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L’interdiction des activités politiques en Thaïlande "assouplie"

Interdiction activite politique en ThailandeInterdiction activite politique en Thailande
Abhisit Vejjajiva -- Investi en août 2014, peu après le coup d’Etat ayant renversé le dernier gouvernement élu, le parlement thaïlandais est principalement constitué de personnalités militaires ou proches de la junte.
Écrit par Lepetitjournal.com Bangkok avec AFP
Publié le 16 septembre 2018, mis à jour le 16 septembre 2018

Les partis politiques thaïlandais sont pour la première fois depuis 2014 autorisés à recruter de nouveaux membres, a fait savoir vendredi la junte, annonçant un "assouplissement" de l'interdiction des activités politiques. Mais ils ne peuvent toujours pas faire campagne à l'approche des élections.

Depuis le coup d'Etat de mai 2014 qui avait visé à évincer la Première ministre Yingluck Shinawatra, les rassemblements politiques de plus de cinq personnes sont prohibés et les partis interdits de toute activité publique. 

Les partis politiques seront désormais autorisés à élire leurs dirigeants, recruter de nouveaux adhérents et organiser des réunions internes s'ils sont en mesure de convoquer au moins 250 membres, a déclaré vendredi le Conseil national de la paix et de l'ordre (NCPO), le nom officiel de la junte, dans un communiqué publié dans la Gazette royale. Ils pourront également créer des antennes dans les provinces.

Cependant, faire campagne - y compris organiser des rassemblements publics - reste interdit.

"Les partis politiques peuvent communiquer avec leurs membres par voie électronique, mais ce type de communication ne doit pas être considéré comme une campagne", précise la junte dans le communiqué. Et il appartiendra au CNPO et à la commission électorale de décider si certaines communications sont susceptibles de "perturber l'ordre public", est-il ajouté.

L'opposition thaïlandaise, au premier rang de laquelle le parti Puea Thai, a exhorté jeudi les militaires à lever enfin l'interdiction des réunions politiques. Elle demande aussi qu'une date pour les élections législatives, promises et continuellement repoussées depuis des mois, soit officiellement annoncée. 

Le nouveau roi Maha Vajiralongkorn, qui n'a pas encore officiellement été couronné, a donné son aval cette semaine à deux projets de loi qui lèvent certains obstacles à l'organisation de ce scrutin très attendu. Un scrutin national devra donc avoir lieu d’ici au mois de mai, et des personnalités de la junte ont évoqué le 24 février 2019 comme date probable.  

Les partis d’opposition estiment que le NCPO n’aurait dès le départ jamais dû imposer cette interdiction d’activité politique.
Pannika Wanich, porte-parole du tout nouveau parti "Future forward" ("en avant l'avenir"), qui a fait le buzz au début de l’année avec une offre pro-démocratique jeune et novatrice, a déclaré que son parti ne saurait adhérer aux restrictions.

"Nous avons déclaré il y a longtemps que nous n’accepterons pas de lois injustifiées," a-t-elle fait savoir, ajoutant que son parti entend être officialisé par la Commission électorale dans la semaine à venir. "Nous ferons tout ce qu’un parti politique est en mesure de faire", a-t-elle dit. "Nous n’attendrons pas que le NCPO assouplisse l’interdiction."

"Harcèlement politique"

Pichai Natipthaphan, un membre de l'influent parti d'opposition Puea Thai et ex-ministre dans le gouvernement civil renversé, estime que les restrictions qui restent en place handicapent l’opposition. 

"Le NCPO doit lever toutes les interdictions qui touchent les activités politiques", a-t-il insisté au micro de l’AFP. "Alors que les élections approchent, nous n'avons toujours pas le droit de faire campagne", a-t-il déploré, critiquant une situation dans laquelle on continue à "restreindre les droits des citoyens, et cela pourrait donner lieu à du harcèlement politique".

Le clan Shinawatra, famille de politiciens riche et influente, a gagné toutes les élections législatives depuis 2001 via des formations politiques sous son contrôle.

Mais deux coups d’Etat militaires et des jugements de la cour constitutionnelle ont fait tomber leurs gouvernements, poussant Yingluck et, avant elle, son grand frère Thaksin à fuir le pays pour éviter l’emprisonnement. 

Bien que le chef de la junte, Prayuth Chan-O-Cha, assure ne pas avoir d’ambitions politiques sur le long terme, d’aucuns s’attendent à voir se créer dans les prochains jours une formation politique alignée sur les vues de l’armée.

D’ailleurs, alors que l’interdiction d’activité politique empêchait toutes les factions d’opposition de se mettre en mouvement en vue des élections, Prayuth ne s’est pas privé ces derniers mois pour se positionner en candidat potentiel, enchainant les tournées en province, promettant le développement économique et brossant les barons locaux dans le sens du poil à grands renforts de promesses d’investissements et de séances photos et autres selfies sympathiques. 

Jeudi, le chef de la junte accueillait dans la Maison du Gouvernement le fameux groupe J-pop "AKB48", agitant un néon rose sur le tempo d’un des tubes phares du groupe d’ados japonaises super sexy et posant pour la photo.

Après quatre années de mise à l'écart depuis le coup d'Etat, Prayut Chan-O-Cha a gagné en respectabilité en étant reçu en juin par la Première ministre britannique Theresa May et le président français Emmanuel Macron, des rencontres qui lui ont permis de soigner son image auprès des Thaïlandais au grand dam de ses opposants politiques.
 

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