Le changement climatique est une préoccupation mondiale majeure. Où en est le Portugal dans ce combat international ?


En 2025, le Portugal occupait la 15ème place sur 29 pays dans l'indice de la transition verte. Malgré un démarrage tardif de sa transition énergétique dans les années 2000, le Portugal a réussi à progresser plus rapidement que plusieurs de ses voisins européens.
Une transition énergétique accélérée
En 2024, 71% de la consommation d'électricité au Portugal provenait de sources renouvelables selon les données officielles du gestionnaire du réseau électrique national, REN (Redes Energéticas Nacionais). Le pays a également réduit ses émissions de dioxyde de carbone, passant de 3,7 millions de tonnes en 1990 à 1,9 million de tonnes en 2024. Tandis que les scientifiques du monde entier s’interrogeaient sur la vie à 50°C dans certaines capitales européennes, Lisbonne s'est engagée activement dans une transformation durable. Nous présentons ici les principales actions climatiques portugaises.
Engagement national et défis persistants
Le Portugal a été particulièrement touché ces dernières années par les aspects du réchauffement climatique :
- Des incendies de forêt ravage tous les ans e territoire, plus de 135 000 hectares en 2024
- Une pénurie d'eau persistante affecte les régions de l'Alentejo et de l'Algarve
- L'élévation du niveau de la mer menace les zones côtières, aggravant l'érosion et mettant en péril infrastructures et écosystèmes.
Pourtant, dans un reportage de France 24 diffusé en novembre 2021, le média soulignait que le Portugal est le pays de l'Union Européenne ayant le mieux réussi à réduire ses émissions de gaz à effet de serre depuis 2005. Une performance rendue possible grâce à des solutions innovantes comme les éoliennes flottantes et les plateformes solaires offshore ancrées par des chaînes au fond marin de sa côte Ouest.
Depuis la fermeture anticipée de ses deux dernières centrales à charbon à Sines et Pego en 2021, le Portugal a misé pleinement sur les énergies renouvelables. Selon les données officielles du gestionnaire du réseau électrique national, REN (Redes Energéticas Nacionais), en 2024, 71% de l'électricité consommée au Portugal provenait de sources renouvelables, établissant un nouveau record national. L'engagement dans le plan RNC2050 (neutralité carbone à l'horizon 2050) reflète cette volonté, misant sur les transports publics, la rénovation énergétique des bâtiments et les énergies propres. Selon l'Agence Internationale de l'Énergie (AIE), le Portugal fait figure de pionnier en s'étant fixé très tôt des objectifs de neutralité carbone.
De plus et lancé en 2021, le pacte climatique portugais favorise la mobilisation citoyenne et le soutien aux actions locales, tandis que le premier plan d'adaptation au changement climatique (P-3AC), adopté en 2019, intègre les risques climatiques dans l'aménagement du territoire, la santé publique et la gestion de l'eau.
Portugal et énergie renouvelable en graphiques


Engagements internationaux
En 2024, le pays s'est engagé à hauteur de 68,5 millions d'euros dans le financement international de la lutte contre le changement climatique, notamment via la conversion de dettes en investissements climatiques avec l'exemple du Cap-Vert. Ce mécanisme, connu sous le nom de Debt-for-Climate Swap, permet à un pays en développement de voir une partie de sa dette annulée, à condition qu'il réinvestisse l'équivalent de cette somme dans des projets environnementaux destinés à lutter contre le réchauffement climatique. Dans le cas du Cap-Vert, le Portugal a accepté de convertir une part de la dette capverdienne en un fonds commun, spécifiquement destiné à financer des initiatives de transition énergétique et de résilience climatique sur l'archipel. Ainsi, au lieu de rembourser cette dette directement au Portugal, le Cap-Vert oriente désormais ces fonds vers un fonds national pour le climat, mis en place sous gestion conjointe ou supervision portugaise.
Cette initiative s'est faite en marge de la Conférence des Nations Unies sur le changement climatique (COP29) à Bakou en novembre 2024.
Par ailleurs, le pays renforce sa diplomatie climatique dans le domaine maritime, comme en témoigne sa collaboration étroite avec la France autour des préparatifs de la troisième Conférence des Nations Unis sur l'Océan (UNOC) prévue à Nice en 2025. Le Portugal avait reçu la précédente conférence en 2022.
