La cour pénale de Bangkok a annulé lundi une ordonnance qui imposait à Thanathorn Juangroongruangkit de supprimer des réseaux sociaux les vidéos sur lesquelles cette figure de l'opposition critiquait la stratégie vaccinale du gouvernement.
"La cour a constaté que les commentaires de Thanathorn étaient des opinions sincères qui n'affectaient pas la sécurité nationale", a déclaré à Reuters Kritsadang Nutcharat, l'avocat du leader du Mouvement Progressiste.
Un fonctionnaire de la cour a confirmé la décision d'annuler l’ordonnance sans pour autant élaborer.
Le 19 janvier, Thanathorn Juangroongruangkit, député déchu de l’opposition, avait mis en doute le bien-fondé de la stratégie vaccinale du gouvernement thaïlandais, lors d’une communication de 30 minutes via Facebook Live, estimant que celle-ci était lente, opaque, et reposait beaucoup trop et de manière injustifiée sur Siam Bioscience, une entreprise se trouvant appartenir au roi Maha Vajiralongkorn.
Suite à ces allégations, le ministère du numérique avait déposé une plainte comportant plus d’une dizaine de chefs d’accusation susceptibles de tomber sous le coup de l’article 112 du code pénal qui punit tout acte de diffamation ou d’insulte envers le roi et sa famille de peines de prison pouvant aller de 3 à 15 ans de prison.
Couacs et retards
Si le gouvernement thaïlandais a été plébiscité au niveau international pour son bilan de l'épidémie en 2020, sa stratégie vaccinale a pris du plomb dans l’aile ces dernières semaines, multipliant couacs et reports.
La Thaïlande a d’ores et déjà commandé 26 millions de doses de vaccins AstraZeneca que Siam Bioscience devra produire, et une deuxième commande de 35 millions de doses supplémentaire attend d’être signée en vue de lancer une campagne de vaccination de masse en juin visant près de 30 millions de personnes.
En attendant, les autorités avaient prévu d’importer trois millions de doses de vaccin, un million de la part d’AstraZeneca et deux millions de la part du laboratoire chinois Sinovac Biotech.
Mais AstratraZeneca ne s’est finalement engagé que sur 200.000 doses avant de réduire la commande à 150.000 fin janvier. Sinovac doit livrer un premier lot de 200.000 doses ce mois-ci.
Et alors qu’elles avaient annoncé le lancement d’une première campagne de vaccination à la mi-février pour le personnel de santé et les personnes les plus à risque dans les zones les plus touchées par la nouvelle épidémie survenue en décembre, cette échéance a dû être repoussée en raison des retards de livraison des vaccins importés. L’Union Européenne la semaine dernière a imposé des restrictions sur l’exportation de vaccins, forçant le royaume à chercher un producteur du vaccin en Asie.
La Thaïlande espère néanmoins toujours accuser réception ce mois-ci des 50.000 premières doses de la commande AstraZeneca et de 200.000 doses du laboratoire chinois Sinovac.
Le Premier ministre Prayuth Chan-O-Cha a rejeté dimanche l'accusation de Thanathorn selon laquelle le gouvernement était lent à se procurer des vaccins et trop dépendant du vaccin AstraZeneca, que Siam Bioscience sera chargée de fabriquer localement.
"Le gouvernement a permis à d'autres entreprises de proposer leurs services mais (Siam Bioscience) a été choisie par AstraZeneca", a affirmé le Premier ministre thaïlandais, assurant que le pouvoir thaïlandais n'avait aucunement influencé la décision.
Vis-à-vis du programme COVAX, dispositif onusien destiné à assurer le partage équitable de vaccins dans le monde, il a déclaré que la Thaïlande se voyait proposer des prix plus élevés compte tenu de son niveau de développement, et qu'en raison des lois locales, le gouvernement ne pouvait pas s'engager à verser des acomptes pour des vaccins dont l'efficacité et la livraison ne peuvent être garanties.
"Nous avons vu les conditions des producteurs de vaccins et de COVAX, qui demandent de réserver sans connaître les résultats des tests de phase 3", a déclaré Prayuth Chan-O-Cha dans un podcast.
Sur l’idée proposée par les acteurs du tourisme d’un "passeport vaccinal" qui pourrait permettre aux voyageurs vaccinés d'entrer en Thaïlande sans avoir à effectuer de quarantaine, le gouvernement estime qu'il est trop tôt pour envisager de mettre en œuvre une telle politique.
Une porte-parole de la cellule de gestion de la situation du Covid-19 (CCSA), Apisamai Srirangsan, a déclaré que l'idée était à l’étude afin de déterminer l’approche la plus appropriée pour aller dans ce sens.
La Thaïlande a signalé lundi 186 nouveaux cas de coronavirus, portant le total depuis janvier l’an dernier à 23.557 cas et 79 décès.