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CHRONIQUE - Interdiction de buller et de mâcher

Écrit par Lepetitjournal Singapour
Publié le 31 octobre 2012, mis à jour le 21 novembre 2012

 

Singapour a depuis toujours adopté des règles strictes ainsi que des peines lourdes en cas de non respect de la Loi. La plus originale voire même insolite reste celle de l'interdiction du chewing-gum depuis maintenant 20 ans

Le chewing-gum à Singapour peut être rangé dans la même catégorie que les narcotiques. Il est totalement interdit. Les peines ne sont bien sûr pas comparables à celles encourues pour possession de stupéfiants mais l'amende peut faire très mal au portefeuille. De même, si un agent de l'ordre ou de la douane découvre une personne en plein délit de mastication ce dernier doit recracher et assister impuissant à la destruction complète de sa "marchandise". Cela semble dur mais pourtant la cité du Lion revendique depuis plusieurs années maintenant les avantages et les raisons de cette loi.

Un gouvernement qui ne mâche pas ses mots
C'est en janvier 1992 que la loi interdisant la vente et la consommation de chewing-gum fut adoptée. Le gouvernement de Go Chok Tong à cette époque ne pouvait plus supporter de voir la pâte à mâcher usagée envahir les lieux publics. Mais le déclencheur "officiel" fut surtout de constater que certaines personnes collaient intentionnellement des chewing-gums sur les capteurs de fermeture automatique des portes du tout nouveau MRT provoquant alors un dysfonctionnement et une perturbation dans le service du réseau. Ces incidents étaient rares mais considérés comme très coûteux.

Dix ans auparavant, l'ancien Premier ministre Lee Kuan Yew avait déjà songé à appliquer cette restriction voyant que les "mastiqueurs" avaient l'audace de jeter leur chewing-gum sur les trottoirs voire même de les coller sur les sièges des bus, créant une indignation croissante. Les coûts de nettoyage impressionnants étaient aussi une des grandes raisons qui firent germer cette idée dans la tête de l'ancien dirigeant avant qu'il ne l'abandonne affirmant qu'elle était trop draconienne.
Cette raison due aux coûts de nettoyage peut tout à fait être recevable quand on voit qu'au Royaume-Uni le marché du chewing-gum qui atteint 400 millions d'euros par an est au final dévalorisé par un budget de 200 millions d'euros par an nécessaire au nettoyage.

Mais cela n'a pas empêché Singapour de recevoir des critiques au niveau international et d'être accusé d'atteinte aux droits du citoyen. Un journaliste de la BBC déclara même que ce genre de mesure aurait comme résultat une diminution concernant la créativité des Singapouriens. A cela Lee Kuan Yew répliqua "Si vous ne pouvez pas penser parce que vous ne pouvez pas mâcher, essayez la banane !"

Vers un assouplissement ?
Le chewing-gum représente un marché immense qui a réussi à atteindre plus de 23 milliards de dollars au niveau mondial entre 1998 et 2009. La France est le second consommateur au monde après les Etats-Unis avec une consommation annuelle de 1 chewing-gum par jour par habitant. Il est même le produit le plus coûteux au kilo en supermarché.

Mais cette immense manne d'argent n'a pas encore réussi à convaincre Singapour à lever cette interdiction. Cependant on peut voir que du changement fut opéré en 2004 avec une modification de la loi autorisant cette fois le chewing-gum mais uniquement à but thérapeutique. Il est donc possible de consommer de la gomme pour arrêter de fumer ou pour des problèmes de maux de gorge mais seulement après avoir reçu une ordonnance médicale et s'être déclaré aux autorités.
Cet assouplissement a pu être mis en place suite à la forte pression des Etats-Unis qui détiennent la plus grande part de marché du monde avec l'entreprise Wrigleys ; un accord de libre-échange entre les deux pays fut conclu : ne pas payer de droits de douanes sur ses exportations américaines apporte à Singapour une économie de 150 millions de dollars US.

Pourtant même après cette modification, la population n'essaie toujours pas de revenir au masticage même à des fins médicales et quant à l'existence d'un "supposé" marché noir, il n'y en a pas.
Après donc avoir ruminé pendant 20 ans sur cette loi, les Singapouriens semblent l'avoir digéré et la considèrent désormais comme un problème à la gomme !

Martin Courmont (www.lepetitjournal.com-Singapour) mercredi 31 octobre 2012

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Publié le 31 octobre 2012, mis à jour le 21 novembre 2012

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