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TRIBUNE LIBRE - Les lois du mariage : Histoire vécue, une parmi beaucoup d’autres...

Écrit par La rédaction de Bangkok
Publié le 1 août 2013, mis à jour le 24 décembre 2022

Vous êtes nombreux à nous écrire pour nous faire part de vos témoignages sur divers sujets. C'est pourquoi nous avons décidé de vous ouvrir les pages du PetitJournal.com à travers une tribune libre hebdomadaire. Aujourd'hui, Jean de Lampagne nous fait partager une expérience douloureuse vécue à travers son mariage avec une femme Thaïlandaise, tout en proposant quelques conseils pour se protéger juridiquement dans le cadre d'une union mixte

Acte 1
Un Français et une Thaïlandaise se marient sans contrat en France. Après deux séjours en Thaïlande, le Français propose de s'expatrier, d'une part pour que sa femme puisse retrouver ses racines et plus encore utiliser le diplôme de doctorat qu'elle vient d'obtenir (en grande partie grâce au mari) ; d'autre part parce que le pays lui plaît.

Elle n'a ni bien propre, ni revenu d'aucune sorte.

Le Français possède en bien propre une jolie maison bretonne sur les bords du Golfe du Morbihan et sa pension de retraite. Il vend cette maison un bon prix, sans aucune difficulté mais avec un gros pincement au coeur.

Pour la future habitation en Thaïlande, il pense pouvoir émettre quelques idées, quelques suggestions, quelques souhaits, car il connaît bien les problèmes de construction: Tout est rejeté, en bloc ! De quoi se mêle-t-il, ce farang ?

Il souhaiterait, entre autres choses, que la maison (très grande, sur deux niveaux), soit construite par une entreprise ayant pignon sur rue. Mais non, pour quoi faire ? Beau-papa est maçon ! Le Français n'a pas le choix. Beau-papa, simple maçon vient d'être promu chef de chantier (et il s'agit d'un gros chantier !), il embauche quelques maçons-poivrots dans les villages aux alentours et en avant ! Le farang a souvent des sueurs froides. Mais non, c'est ridicule, tout va bien au pays du «mai pen rai»... Qu'importe qu'il y ait une erreur, on casse et on recommence ! Tout juste si ce n'est pas la faute du farang... Il lui suffit juste de payer et de payer encore...

Il faudrait un bon architecte. Il n'y a aucun problème : l'un des copains de beau-papa est architecte ! Quel heureux hasard... Sauf que c'est un hasard désastreux ! Le soi-disant architecte n'est qu'un dessinateur industriel, ivrogne de surcroît. La charpente métallique compliquée qu'il a dessinée est déclarée par le couvreur (un vrai professionnel, peut-être le seul parmi tous les intervenants) impossible à couvrir dans les minutes qui suivent son arrivée, compte tenu d'un nombre effarant d'erreurs techniques. Il faut donc tout dessouder, découper, déposer, trouver un nouvel architecte (un vrai, mais il ne fait pas partie des amis de la famille) qui va dessiner une nouvelle charpente (et il faut, bien sûr, modifier la maçonnerie en conséquence), reconstruire une nouvelle charpente et payer?

Ce ne sont là que quelques anecdotes douloureuses (tant pour le moral du Français que pour la santé de son portefeuille). Mais ces quelques anecdotes parmi bien d'autres ne sont que des amuse-gueules : le plat de résistance, c'est pour maintenant?

Acte 2

La maison est achevée (enfin), l'immense terrain paysagé (une fortune, mais le Français a-t-il vraiment le choix ?), l'emménagement a lieu et le temps passe tant bien que mal, plutôt mal que bien, car la Thaïlandaise de Thaïlande est bien loin d'être la Thaïlandaise de France?

Et puis, un jour, le Français découvre sur Internet qu'un farang d'une autre province s'est fait spolier de façon magistrale en venant s'installer en Thaïlande avec sa femme Thaïlandaise.

Bizarre, troublant, inquiétant pense aussitôt le Français : il y a beaucoup de similitudes avec son cas ! Il décide d'approfondir.

