Au musée Picasso de Malaga: ‘’Genius Loci’’ de l’artiste parisienne Farah Atassi

Une réinterprétation contemporaine de la tradition de l'art moderne

Farah Atassi (Bruxelles, 1981) est une artiste belge vivant et travaillant à Paris, dont l'œuvre picturale se caractérise par une réinterprétation contemporaine de la tradition artistique de l'art moderne, et par la fusion d'éléments abstraits et figuratifs. Atassi s'inspire de maîtres tels que Pablo Picasso, Fernand Léger, Henri Matisse ou encore Georges Braque, en incorporant des motifs géométriques et des structures en grille qui évoquent le cubisme et l'abstraction géométrique.
Son style unique mêle la tradition de la peinture figurative à une influence cubiste évidente et à une approche très personnelle de la représentation d'un espace artificiel aux échelles et aux volumes déroutants, avec, selon la commissaire Marjolaine Lévy, la présence de Picasso

Nous voyons la présence de Picasso comme un fantôme dans toutes les peintures, ce qui démontre le caractère singulier et unique de Farah Atassi dans l'art contemporain

Présente dans de nombreux musées

Tout au long de sa carrière, Farah Atassi a participé à de nombreuses expositions individuelles et collectives de renom. Parmi les plus importantes, citons son exposition au Musée national Picasso-Paris en 2022 et sa participation à « El eco de Picasso » au Museo Picasso Málaga entre octobre 2023 et mars 2024. En outre, elle a exposé dans des galeries telles qu'Almine Rech à Paris, New York et Shanghai, et François Ghebaly à Los Angeles. Ses œuvres ont également été présentées dans des institutions telles que le Musée du Consortium de Dijon et le Musée des Beaux-Arts de Lyon.

Une approche contemporaine

Le travail d'Atassi propose une réflexion sur l'histoire de l'art et de la représentation, réinterprétant ses langages visuels à travers une approche contemporaine qui explore la théâtralité, en incorporant des motifs géométriques et une relation particulière entre la figure et l'arrière-plan. Son approche méticuleuse, associée à sa capacité à fusionner des références historiques avec une esthétique contemporaine, lui ont permis de s'imposer comme une figure de premier plan sur la scène artistique actuelle.

Genius Loci et ses fantômes picassiens

Le titre « Genius Loci » provient d'une expression latine qui se traduit par « esprit du lieu ». Dans la mythologie romaine, cette expression désignait une divinité ou un esprit protecteur qui habitait un lieu particulier, mais dans un contexte plus moderne, elle est utilisée pour décrire l'atmosphère particulière d'un lieu, qu'il s'agisse d'un environnement physique, culturel ou même émotionnel. Ainsi, pour Marjolaine Lévy, historienne de l'art, critique d'art et commissaire de l’exposition, la présence spectrale de Picasso est bien présente dans cette exposition:

Des fantômes picassiens qui s'immiscent dans un monde qui n'est pas le leur, celui de la scène, et même lorsqu'ils ne sont pas sur la scène du théâtre, ils habitent des lieux mystérieux où le rideau s'attarde

Ce titre nous invite donc à imaginer que les œuvres de l'artiste exposées au Museo Picasso Málaga prennent une vie propre, chargée d'une énergie subtile qui transcende les formes visuelles.

Les œuvres rassemblées dans « Genius Loci », qui semblent souvent construites comme s'il s'agissait d'architecture, ne cherchent pas à reproduire fidèlement la réalité: les lignes précises et les objets représentés semblent appartenir à un monde parallèle où le temps s'est arrêté, évoquant un sentiment de mystère chez le spectateur.

Quatre sections 

Cette exposition rassemble une série d'œuvres créées entre 2015 et 2025, dans lesquelles l'artiste belge continue de défier les conventions de l'espace pictural.

L'exposition est divisée en quatre sections. 

• Elle commence par « El taller (L'atelier) », un thème choisi par l'artiste comme un espace de réflexion sur les conventions de la peinture. Ici, des modèles féminins sont au repos à côté de châssis vides et de toiles vierges, dans des pièces qui montrent la grille caractéristique avec laquelle Atassi équilibre nombre de ses toiles. 
• Dans « El cabaret mecánico (Le cabaret mécanique) », le groupe de peintures montre des corps féminins en mouvement dans une chorégraphie synchronisée de jambes, de cerceaux et de balles,
• « La orilla (Le rivage) » présente des scènes d'extérieur où des baigneurs prennent le soleil sur une plage représentée par des couleurs horizontales unies sous la forme d'un ciel bleu, d'une mer turquoise et d'un sable beige. 
• Dans « A través de la ventana (À travers la fenêtre) », la dernière des sections, les toiles montrent des personnages féminins entourés de fleurs et de fruits, à côté de fenêtres qui donnent sur des ciels nuageux et des nuits étoilées.

Bernard Ruiz-Picasso, petit-fils du peintre de Malaga et président du conseil d'administration du musée Picasso, a souligné que l'exposition de Farah Atassi s'inscrit dans la ligne d'exposition de la galerie qui consiste à donner de la visibilité à l'œuvre des femmes artistes.

En effet, cette exposition du Picasso Málaga met à nouveau l'accent sur le travail des femmes artistes, après les précédentes consacrées à Sophie Taeuber-Arp (2009), Hilma af Klint (2013), Louise Bourgeois (2015), les femmes artistes et le surréalisme (2017), Paula Rego (2022) et María Blanchard (2024).

Bernard Ruiz-Picasso a rappelé que, depuis l'ouverture du musée en 2003, l'objectif était de « l'ouvrir au XXIe siècle et d'y inclure également l'œuvre d'artistes du XXe siècle », et a ajouté que dans le cas d'Atassi, on peut voir « comment elle interprète, récupère, transforme et s'approprie l'art ».

L'exposition est accompagnée d'un catalogue bilingue de 80 pages en espagnol et en anglais, abondamment illustré et comportant des textes de Marjolaine Lévy, commissaire de l'exposition, et du chercheur Peter Read.