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A Chiang Mai, la viande végétale déclare la guerre à la pollution

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De plus en plus de marques proposent des alternatives à la viande en Thaïlande, sans pour autant délaisser le goût
Écrit par Catherine Vanesse
Publié le 1 février 2021, mis à jour le 28 avril 2021

En Thaïlande, le substitut végétal de viande n’est pas nouveau, notamment autour de la religion. Mais à Chiang Mai, cet aliment de plus en plus tendance vise désormais la problématique de la pollution

Chaque année entre janvier et mars, les taux de particules fines atteignent régulièrement des niveaux alarmants à Chiang Mai, plongeant par la même occasion la ville et l’ensemble du nord de la Thaïlande sous une chape de fumée. 

“Peut-on uniquement blâmer les agriculteurs de pratiquer la technique du brûlis si on ne regarde pas dans son assiette?” interroge d’emblée Smith Taweelerdniti, le président et fondateur de Let’s Plant Meat, une compagnie agroalimentaire à Chiang Mai qui entend révolutionner le marché des substituts de viande.

“À Chiang Mai, la pollution provient du brûlage des déchets de maïs. Qui consomme ce maïs? Ce n’est pas l’homme directement, cela sert principalement à nourrir les poulets ou les cochons d'élevage qui plus tard seront consommés par les individus. J’ai parfois l’impression que les gens ne voient pas la chaîne de la demande alors que c’est là qu’on trouve la plupart des solutions. Si vous mangez de la viande tous les jours, cela a un coût pour l’environnement”, ajoute le quadragénaire. 

Smith Taweelerdniti a créé Let's Plant Meat à la suite d'une réflexion personnelle en devenant végétarien et en prenant conscience de l'impact qu'il avait sur l'environnement, en particulier quand on vit à Chiang Mai (Catherine Vanesse)
Smith Taweelerdniti a créé Let's Plant Meat à la suite d'une réflexion personnelle en devenant végétarien et en prenant conscience de l'impact qu'il avait sur l'environnement, en particulier quand on vit à Chiang Mai (Catherine Vanesse)

Lancée en mars 2020, Let’s Plant Meat a réussi à s’imposer comme l’un des leaders sur ce secteur. Présente dans plus de 150 supermarchés et dans les restaurants, la marque propose actuellement deux produits végétaux : des steaks hachés et un simili porc émincé. Une gamme qui va s’élargir avec l’arrivée en février d’une imitation de tonkatsu, une spécialité japonaise de porc pané et frit. Au total, l’entreprise produit 8 tonnes de succédané de viande par mois, une quantité encore inférieure à la capacité de production de 500 kilos par jour qu’elle rêve d’atteindre prochainement.

En Thaïlande, les alternatives à la viande n’ont rien de nouveau. De nombreux restaurants végane -“Jay- เจ”- servent des "viandes" d’origine végétale à base de blé et de soja, mais ils sont davantage destinés aux bouddhistes végétariens qui cherchent à éviter la consommation d’animaux pour des raisons religieuses. 

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Cependant, on observe depuis quelques années, et encore plus depuis l’épidémie de coronavirus, une prise de conscience auprès d’un public plus large sur les questions de santé et d’environnement, ainsi qu’un engouement de la part de sociétés agroalimentaires pour les substituts de viandes. 

Parmi celles-ci, le géant Charoen Pokphand Foods Pcl a introduit une gamme de produits à base de végétaux en 2020, tandis que NR Instant Produce Pcl a commencé à vendre une imitation de viande de porc à base de fruit, le jacquier, en 2016. Selon NR Instant Produce Pcl, en 2020, 7% de ses revenus provenaient de la vente d’aliments à base de végétaux et elle s’attend à ce que ce chiffre grimpe à 30% dans les quatre prochaines années. De son côté, l’agence MarketsandMarkets estime que le marché des substituts de viandes devrait valoir plus de 27,9 milliards de dollars mondialement d’ici 2025, deux fois plus que les 12,1 milliards de dollars générés en 2020. 

Signe d’un changement majeur?

“Plus il y a de volume, plus on peut avoir un impact. Pour le moment, il y a au moins cinq compagnies thaïlandaises qui développent des succédanés de viandes, chacune son marché. On voit aussi de plus en plus de sociétés qui habituellement ne proposent que de la viande se tourner vers des alternatives végétariennes. C’est une bonne chose. Si l’offre est plus large, cela peut offrir plus de visibilité dans les supermarchés, on peut espérer un jour avoir un véritable espace dédié”, commente Smith. 

Si le marché semble prometteur, il fait néanmoins face à des préjugés. “Pour amener un véritable changement, il faut modifier la perception sur le végétarisme. En Thaïlande, c’est encore trop souvent associé à une notion d’abstinence, pour gagner des mérites. Il y a aussi cette idée que manger végétarien est soit très bon marché mais pas spécialement bon, ou alors c’est très cher”, analyse Smith Taweelerdniti qui a créé sa marque Let’s Plant Meat après avoir observé les réactions de son entourage et les difficultés d’être lui-même végétarien depuis 2017. 

En terme de goût, les substituts de viande se confondent de manière assez surprenante avec la "vraie" viande
En terme de goût, les substituts de viande se confondent de manière assez surprenante avec la "vraie" viande

La marque américaine Beyond Meat s’est imposée comme l’une des marques principales sur le marché mondial de la production de fausse viande. En Thaïlande, un burger Beyond Meat surgelé se vend à 170 bahts pièce. Un prix élevé pour Smith Taweelerdniti qui souhaitait proposer une alternative moins chère pour séduire un public plus large. “Nous vendons nos burgers à 75 bahts, cela peut paraître bon marché, mais en comparaison à la viande, nous restons quand même plus chers. Après s’il y a un plus grand intérêt du public, nous pouvons produire plus et donc réduire les coûts”, commente l’ingénieur industriel. 

En alliant un prix plus accessible que des produits d’importation, des produits de qualité et variés, un packaging attractif et une présence dans les supermarchés, Let’s Plant Meat essaye de combiner la bonne formule pour attirer un consommateur qui habituellement mange de la viande. 

“Nos produits ont naturellement tout pour plaire aux végétariens, mais ils ne sont pas pourtant pas les principaux consommateurs, car d’une certaine façon, ils ne sont en principe plus en recherche de saveurs rappelant la viande. Par contre, il y a un marché auprès des mangeurs de viande, de ceux qui font déjà attention à trier leurs déchets, à ne pas utiliser des sacs en plastiques, etc. Pour produire un steak, il faut compter 10.000 litres d’eau. Si vous recyclez 200 bouteilles de plastique, cela n’équivaut même pas à compenser un repas à base de viande! Si nous vous offrons un aliment qui a un impact environnemental moindre et dont le goût est similiaire à celui de la viande, seriez-vous prêt à changer un, deux ou trois repas par semaine?”,conclut Smith Taweelerdniti. 

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