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Indonésie : Comment en finir avec la déforestration ?

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Concession d'huile de palme après déforestation en Indonésie. (Source : Ecowatch)
Écrit par Asialyst
Publié le 9 juin 2021, mis à jour le 23 janvier 2024

La déforestation est en recul de 17 % dans l’archipel indonésien, qui abrite la huitième plus grande superficie forestière au monde. Mais le phénomène est loin d’être enrayé. Pour réussir, il faut réformer les pratiques tout au long de la chaîne de valeur. Rien ne se fera sans une forte volonté politique et une coopération entre les acteurs publics et privés à différentes échelles.

 

Publié en avril dernier, le rapport annuel du Global Forests Watch était univoque. Malgré la crise du Covid-19, la forêt vierge tropicale a continué de reculer en 2020, de 12 % de plus que l’année précédente. La disparition des forêts primaires a provoqué l’émission d’au moins 2,64 gigatonnes de CO2, soit l’équivalent des émissions annuelles de 570 millions de voitures, selon l’ONG. Les forêts tropicales humides, qui revêtent une importance particulière en matière de stockage du carbone, sont les plus touchées par le phénomène. Cependant, parmi les pays tristement connus pour la perte de leurs forêts, l’Indonésie témoigne d’un recul de la déforestation de 17 % en 2020 par rapport à l’année précédente, selon le même rapport, prolongeant un recul entamé il y a quatre ans. Peut-on déjà s’en réjouir ? La gouvernance des forêts et la coopération internationale y ont-elles participé ?

 

L’archipel indonésien abrite la huitième plus grande superficie forestière du monde, et la troisième plus grande superficie de forêt tropicale. Cependant, entre 2002 et 2019, l’Indonésie a perdu plus de 26 millions d’hectares de couverture forestière. Parmi eux, 36 % étaient des forêts primaires humides. Jusqu’alors second derrière le Brésil, le pays de Joko Widodo est même devenu au début des années 2010 le territoire où la déforestation annuelle est la plus sévère au monde. En 2012, l’archipel affichait par exemple une perte des forêts vierges deux fois plus importante qu’au Brésil. Certaines îles sont particulièrement affectées, notamment l’île de Bornéo qui a déjà perdu la moitié de ses forêts.

éforestation à Bornéo selon les estimations et prévisions du Fonds m

Déforestration selon les estimations et prévisions duDéforestation à Bornéo s Fonds mondial pour la nature (WWF) (Source : Clotilde Luquiau, "Une controverse autour de l’huile de palme : regard international versus regard local", in Cahiers d’Outre-Mer 71, no. 278, 1 July 2018: 541–53)

 

Cette déforestation est communément due à la production d’huile de palme et à d’autres plantations agricoles, à l’industrie du papier, à l’exploitation forestière, aux infrastructures et aux projets miniers, et enfin aux incendies incontrôlés. Dans le cadre de l’Accord de Paris de 2015, l’Indonésie s’est fixé un objectif de réduction de 29 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport au scenario de référence d’ici 2030. Cet objectif inclut les émissions liées à la déforestation et à la destruction des tourbières, qui constituent la première source d’émissions du pays. Même si les grandes entreprises de l’huile de palme et de la pâte à papier se sont engagées vers un objectif de « déforestation zéro », l’Indonésie restait le troisième pays à avoir perdu le plus de forêts primaires en 2019, autour de 324 000 hectares. Pourtant, depuis 2016, le rythme de la déforestation est en baisse, suggérant que certains efforts ont pu porter leurs fruits.

 

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Perte de forêts primaires en Indonésie, 2012-2019. (Source : Elizabeth Dow Goldman, Mikaela Weisse, "We Lost a Football Pitch of Primary Rainforest Every 6 Seconds in 2019", in Global Forest Watch Blog, 2019)

L’HUILE DE PALME, PRINCIPALE RESPONSABLE ?