Lisbonne, capitale verte
En 2020, Lisbonne a été la première capitale du sud de l'Europe à recevoir le titre de Capitale Verte de l'Europe grâce à une réduction de 50% des émissions de CO2 municipales entre 2002 et 2020. Cette transition repose sur plusieurs actions concrètes :
Le plan d'adaptation au changement climatique de la Région métropolitaine de Lisbonne (AML)
Introduit en 2018, ce document stratégique couvre 18 municipalités (3 000 km²) et a engagé 18 maires pour son implication et sa mise en œuvre. Structuré en trois phases entre 2018 et 2020, il a permis de définir les vulnérabilités du territoire et de proposer des mesures concrètes de résilience face aux changements climatiques.
Le programme de jardins urbains adopté via le « Plan Vert » dès1997
Ce programme vise à accroître la végétalisation en milieu urbain pour lutter contre les îlots de chaleur, les pénuries d'eau, les inondations et limiter l'urbanisation. Les jardins urbains ont pour objectif de limiter la disparition des espaces vacants. De fait, des quartiers comme Marvila ou Campolide ont vu l'émergence de jardins communautaires et la naissance de véritables « couloirs verts ». Un autre projet de verdissement des toits et façades a été réalisé en parallèle par Lisboa Verde Fund.
L'investissement privé dans un programme de surveillance des fuites d'eau depuis 2005
Face à la variabilité des précipitations et à la sécheresse, Lisbonne a investi dans un programme de surveillance et de détection des fuites pour gérer la rareté de l'eau, grâce à Empresa Portuguesa das Águas Livres (EPAL).
Le système d'approvisionnement en eau et le réseau hydraulique est donc plus efficace et rentable, empêchant l'eau qui fuit et générant des économies d'environ 68 millions d'euros depuis 2005, faisant passer le taux d'eau non facturée de 23,5% en 2005 à 8,5% en 2015.
Projet de deux tunnels de drainage débuté en 2023
Deux tunnels sont en construction pour prévenir les inondations. Le premier reliera Campolide à Santa Apolónia, tandis que le second s'étendra du Beato à Chelas. La fin des travaux et la mise en service est prévue fin 2025 selon la Plano Geral de drenagem de Lisboa.
Des résultats concrets, mais des défis à relever
Selon le site du Parlement européen, entre 2005 et 2023, le Portugal a réduit ses émissions nettes de gaz à effet de serre de 43,9 %, dépassant largement la moyenne de l'UE de 30,5 % sur la même période. En 2023 également, le pays a actualisé son plan de relance en y consacrant 41,2 % à la transition climatique et a soumis une nouvelle version de son plan énergie-climat en décembre 2024.
Le pays vise à produire 85 % de son électricité à partir de sources renouvelables d'ici 2030. Des projets innovants, tels que l'installation d'énergie houlomotrice à Porto, illustrent cette ambition.
Cependant, des marges d'améliorations subsistent dans certains domaines, notamment :
- Les secteurs des transports et de l'agriculture, qui peinent à réduire leurs émissions, nécessitant des politiques publiques plus. Selon les statistiques de la Direção-Geral de Energia e Geologia (DGEG), entre juillet 2022 et juillet 2023, les émissions du transport routier ont atteint 18,2 MtCO₂, soit une hausse de 6,2 % par rapport à la période pré-pandémique (2018–2019).
- La gestion des déchets, où le Portugal se classe cette fois-ci mauvais élève avec une place de 28ème sur 29 pays dans l'indice de la transition verte.
- La gestion hydraulique où le pays se classe 25ème en termes d'efficacité selon l'indice de la transition verte, malgré sa vulnérabilité aux sécheresses estivales.
- Les risques climatiques et catastrophes naturelles, où des menaces comme l'érosion côtière et les incendies de forêt sont de plus en plus prononcés, exacerbés par le changement climatique. Les incendies de septembre 2024 dans le nord et le centre du Portugal avaient ravagé plus de 120 000 hectares de forêt en seulement quatre jours.
Le Portugal s'impose comme un acteur dynamique de la transition énergétique en Europe. Toutefois, pour atteindre ses objectifs ambitieux, il devra combler ses retards dans des secteurs clés, renforcer la résilience face aux risques climatiques, et surmonter les défis techniques et économiques liés au développement de l'éolien offshore avec la complexité des installations flottantes, notamment pour atteindre son objectif de 2 GW d'ici 2030.