace, Pavin Chachavalpongpun, universitaire auto-exilé et éminent détracteur de la monarchie, avait créé un nouveau groupe avec un nom similaire qui a pris plus d'un demi-million de membres en une journée.
"Si vous voulez le fermer à nouveau, alors je vais créer un autre groupe. Pour promouvoir la liberté d'expression, je le ferai", a déclaré Pavin Chachavalpongpun à Reuters.
L’intellectuel, qui vit au Japon, avait créé le premier groupe en avril, encourageant une discussion autour de la monarchie et des membres de la famille royale, sujet considéré comme extrêmement tabou en Thaïlande.
Les lois thaïlandaises sur la lèse-majesté interdisent d’insulter le roi ou même d’émettre la moindre critique à son encontre avec des peines pouvant aller jusqu'à 15 ans de prison. C’est habituellement sur cette base que le gouvernement thaïlandais demande le blocage ou la suppression pure et simple de contenu sur les réseaux sociaux.
Le ministre thaïlandais du numérique a déclaré que Facebook risquait de violer une autre loi, la loi sur la criminalité informatique, s’il n'agissait pas en conformité avec les ordonnances du tribunal jointes aux demandes de censure émises par le gouvernement.
Facebook a fait savoir qu'il contesterait les arguments légaux du gouvernement devant les tribunaux et chercherait à faire révoquer les ordonnances.
"Des demandes comme celle-ci sont graves, contreviennent au droit international des droits humains et ont un effet dissuasif sur la capacité des gens à s'exprimer", a déclaré un porte-parole de Facebook.
"Nous œuvrons pour protéger et défendre les droits de tous les internautes et nous nous préparons à contester cette demande devant les tribunaux."
Facebook a déclaré que de telles "actions gouvernementales excessives" minait ses activités en Thaïlande où environ 50 millions d’utilisateurs sont répertoriés pour une population de 69 millions d’habitants.
La semaine dernière, le ministère du numérique a également déposé une plainte pour cybercriminalité contre Pavin Chachavalpongpun pour avoir créé le groupe.
Le gouvernement thaïlandais, dirigé par l'ancien chef de la junte militaire, Prayuth Chan-O-Cha, fait face à des manifestations étudiantes quasi quotidiennes demandant sa démission et appelant à des réformes concernant la monarchie, du jamais-vu dans le royaume.
Ces derniers jours, deux clips vidéo musicaux pro-gouvernementaux, postés sur YouTube par le Département thaïlandais des relations publiques (PRD), ont été supprimés par la plateforme de partage vidéo après avoir reçu un grand nombre de «je n’aime pas» par les internautes, rapportait samedi la chaine locale Thai PBS sur son site.
Les deux clips étaient intitulés "Thong Chart" (drapeau national) et "Rak Borisut Rak Jak Mae" (L’amour pur d’une maman). Des internautes ont conspué sur Twitter le contenu des paroles du premier et exhorté leurs amis à cliquer "je n’aime pas" sur la page du clip qui, sur plus de 14.000 vus, a amassé 6.800 "je n’aime pas" pour seulement 46 "j’aime", selon le media thaïlandais.
Le deuxième clip, vu 38.000 fois, a collecté 9.000 "je n’aime pas" pour 69 "j’aime".