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LGBT : La Chine évolue vers l’acceptation

un homme lgbt en chineun homme lgbt en chine

La Chine poursuit un développement frénétique dans tous les domaines depuis des années, jusque dans les consciences et les moeurs. Même si, à l'instar de ses voisins asiatiques, l'homosexualité est un sujet qui demeure tabou, l'ouverture sur le monde de la Chine permet petit à petit aux homosexuels chinois de s'assumer. Ils seraient aujourd'hui entre trente et cinquante millions.

 

Vu de nos pays occidentaux, la Chine se heurte encore de nos jours à des préjugés de toutes sortes, notamment à celui d'une dictature où les libertés sont étroitement surveillées. C'est le cas pour les problématiques des arrestations arbitraires, des "láog?i"("camps de travail", officiellement fermés), de la peine de mort et de l'homosexualité pour lesquelles les informations apportées par nos médias restent trop subjectives. En ce qui concerne ce dernier point, il est extrêmement facile de démontrer que la sphère artistique chinoise, celle qui influence le plus la pensée collective, ne souffre aucunement d'une quelconque censure envers les homosexuels.

Citons trois exemples. HAN Hong, fameuse chanteuse venue du Tibet, est sans conteste l'une des personnalités du pays les plus médiatisées et les plus populaires. Elle s'est imposée dans tous les grands évènements musicaux, devenant par exemple un membre du jury de Chinese Idol ou remportant cette saison la victoire contre d'autres chanteurs de renom dans "I'm a Singer", et s'est vue récompensée par les prix les plus prestigieux.

 

L'acte sexuel entre personnes du même sexe a été dépénalisé en 1997 et l'homosexualité a été retirée de la liste des maladies mentales en 2001

 

Pourtant, elle n'a jamais caché son attirance pour les femmes. Il en va de même pour LI Yunchun, une autre chanteuse ayant été la première à être plébiscitée par le public dans un télé-crochet (Super Girl) en 2005. Et enfin cette liste semblerait incomplète sans le nom de JIN Xing, danseuse et chorégraphe transsexuelle fréquemment présente à la télévision.

Si cette suite de personnalités prouve que les autorités et la population, à défaut d'être "gay-friendly", font tout du moins preuve d'une apparente tolérance, la cause LGBT (lesbiennes, gays, bisexuels et transsexuels) a aussi progressé dans les textes. En effet, l'acte sexuel entre personnes du même sexe a été dépénalisé en 1997 et l'homosexualité a été retirée de la liste des maladies mentales en 2001. Petite anecdote : bien avant ces deux dates, les homosexuels, comme un pied de nez à l'époque trop stricte de Mao, utilisaient le terme très communiste de (tóngzhì), soit littéralement "camarade", pour se désigner. Cette appellation reste encore très courante.

 

La "Shanghai Pride"

 

Les faits relatifs à la communauté homosexuelle se sont succédés à une vitesse plus rapide ces dernières années. Ainsi, en 2015, pour la Saint-Valentin, un concours organisé sur Taobao a attiré l'attention de près d'un million de curieux. L'opération, baptisée "We Do, l'amour arc-en-ciel et sans frontières", donnaient l'occasion aux internautes de voter pour leurs dix couples homosexuels préférés.

En effet, ce concours avait pour but de "renforcer la prise de conscience (du grand public), et évoquer le respect et la tolérance envers l'homosexualité", selon les propres mots du porte-parole d'Alibaba.

La plateforme en a profité pour développer sa clientèle LGBT en mettant en vente des formules promouvant des destinations telles que les Etats-Unis, la Nouvelle-Zélande ou le Canada, le point commun à ces pays étant la possibilité pour les homosexuels de s'y marier. Auparavant, en 2009, la première "Shanghai Pride", bien que discrète, a eu lieu et le premier bar officiellement destiné aux homosexuels a ouvert ses portes à Dali (Yunnan). Un mois plus tard, le premier faux mariage d'un couple gay était célébré dans la ville de Chengdu.

Depuis, d'autres ont suivi. C'est d'ailleurs une autre union, légale celle-là, qui a suscité un vif intérêt sur les réseaux sociaux chinois et relancé le débat sur l'homosexualité en septembre dernier : le Consul général du Royaume-Uni à Shanghai a épousé à l'ambassade à Pékin son compagnon de nationalité américaine mais d'origine chinoise.

 

Une réalité qui demeure toujours difficile à assumer

 

L'homosexualité n'est pas spécifiquement condamnée par le confucianisme, le taoïsme ou le bouddhisme, ce qui peut expliquer le très faible taux des violences homophobes, tant physiques que verbales. Mais le confucianisme fait une place importante aux rôles traditionnels de l'homme et de la femme, et le taoïsme rappelle l'équilibre essentiel entre le yin féminin et le yang masculin. La société chinoise porte un véritable culte à la famille où mariage et enfant forment un tout auquel pratiquement aucun jeune ne peut se dérober. C'est ainsi qu'a été mis en place  "mariage coopératif".

Le principe est simple : deux couples, un gay et un lesbien, se marient civilement sous l'apparence de deux couples hétérosexuels. Ainsi, ils peuvent vivre ensuite comme ils le désirent. C'est une solution plus raisonnable que l'union de convenance avec une personne hétérosexuelle qui  représente tout de même, selon des sondages, vingt millions de gays en couple avec des femmes hétérosexuelles.

 

"L'homosexualité ne nécessite aucun traitement médical"

 

Toutefois, la réalité est moins simple pour certains homosexuels encore de nos jours. Du fait de la pression familiale trop forte, ils préfèrent se faire interner dans une clinique proposant des solutions "d'ajustement de la sexualité", traitant leur "maladie" par hypnose, traitements chimiques ou décharges électriques. Cette dernière thérapie est recommandée pour les cas "les plus graves" : des électrodes sur les parties génitales, le patient reçoit une décharge à chaque fois qu'il réagit à une image pornographique homosexuelle. Néanmoins, ces "thérapies de conversion" sont de plus en plus critiquées.

Une clinique psychiatrique de Chongqing a été condamnée par la justice chinoise pour ces pratiques. Le tribunal a reconnu qu'il n'était "pas nécessaire" d'avoir recours à des électrochocs car "l'homosexualité ne nécessite aucun traitement médical". Le plaignant s'est félicité de cette décision en affirmant : "Je vais montrer ce verdict à mes parents pour leur montrer ce que dit la justice chinoise, que l'homosexualité n'est pas une maladie mentale".

De plus, en janvier 2015, un pas supplémentaire a été fait en faveur de la reconnaissance des préjudices subis par les personnes homosexuelles, avec la première plainte pour licenciement du fait de l'orientation sexuelle instruite en justice. Si les mentalités évoluent à une vitesse relativement rapide dans les villes, il n'en va pas de même dans les campagnes qui conservent le culte de la famille traditionnelle.

Le Petit Journal Shanghai
Publié le 22 juin 2015, mis à jour le 11 mars 2023
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