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ONG - Kids Home: au-delà de la simple charité, l’autonomie des communautés

Écrit par Lepetitjournal Bangkok
Publié le 5 octobre 2015, mis à jour le 5 octobre 2015

Des leçons pour devenir super-héros, une librairie volante et des vacances ?souriantes?. Ce n'est que la pointe de l'iceberg du travail que la Kids Home Foundation accomplit quotidiennement auprès des enfants des migrants employés dans les chantiers de Chiang Mai. La fondation, née de la rencontre entre une bienfaitrice thaïlandaise, une travailleuse sociale française et un économiste italien, s'est donnée trois missions: l'éducation scolaire, la santé et la sécurité de chaque enfant.

Dès qu'ils aperçoivent de loin les t-shirts bleus des enseignants de la Kids Home Foundation, les enfants commencent à s'écrier de joie et accompagnent leur arrivée d'un ch?ur de ?sawadi-kaa(p)?, ?hallo? et éclats de rires. Les éducateurs viennent leur faire rédiger leurs devoirs, mais la chose ne semble pas déranger les jeunes élèves, qui sortent cahiers et crayons en commençant à répéter des phrases en anglais et en thaï, mélangées à leur langue maternelle.

Nous sommes dans le camp de Sorn Praya 1, une quarantaine de petites baraques en bois, tôles et plastiques pour environ 200 personnes dans la périphérie ouest de Chiang Mai. Ces 34 petits sont les enfants de migrants birmans, cambodgiens et laotiens qui travaillent sur les nombreux chantiers de construction de la "Rose du Nord".

Depuis sa création en 2002 par une femme thaïlandaise et un couple franco-italien (voir plus bas), la fondation Kids Home intervient directement sur les lieux de vie de ces enfants pour leur assurer l'accès à l'éducation, à la santé et un lieu de vie sûr. Basée à Chiang Mai, l'organisation se tient ainsi au plus près possible de ses bénéficiaires. "Nous ne voulions pas créer une structure bureaucratique coûteuse et notre engagement est de reverser 100% des dons", explique le co-fondateur Nicola Crosta.

Savoir est un (super-)pouvoir

L'objectif est ambitieux et le planning serré. Chaque jour, les intervenants de l'ONG se relayent d'une communauté à l'autre pour suivre le progrès des enfants scolarisés et pour animer les activités des plus petits et de ceux qui préparent leur entrée à l'école.

?L'école thaïlandaise gère les inscriptions en mai, lors de la période d'enregistrement. Or, ces enfants dépendent du travail de leurs parents, qui se déplacent à intervalles de six mois à deux ans selon l'ouverture et la fermeture des chantiers. S'ils arrivent après le mois de mai, ils doivent attendre l'année suivante pour entrer à l'école?, explique Marion, volontaire en charge de la récolte des fonds de l'organisation. 

Ainsi, Kids Home met en place de l'éducation informelle dans leurs lieux de vie: des cours de thaï, d'anglais, des activités de réflexion et de créativité, de sport et création manuelle. Et pendant les vacances? Deux fois par an pendant deux semaines, les bureaux de Kids Home accueillent environ 75 enfants pour les ?smileholidays?, les vacances du sourire.

Quand les enfants ne peuvent pas aller à la bibliothèque, c'est la bibliothèque qui vient chez eux. Une fois par semaine la ?librairie volante? de Kids Home, une camionnette bleue pleine de livres, s'arrête dans chaque lieu de vie pour que les enfants choisissent leurs nouvelles lectures.

L'information et la connaissance sont deux pouvoirs non négligeables. Forts de ce constat, les membres de la fondation organisent des sessions d'information hebdomadaires pour enfants et parents, sur les vaccinations, l'hygiène dentaire et la prévention des maladies (la dengue est très répandue dans la province de Chiang Mai).

Il s'agit d'un jeu interactif qui mobilise toute la communauté. Chaque notion importante représente un super pouvoir, et les petits ou grands qui ont bien compris les informations deviennent des super héros à la fin de la séance. ?Ce ne sont pas toujours des informations faciles à capter, et elles passent beaucoup mieux en rendant les enfants et les parents acteurs?, assure Marion.

Associer les employeurs

La sécurité et la santé sont, avec l'éducation, les piliers de Kids Home. Trois travailleurs sociaux, Youpin, La et Peng, se chargent de repérer les éventuelles situations problématiques, des soucis de santé aux violences domestiques. Ils suivent actuellement 126 cas, individuellement, en apportant un conseil social, éducatif, ou en faisant le lien avec les centres d'accueil ou les autorités.