Ce n'est guère facile : il ne lit pas le thaï et le parle très peu, son épouse l'ayant toujours dissuadé d'apprendre la langue du pays, malgré ses demandes insistantes. Il va très vite comprendre pourquoi.

Après consultation de trois avocats, il découvre le pot aux roses (des roses avec beaucoup de grosses épines !).

Acte 3

Processus

Remarque préliminaire
>  Arrivée définitive  en Thaïlande le 30 juillet 2003 / 2546.
>  Le certificat de mariage français a été traduit par le bureau de traduction agréé par l'ambassade de France (The Corner) et cette traduction a été agréée par les services de l'ambassade le 20 août 2003 / 2546 : c'est une pièce officielle qui vaut preuve d'identité. Mais comme il va vite s'avérer que ce document est très gênant, on va s'empresser de l'oublier.

1.    Le déménagement

La «Lettre de voiture», document officiel nécessaire pour un déménagement à l'étranger, porte bien évidemment le nom du mari, du moins au départ de France.

À l'arrivée en Thaïlande, le nom du mari s'est transformé, auprès de la société de déménagement qui prend le relai de la société française, en nom de jeune fille célibataire écrit en gros sur toutes les enveloppes contenant les documents. Par quel miracle ?

2.    Achat des terrains et «Lettre de confirmation»

Lors de l'achat d'un terrain, la «Lettre de confirmation» est obligatoire pour les couples dont l'un est étranger. Elle n'a pas été signée, pour aucun des terrains, ni pour leur regroupement. La femme pouvait contourner la loi puisque tous ses documents d'identité portaient le nom d'une demoiselle célibataire.

A Thai national who has a foreign spouse and who wants to legally acquire land in Thailand must prove that the money used for the purchase is personal property according to section 1471 and 1472 Civil and Commercial Code and/ or supply an official certify letter stating that the spending on land is separate property (Sin Suan Tua) or personal asset of the Thai spouse, and not a personal property of the foreign spouse or jointly owned property (sin som ros) between husband and wife.
(Most Urgent Letter: No.Mor.Thor 0710/Vor.792 dated March 23, 1999)

3.    Le Sin San Tua (les biens personnels)

La femme n'avait ni argent propre ni biens propres à la date du mariage et n'a eu aucune rentrée personnelle d'argent jusqu'en 2006.

Acheter des terrains en se faisant passer pour une demoiselle célibataire possédant les fonds nécessaires à l'achat des terrains a donc été un mensonge à l'administration.

Tout mensonge à l'administration est considéré comme un crime pouvant être passible d'une peine de prison. (Code pénal, Chapitre 1, Sections 136 & 137).

4.    Le Ta Bien Baan bleu (livret de domicile)

Il a été établi au nom de Mademoiselle Www XXX (Mademoiselle, célibataire) et non pas femme mariée (Madame) le 26 août 2004 / 2547, à l'adresse de la nouvelle maison.

L'épouse a fait les démarches nécessaires pour que le Français ait un Ta Bien Baan jaune.

Or, ils sont mariés et vivent en permanence en Thaïlande ; le Français n'avait pas besoin de livret jaune, mais aurait dû figurer sur le Ta Bien Baan bleu de Madame* (mais elle n'était qu'une demoiselle célibataire !).

* (cf. article 44 of the Central Office registration rules / year 2535).

5.    Le renouvellement de la carte d'identité

La carte d'identité a été renouvelée au nom de Mademoiselle Www XXX (Mademoiselle, célibataire) et non pas femme mariée (Madame) le 26 août 2004 / 2547, à l'adresse de la nouvelle maison. Ce n'est que bien plus tard qu'une autre carte d'identité sera établie au nom de Madame, lorsque tous les travaux et les achats nécessaires tant aux travaux qu'à l'aménagement et à la décoration auront été effectués.

6.    Divers

Toutes les factures, tous les abonnements, tous les contrats portent le nom d'une jeune fille célibataire : Mlle Www XXX.

En bref, le Français a tout payé mais ne possède rien.

De plus, il a vécu sans le savoir, avec deux femmes : une demoiselle célibataire et une femme mariée.

