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Grèce : le Parlement adopte une loi sur le travail de 13 heures

Le texte, baptisé « Fair Work for All », a été présenté par le parti conservateur Nouvelle Démocratie (ND), au pouvoir à Athènes, et a provoqué une vague de protestations syndicales à travers le pays.

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Écrit par Lepetitjournal Athènes
Publié le 16 octobre 2025

Un vote serré et une société divisée

Adoptée après un vote nominal demandé par le gouvernement, la loi a obtenu 158 voix pour et 109 contre, sur 267 députés présents. L’article 7, qui concentre l’essentiel des critiques, a été approuvé à la même majorité. L’ensemble de l’opposition a rejeté le texte, tandis que le principal parti de gauche, SYRIZA, a choisi de s’abstenir.

La ministre du Travail, Niki Kerameus, a défendu le projet en affirmant qu’il « donne un coup de pouce au secteur privé » et « renforce les employés ». Elle a également jugé « trompeuse » l’expression « journée de 13 heures », rappelant qu’il s’agit d’une mesure exceptionnelle, applicable seulement « jusqu’à 37 jours par an, soit environ trois jours par mois » et nécessitant « le consentement explicite du salarié ».

Ce que change la loi

La réforme introduit la possibilité, dans certains secteurs comme l’agriculture, la restauration, le commerce ou la fabrication, de prolonger la journée de travail jusqu’à 13 heures, tout en maintenant un plafond hebdomadaire de 48 heures, calculé sur une moyenne de quatre mois. Le temps de travail habituel demeure fixé à 40 heures par semaine, et le maximum annuel d’heures supplémentaires reste limité à 150 heures, rémunérées avec une majoration de 40 %.

Le gouvernement souligne que la participation au dispositif sera volontaire et qu’aucun salarié ne pourra être licencié pour avoir refusé de s’y soumettre. Les grandes surfaces et certains secteurs industriels sont exclus du champ d’application de cette mesure.

Les syndicats redoutent un recul des droits des travailleurs

Les principales organisations syndicales du pays, ADEDY (secteur public) et GSEE (secteur privé), dénoncent ce qu’elles considèrent comme un retour en arrière historique pour les droits des travailleurs.

« La flexibilité des horaires, dans la pratique, signifie la fin de la journée de huit heures, la destruction de la vie familiale et sociale, et la légalisation de la surexploitation », a affirmé ADEDY dans un communiqué.

Deux grèves générales ont paralysé le pays au début du mois d’octobre, perturbant les transports, les écoles et les administrations. Les manifestations ont rassemblé plusieurs dizaines de milliers de personnes à Athènes et Thessalonique, selon les syndicats.

Les arguments du gouvernement

Pour la Nouvelle Démocratie, cette réforme répond à un besoin de flexibilité et vise à adapter le droit du travail aux réalités économiques. Selon la ministre du Travail, l’objectif est de permettre aux entreprises confrontées à des pics d’activité saisonniers ou à une pénurie de main-d’œuvre d’ajuster temporairement leurs horaires, sans avoir recours à des pratiques illégales.

Certaines analyses avancent également que cette mesure pourrait réduire le travail non déclaré, en offrant un cadre légal pour les heures additionnelles. Toutefois, le gouvernement ne présente pas officiellement cette justification comme l’une des motivations principales de la loi.

Une réforme emblématique des tensions sociales en Grèce

L’adoption de cette loi souligne les fractures persistantes du marché du travail grec, déjà marqué par une décennie de réformes imposées pendant la crise financière. Les partisans de la loi y voient un outil de modernisation du travail et un levier pour attirer les investissements étrangers. Ses détracteurs y lisent au contraire une érosion des droits sociaux et une banalisation du surtravail, dans un pays où le temps de travail moyen figure déjà parmi les plus élevés d’Europe.

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