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Les Rolex du général n’intéressent pas la commission anti-corruption

Scandale des montres de Prawit WongsuwanScandale des montres de Prawit Wongsuwan
Krit PHROMSAKLA NA SAKOLNAKORN / AFP - Sur cette image prise le 4 décembre 2017 lors d'une séance de photos avec les membres du nouveau cabinet à Bangkok, Prawit Wongsuwan couvre ses yeux exhibant une montre
Écrit par Lepetitjournal.com Bangkok avec AFP
Publié le 28 décembre 2018, mis à jour le 18 août 2019

Une enquête sur la collection de montres de luxe du numéro deux de la junte thaïlandaise a été abandonnée jeudi, suscitant la colère du public et des opposants au régime militaire.

L'agence anti-corruption thaïlandaise a estimé qu’il n'y avait "aucune raison" de mener une enquête sur la collection de montres de luxe de Prawit Wongsuwan qui avait fait scandale début 2018, enflammant les critiques dans une rare manifestation de dissidence à un moment où les Thaïlandais commençaient à se lasser de quatre ans de régime militaire.

Prawit avait été vu en décembre 2017 avec une montre de luxe sur une photo, amenant des détectives du net à dénicher d’autres photos du général de 73 ans portant de bien coûteuses toquantes. En tout, le militaire de carrière aura été vu avec pas moins de 22 montres de luxe différentes au poignet -11 Rolex, 8 Patek Philippe et 3 Richard Milles- d’une valeur totale estimée à un peu plus de 1 million d’euros.

Cela posait évidemment la question de savoir comment un général percevant le salaire de fonctionnaire relativement modeste avait les moyens d’avoir en sa possession de tels objets de valeur. Des objets non déclarés sur sa liste d'actifs de 2,35 millions d’euros lors de son entrée en fonction au gouvernement, ce qui avait amené l'agence de lutte anti-corruption du royaume à ouvrir une enquête.

Mais la Commission nationale anti-corruption (NACC) a annoncé jeudi lors d'une conférence de presse que son comité composé de huit personnes avait voté à cinq voix contre trois le rejet du dossier.

"Dans cette affaire, rien n'indique que le général Prawit Wongsuwan ait eu l'intention… de dissimuler la vérité ou de cacher l'origine de tels biens", a déclaré le secrétaire général adjoint de la NACC, Worawit Sukboon.

L’enquête conclue que toutes les montres vues au poignet de Prawit appartenaient à son ami décédé, le riche homme d’affaires Pattawat Suksriwong. "Il avait également prêté ses montres de luxe à d’autres de ses amis."

Worawit a ajouté que la NACC enquêtait toujours pour déterminer si le général avait enfreint les règles de la commission anti-corruption en acceptant des biens d'une valeur de 3.000 bahts (80 euros).

Prawit, qui est ministre de la Défense, a été l'un des architectes du coup d'État de 2014 qui a renversé le gouvernement de la Première ministre de l'époque, Yingluck Shinawatra.

Le Conseil national de la paix et de l'ordre (NCPO), nom politique de la junte, qui avait dès ses débuts mis en avant sa détermination à "éradiquer la corruption endémique du royaume"  a été éclaboussé tout au long de ces quatre années par plusieurs scandales de corruption et autres conflits d’intérêts qui n’ont fait que démontrer l’impunité croissante des riches et des puissants. Et alors que le pays se prépare pour des élections prévues pour fin février, le chef de la junte, Prayuth Chan-O-Cha, a récemment fait connaitre son désir de se lancer en politique. 

Sans surprise, le plus grand parti thaïlandais, le Puea Thai - dirigé par les Premier ministres déchus, Yingluck, et son frère Thaksin Shinawatra - a critiqué la décision de la commission anti-corruption. "Nous estimons qu'il s'agit là d'un deux poids deux mesures. Le fait est que les actions (de Prawit) ont enfreint des lois et ses explications sont sans fondement", a déclaré la porte-parole du parti, Ladawan Wongsriwong.

Le parti "Future forward" ("en avant l'avenir") a qualifié l'agence anti-corruption d’"instrument" de la junte. "Cela souligne la nécessité de se débarrasser du NCPO et de Prayuth", a déclaré la porte-parole Panika Wanich.

Néanmoins, l'analyste politique Titipol Phakdeewanich estime qu’il est peu probable que le mécontentement du public vis-à-vis de ce verdict se ressente dans le résultat des urnes.

"Peu importe ce que peut en dire le public ou à quel point les gens sont en colère, cela ne changera rien", a déclaré Titipol, doyen de la faculté des sciences politiques de l'Université Ubon Rachathani.

"Les militaires contrôlent toujours tout, chaque canal d'information."

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