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BARDO - De liesse et de rage

Écrit par Lepetitjournal Tunis
Publié le 7 août 2013, mis à jour le 7 août 2013

Le 6 août 2013 restera sans doute gravé dans l'histoire de la Tunisie : une véritable marée humaine portant des milliers de drapeaux nationaux a littéralement déferlé sur le Bardo, théâtre d'une contestation soutenue depuis le 27 juillet

Dès le matin, et suite à l'annonce de la séance plénière par Mustapha Ben Jaâfar, les manifestations ont débuté au Bardo. De nombreux appels au rassemblement avaient été lancés de la part des partis d'opposition et plus particulièrement par Basma Khalfaoui, veuve de Chokri Belaïd, assassiné jour pour jour 6 mois auparavant. Cette dernière avait insisté pour que cette commémoration soit festive, colorée et culturelle.

Des milliers de personnes étaient déjà présentes autour de la place pour la rupture du jeûne. Comme chaque soir, les "cuisinières solidaires" ont servi leurs plats traditionnels. Un flot incessant venant des

artères principales autour du Bardo a porté, selon les premières estimations, plus de 150 000 personnes aux environs de minuit, des centaines de personnes continuant à affluer de toutes parts. L'avenue Bourguiba était également noire de monde. Le nombre total estimé incluant les manifestants arrivés après minuit est d'environ 350.000 personnes.

Des milliers de personnes sont venues de toutes les régions de Tunisie, par leurs propres moyens ou acheminées par car, certains cars portant une banderole indiquant "bénévoles, pas mercenaires", en référence aux rumeurs soupçonnant Ennahdha de payer des manifestants ou fauteurs de troubles.

Tout au long de la soirée sur la place et dans les rues environnantes, des performances artistiques telles que la percutante représentation théâtrale des crimes.

Des centaines de panneaux et banderoles à l'effigie de Mohamed Brahmi, assassiné le 25 juillet, ainsi que de Chokri Belaïd, portant des inscriptions telles que "qui sont les coupables", "stop au terrorisme d'état", étaient brandies par les manifestants.

Des chants et des slogans contre le gouvernement et plus particulièrement contre Rached Ghannouchi, le président d'Ennahdha, considéré par les contestataires comme "la racine du mal", ont retenti du début à la fin de la nuit.

Vers 22h00 ce sont des centaines de personnes qui ont porté un drapeau géant de plus de cinquante mètres au milieu de la foule, depuis le boulevard du 20 mars, reliant la Place Bab Saadoun à la Place du Bardo et fermé à la circulation, jusqu'au centre de la manifestation.

La rage au coeur

Parallèlement, un avocat en robe muni d'un mégaphone devançait un autre cortège, qui brandissait une banderole à l'effigie de Chokri Belaïd et hurlait des slogans anti-gouvernementaux.

Plus loin des groupes de jeunes tapent sur des tambours ou portent des panneaux exprimant leur rage : "dégage", "game over", "y'en a marre", "liberté" .... D'autres arborent le célèbre masque des "Anonymous".

Malgré l'affluence et la chaleur, le bruit et la colère, ni bousculade ni incident : jeunes, personnes âgées, hommes, femmes, classes populaires ou bourgeoises, tous semblent ici être unis inconditionnellement pour la Tunisie et la liberté qu'ils estiment en danger, et plus particulièrement depuis les assassinats des opposants politiques suivis des attentats de Chaambi.

A minuit l'hymne national a été entonné par des milliers de patriotes.

L'ANC en berne

Le 6 août, 135 députés sur un total de 216 étaient présents à la plénière qui a débuté par des versets du coran récités à la mémoire de Mohamed Brahmi, suivis d'une oraison funèbre prononcée par le président de l'ANC, Mustapha Ben Jaafar. Cette initiative a été décriée par la famille du défunt.

La plénière était consacrée à l'examen de la situation sécuritaire dans le pays, en présence du chef du gouvernement Ali Laarayedh.

Les élus dissidents qui continuent à observer leur sit-in devant l'ANC, se sont opposés fermement à sa tenue. Un important dispositif des forces de l'ordre a été déployé à l'entrée de l'ANC.

Mustapha Ben Jaâfar a annoncé en fin d'après-midi la suspension des travaux de l'Assemblée nationale constituante jusqu'au lancement du dialogue entre toutes les parties prenantes du paysage politique et de la société civile : l'UGTT et Houcine Abassi, les dirigeants des principaux partis politiques, Rached Ghannouchi, Béji Caïd Essebsi et Néjib Chebbi, entre autres, pour dialoguer avec les autres protagonistes de la scène politique et sociale autour d'une même table afin de trouver une issue à la crise. Il a également lancé un appel aux « vieux sages » dont notamment Ahmed Mestiri, Ahmed Ben Salah, Mustapha Filali afin de bénéficier de leurs conseils quant à la crise actuelle.

Plus de photos ici 

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Isabelle Enault (www.lepetitjournal.com/tunis) mercredi 7 août 2013

 
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Publié le 7 août 2013, mis à jour le 7 août 2013

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