Édition internationale

INTERVIEW- Gilles Serra, nouveau Président de la Chambre Franco-Espagnole de Commerce et d'Industrie

Écrit par Lepetitjournal Valence
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 23 mars 2010

 

Il a été élu en janvier à la tête de la Chambre de commerce et d'industrie, succédant à Jean-Charles Raufast, dont le mandat était arrivé à terme. De Katmandou à Montevideo, du Nigeria au Bangladesh, Gilles Serra a partagé sa vie professionnelle entre banque et CCI. Il est à Madrid comme un poisson dans l'eau. Rencontre

(Photo Lepetitjournal.com)

Lepetitjournal.com : Pouvez vous nous retracer les grandes lignes de votre parcours professionnel ?

Gilles Serra : J'ai fait toute ma carrière dans la banque, dans des pays aussi divers et variés que le Bangladesh, le Pakistan, le Nigeria, l'Inde, le Népal, le Liban, la Turquie, l'Uruguay? Dans tous ces pays, j'ai également été membre des conseils d'administration des chambres de commerces locales. Arrivé à Madrid en 2004, je suis au conseil de La Chambre depuis 2008.

Que vous ont apportées ces expériences ?
Une capacité d'analyse et de synthèse très différente de celle des gens qui ont passé toute leur vie dans le même pays. Quand on arrive dans un nouveau pays, il faut essayer de comprendre rapidement ce qu'il s'y passe et surtout, ne pas se tromper. Une crise en Espagne n'a pas le même sens qu'une crise au Bangladesh.

Vous prenez la présidence de La Chambre. Quelles sont les antennes rattachées à vos fonctions ?
La Chambre de Commerce et d'Industrie de Madrid, ainsi que les antennes de Valence et de Bilbao, ce qui représente près de 500 membres.

Quels sont les services que vous apportez aux entreprises qui vous sollicitent ?
Notre véritable valeur ajoutée, c'est le service de proximité. On se rend compte que de plus en plus l'information est disponible un peu partout, pour qui souhaite la trouver : sur Internet, auprès des missions économiques, d'Ubifrance etc?
Notre raison d'être, c'est le passage au particulier, au privé, au ponctuel : faire face aux nécessités concrètes de nos interlocuteurs. Par exemple, proposer des locaux, aider dans les démarches d'embauche de V.I.E?
Nous sommes en mesure de fonctionner à plusieurs niveaux : organiser un déjeuner pour les patrons des grands groupes en "tête à tête"avec le directeur de la Banque Centrale, ou récupérer le chèque de TVA d'un transporteur qui organise du transit dans le pays.

Vous vous occupez en priorité des entreprises françaises ?
Qu'est-ce qu'une entreprise française ? Un boulanger français qui s'installe en Espagne, dont la clientèle est exclusivement espagnole, qui paye ses impôts en Espagne : c'est une entreprise française ? A l'inverse, un groupe comme Telefonica qui réalise l'essentiel de son chiffre d'affaires à l'étranger, qui est coté à la bourse de New York et dont la majorité du capital est détenu par des étrangers : c'est une entreprise espagnole ? Il n'y a plus de concepts frontaliers et nous ne pouvons pas nous limiter à cette approche.

Quelles seront vos priorités en tant que nouveau Président ?
Tout d'abord il est important de signaler que La Chambre se porte bien. Elle est en très bonne santé financière et les activités qu'elle propose ont toujours beaucoup de succès. Je souhaite donc conserver et développer ce qui a été acquis par mes prédécesseurs.

Ensuite ?
Je crois que nous devons par ailleurs améliorer notre communication vis-à-vis des sièges de filiales françaises établies en Espagne. L'Espagne était jusqu'il y a deux ans le cygne blanc de l'Europe. Elle en est devenue le vilain petit canard. C'est vrai que le pays a des problèmes de PIB, mais cela reste un très grand pays, dans lequel il fait bon investir. Certes le niveau de vie va peut être redescendre au niveau de 2004, les chiffres d'affaires vont continuer à baisser selon les industries, jusqu'à des niveaux plus faibles, mais il ne faut pas se laisser gagner par la panique.
Notre deuxième effort doit porter sur la communication du même message, mais vis-à-vis des Espagnols.
Enfin, il existe en Espagne beaucoup d'organisations au service de la communauté francophone. Je pense évidemment à l'Ambassade, mais aussi au Lycée Français, à l'Institut Français, aux associations etc?. Nous avons la chance de ne pas avoir de guerre ouverte entre ces entités, comme c'est le cas dans d'autres pays. Nous devons développer les synergies avec chacune d'entre elles et proposer ensemble des évènements passerelle.

Quel est votre regard sur la crise espagnole ?
En trois mots : gueule de bois.

Et l'aspirine ?
Il n'y en a pas. Pendant dix ans la croissance a été trop forte, tirée par l'immobilier et la consommation des ménages. C'est notamment la faute aux banques, qui ont donné trop de crédits aux citoyens. Aujourd'hui, les Espagnols sont parmi les citoyens les plus endettés au monde, dans le même groupe que les Anglais ou les Américains.
Tout cela a soudainement cessé de fonctionner. Il faut maintenant que l'économie se refroidisse et que le prix de l'immobilier baisse.
Je voudrais quand même rappeler quen 1960, l'Espagne avait un PIB par habitant équivalent à 64% de la moyenne européenne. En 2008, ce même PIB par habitant était équivalent.
L'Espagne est aujourd'hui un pays riche : la sortie de crise se fera à la manière d'un pays riche. En d'autres termes, on ne peut pas tabler sur une croissance à 5%;si l'on arrive à 2% ce sera très bien.

Et quel est selon vous la date de sortie de crise ?
Tout ce que je peux vous dire, c'est que le redémarrage de l'économie espagnole passe par la mise en condition des banques espagnoles, pour qu'elles soient capables de donner de nouveau du crédit aux entrepreneurs. 2011 ? 2012 ?

Propos recueillis par Vincent GARNIER (www.lepetitjournal.com - Madrid) mercredi 3 février 2010

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Publié le 3 février 2010, mis à jour le 23 mars 2010
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