Kids Home travaille avec neuf sociétés de construction sur quinze sites autour de Chiang Mai. Obtenir l'accord de l'entreprise est très important car c'est elle qui fournit aux travailleurs les matériaux pour construire leurs habitations. C'est donc elle qui peut mettre à disposition de Kids Home un endroit protégé et non dangereux pour les enfants, dans ces petits villages près des chantiers.

?Il n'est pas toujours facile de convaincre la compagnie de nous épauler", regrette Peng. "Les plus réfractaires sont celles qui emploient des travailleurs irréguliers et craignent des contrôles. Nous essayons de leur faire comprendre qu'ils ont tout à gagner en collaborant avec nous," poursuit-il, soulignant qu'aujourd'hui, la plupart de ces entreprises connaissent Kids Home et commencent à leur faire confiance et les préviennent de l'ouverture de nouveaux chantiers, ce qui rend la prise en charge des enfants beaucoup plus rapide.

?Une compagnie nous a même mis à disposition une salle colorée et agréable et des nombreux jeux et livres, et elle nous fournit le salaire de l'une de nos profs?, se réjouit-il.

Emancipation et indépendance

Avec le soutien de cette entreprise, Kids Home a également pu embaucher une maman qui vit sur le site de Visavapat (nord-ouest de Chiang Mai). Chaque matin, elle s'assure que les enfants partent pour l'école avant de participer aux activités organisées par Kids Home avec les petits qui restent.

L'objectif n'est pas de rendre les communautés dépendantes de Kids Home, mais, au contraire, de les émanciper en leur donnant les instruments et les connaissances nécessaires, souligne la co-fondatrice de l'organisation, Magali du Parc.

L'ONG fournit à toutes les communautés des cahiers et stylos pour faciliter l'intégration à l'école, mais n'intervient financièrement que pour les frais que les parents n'arrivent pas à couvrir: le transport dans un cas, l'achat de l'uniforme dans un autre.

L'empathie et la proximité avec les familles et la connaissance et la collaboration avec les entités gouvernementales font partie des principes fondateurs qui permettent à Kids Home de suivre les migrants dans leurs déplacements et de savoir s'ils ont assimilé et mis en pratique les informations reçues. Les travailleurs suivent leur entreprise de construction et peuvent donc être déplacés aussi bien à Bangkok que dans l'Isan.

?En général ils savent où se trouve la nouvelle école, mais il faut effectuer le référencement avec la précédente. Il faut aussi qu'ils repèrent l'hôpital et les services les plus proches. S'ils se retrouvent dans une situation difficile, nous voulons pouvoir les aider?, explique Marion.

Le principal défi pour Kids Home dans le futur immédiat est donc de rendre les communautés autonomes en formant systématiquement deux ou trois personnes pour qu'elles soient les référents à l'intérieur du groupe en charge de l'éducation, de la santé et de la sécurité des petits, mais aussi de leurs parents.

?L'idée est de pouvoir former ces personnes même en dehors de Chiang Mai, par exemple à Bangkok, d'effectuer un suivi mensuel pour ensuite réduire progressivement notre présence, tout en restant à disposition en cas de problèmes", tient à souligner Marion. "Nous sommes déjà en contact avec deux compagnies qui ont plusieurs sites de construction dans la capitale?.

Kids Home Foundation est née en 2002 de la rencontre d'une Thaïlandaise, d'un Italien et d'une Française.
Nicola Crosta était un jeune économiste italien avec beaucoup d'envie d'aider quand il a rencontré, lors d'un voyage de travail dans le nord de la Thaïlande, Acha Sripaurya, une riche bienfaitrice thaïlandaise très active dans le social. Ensemble avec Magali du Parc, travailleuse sociale et épouse de Nicola, ils fondent la Kids Home Foundation à Chiang Mai en 2002. Ainsi se combinent les compétences managériales et d'économiste de Nicola, celles de travailleuse sociale de Magali, et la connaissance du terrain d'Acha, présidente de la fondation. Sur les conseils de cette dernière, Kids Home a développé des synergies avec les institutions locales et une approche ancrée sur la société et les communautés bénéficiaires.

En 2014, la fondation a aidé 1.026 enfants. Lors de la période d'inscription de mai 2015, sur 275 enfants en âge d'être scolarisés, 98% ont pu aller à l'école.

Voir aussi le site de Kids Home http://www.kids-home.org/
Sofia NITTI (http://www.lepetitjournal.com/bangkok) mardi 6 octobre 2015 (Rediff.)
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Publié le 5 octobre 2015, mis à jour le 5 octobre 2015

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