Le secteur de l’huile de palme est fortement critiqué pour être à l’origine d’une conversion massive de l’utilisation des terres entraînant la disparition des forêts. Le pays est en effet le principal producteur mondial d’huile de palme. Entre 1990 et 2010, la production indonésienne a ainsi été multipliée par huit. À Sumatra par exemple, les plantations se sont développées depuis les années 2000 et au cours de cette décennie, environ 19 % des 3,5 millions d’hectares déforestés sur l’île sont directement attribués à ce secteur. Dans un rapport publié en 2018, l’ONG Greenpeace affirmait que les activités des 25 plus grands producteurs d’huile de palme avaient détruit plus de 130 000 hectares de forêts depuis 2015.

 

La déforestation à grande échelle a commencé en Indonésie avec la promulgation de la loi forestière de 1967, qui encourageait l’exploitation privée de toutes les forêts, sauf à Java. Suite à l’exportation de ce bois, afin de développer une industrie nationale, l’Indonésie a mis en place en 1985 une interdiction d’exportation de grumes qui a conduit les groupes forestiers à se tourner vers la production de contreplaqué. Cette dernière a ainsi grimpé de 600 000 mètres cubes en 1979 à plus de 9 millions en 1990, ce qui a placé le pays au premier rang mondial des exportateurs. Résultat : une déforestation accélérée qui a entraîné une raréfaction des ressources disponibles et finalement, l’effondrement du secteur. C’est à cette époque que l’industrie de la pâte à papier s’est développée. L’émergence du secteur de l’huile de palme n’est venue que plus tard. La superficie des plantations de palmiers, d’environ 350 000 hectares en 1985, n’a cessé de se démultiplier ensuite, atteignant 2 millions d’hectares en 2000 puis 5,8 millions en 2010 et 11,3 millions d’hectares en 2018. L’huile de palme a donc pris une grande part dans le changement d’affectation des terres, mais elle n’est pas le seul facteur de déforestation en Indonésie.

 

En outre, toutes les zones déforestées ne sont pas converties en plantations. Souvent, elles sont laissées en jachère jusqu’à devenir des savanes dégradées qui peuvent ou non être converties en activités agricoles. Sur les 59 millions d’hectares de forêt perdus entre 1950 et 1997, 7,1 millions d’hectares ont été convertis en terres arables, 10,2 millions d’hectares en plantations et les 42 millions restants ont été laissés en friche, ce qui autorise à penser que les projets agricoles n’étaient qu’un prétexte pour récolter le bois, au rendement immédiat. De plus, l’exploitation forestière communautaire s’ajoute à ces projets à plus grande échelle, permettant à de nombreuses familles de vivre de la vente du bois. L’apparition de plus en plus fréquente d’incendies incontrôlés est encore une autre cause de la déforestation. Ils sont souvent causés par la culture sur brûlis, permettant de fertiliser rapidement de nouvelles terres. Elle est utilisée aussi bien par les communautés locales et les petits agriculteurs que par les grands après avoir abattu des arbres, afin de réduire l’utilisation d’engrais dans les premières années d’exploitation.

 

UN DILEMME ENVIRONNEMENTAL, SOCIAL ET ÉCONOMIQUE

Le premier impact direct de la déforestation réside dans la perte de biodiversité, à travers la destruction d’écosystèmes et la disparition d’espèces endémiques, tant au niveau de la faune que de la flore. La destruction de ces écosystèmes modifie aussi la température de surface régionale.

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Auteur de l'article : 

adele taguy asialyst
 Adèle Tanguy

Etudiante en Relations Internationales et Politique de l’Environnement à Sciences Po, Adèle Tanguy se spécialise dans l’étude de la région asiatique, et notamment de l’Asie du Sud-Est. Ses expériences en tant que journaliste l’ont menée à séjourner au Cambodge. Elle a par la suite mêlé son intérêt pour l’environnement et les ressources en eau et la région en réalisant un mémoire de recherche sur les conséquences environnementales, sociales et géopolitiques des barrages sur le Mékong. Elle élargit maintenant son champ d’études à la gestion des ressources naturelles et aux controverses environnementales et de développement en Asie.

 

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