Épilogue

Grâce à la grande compétence et à la non moins grande gentillesse d'un couple d'avocats de Chiang Mai, le Français a pu récupérer ses biens et obtenir un divorce consensuel à son profit. Mais, la digne et désintéressée épouse a quand même eu le réflexe de réclamer de l'argent en échange de la liberté du Français et de la restitution de ses biens? Un comble alors que le Français a eu la bonté d'âme de lui éviter le tribunal?

Quelques recommandations

À la lumière de ce fait, qui est loin d'être isolé, il faut absolument que le Français (ou tout autre étranger) candidat au mariage avec une citoyenne thaïlandaise sache qu'il doit s'entourer de multiples précautions.

Tout d'abord, dans ce genre de situation, il y a lieu de distinguer deux cas :
1.    La mariage a lieu en France ;
2.    Le mariage a lieu en Thaïlande.
3.    Dans le second cas, seul le point de départ des risques est différent ; là, les services consulaires possèdent les informations nécessaires. Mais la suite du processus de spoliation est identique dans les deux cas.

Le Français qui se marie en France avec une Thaïlandaise doit absolument veiller à ce que l'épouse déclare immédiatement son mariage à l'ambassade de Thaïlande à Paris (d'autant plus que, avant le mariage, elle a dû demander officiellement un «certificat de coutume» à son ambassade à Paris. Sinon, toutes les conditions seront réunies pour que, dans l'éventualité d'une installation définitive en Thaïlande, elle ait les plus grandes facilités pour commencer une carrière de «femme mariée célibataire».

Par ailleurs :

1. Pas de mariage sans contrat, que ce soit en France ou en Thaïlande, afin que les biens propres de chacun soient clairement identifiés.

2. Pas d'achat de terrain sans la signature par les deux conjoints de la «Lettre de confirmation».

3. Savoir lire en thaï le nom de jeune fille et le nom de femme mariée de son épouse (très important).

4. Exiger, dès l'installation en Thaïlande, que le mariage soit immédiatement déclaré par l'épouse thaïlandaise aux autorités compétentes (l'ambassade de Thaïlande en France ou le service de l'état-civil du lieu de résidence en Thaïlande) et non pas seulement lorsque tous les achats sont effectués et tous les travaux terminés, ce qui fut le cas ici.

5. Enfin, dans le cas où les titres de propriété porteraient, malgré toutes les précautions, le nom de jeune fille, il n'existe que deux options : saisir le tribunal ou mettre en demeure l'épouse de faire modifier le nom figurant sur le titre de propriété à l'aide d'un imprimé spécifique disponible au «Land department» (le bureau des registres fonciers) du lieu de résidence, (l'autorité administrative barre le nom de jeune fille et le remplace par le nom de femme mariée, avec cachets et annotations officiels).

Références
1. «Lettre de confirmation» : Most Urgent Letter : N° Mor. Thor 0710 / Vor. 792 en date du 23 mars 1999.
2. «Guidelines for officials», livret à l'usage des fonctionnaires du Ministère des Terres, en date du 22/12/2005 (consultable notamment sur le site d'Isaan Lawyers).
3. Code Civil et Commercial, version thaï/anglais, 230 B (www.soutpaisallaw.com).
4. The Criminal Code, version thaï/anglais, 90 B (www.soutpaisallaw.com).
5. The Land Code, version thaï/anglais, 300 B, Chaninat & Leeds Co, Ltd.
(www.chaninatandleeds.com).
6. Code pénal, Titre 2, Chapitre 1, section 137 (pour mensonge à l'administration en se faisant passer pour célibataire).
7. Le site www.thailawonline.com. On y trouve en particulier un excellent article sur les
différents titres de propriété (onglet « Propriété »).
8. Le site www.doingbusinessthailand.com

Et le plus important :
9. Le site du cabinet d'avocats de Chiang mai : www.CMLegal-Business.com ; E-mail : CMlegal@gmail.com
Dernières remarques
Se méfier de certains blogs qui diffusent des informations pour le moins fantaisistes.
Ne jamais accepter un avocat choisi par la femme.

Jean de Lampagne vendredi 2 août 2013

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Publié le 1 août 2013, mis à jour le 24 décembre 2022

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