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La vraie vie de Cow-boy australien: partie 3 !

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Écrit par Samuel David
Publié le 23 septembre 2020, mis à jour le 23 septembre 2020

Troisième mercredi aux côtés de Sam, qui nous détaille son aventure chez les cow-boys australiens ! 

Aux côtés de Byron, Dennis, Brian et Tristan, je n’ai pas découvert à proprement parlé la vie aborigène, mais crois moi, j’ai pu comprendre leurs vies, cette vie d’isolement, cette vie si différente. Cette vie de coeur, cette vie communautaire. Tu ne fais plus qu’un, tu respectes l’autre, tu respectes et tu chéris l’autre, car ici plus qu’ailleurs le « swings and runabouts » est encore plus vrai.

Au risque encore une fois d’être rébarbatif ou encore de digresser, laisse moi t’en dire plus sur mes acolytes.

Byron est le plus jeune de la troupe, à peine 24 ans et déjà 2 enfants. Il est originaire de la Gibb, où il vit avec sa famille au sein d’une petite communauté d’une dizaine de maisons. La première ville est à 300kms. Lorsque tu connais la Gibb, cette piste off-road, probablement une des plus longues en Western Australia - environ 600kms - tu peux aisément imaginer que la vie y est paisible et pesante. Il est mon voisin de hutte, j’ai passé beaucoup de temps avec lui, à réparer son vieux Land Cruiser, à travailler avec le bétail, à discuter lors de nos longiues heures de trajet pour aller en ville. S’il est le plus jeune, il est celui qui aussi à déjà une grosse expérience, toute sa courte et déjà longue carrière, il l’a faite dans les stations. Travailleur acharné, cavalier émérite, il ne rechigne jamais à la tâche. Un bonheur de tous les jours, les mots sont comptés, mais les enseignements sont profonds. La chasse, les gestes du quotidien, se débrouiller avec rien dans l’immensité avec cette fougue de la jeunesse, il en possède tous les codes. Son « I don’t know, bro... » je l’entends encore souvent, comme une raisonnance en moi, à chaque question que je te pose pour mieux comprendre ta culture. Pas beaucoup de mots, alors il me retournait toujours cette même phrase, comme pour me dire, tais-toi, écoute, observe, apprends !

Dennis, lui, est le pur cow-boy. Rustre, rude et rugueux. Et pourtant, le plus sensible, le plus souriant lorsque tu sais atteindre son coeur. Toujours une histoire, toujours une anecdote de cow-boy, toujours de la musique country old school. Il est celui qui me met en garde sans cesse sur la vie dans la nature, m’apprenant le nom des fleurs, des plantes, me faisant goûter tel ou tel fruit du Bush, et me répétant inlassablement de ne

pas m’approcher de l’eau. « Tu ne les vois pas, mais ils t’observent ! » me parlant des crocodiles. Up North, le crocodile est un des prédateurs de l’homme. Tu vis avec, tu le sais, tu fais attention. Tous les gestes, il connait tous les gestes de la chasse et de la vie grandeur nature. Tu l’observes, tu essaies de faire pareil, et petit à petit, ce qui était de la rudesse devient du plaisir. Plaisir de jeter ton swag au milieu de nulle part, à même le sol, en te disant que tu auras pour seul spectacle la voie lactée et les étoiles filantes.

Dennis, c’est le rieur, le teacher. Dennis, c’est aussi celui que je comprends le moins, s’il parle vite, s’il parle naturellement, « what a fucking shit accent » ! Le mien est français, mais le sien est foutrement incompréhensible ! Pas grave, le temps faisant il fait des efforts pour me parler plus lentement, m’explique lorsque je ne le comprends pas... et surtout, il m’apprends les gestes ! Je retiens encore tous nos fou-rires au milieu de la poussière, manœuvrant les portes du yard « Quick ! » Ou encore « Jump in » !

Brian, c’est l’homme d’expérience. Le plus âgé, le local de l’étape, il vit à Whydam depuis presque toujours. Il est celui qui ressemble le moins à un aborigène, et pourtant celui qui parfois m’apprendra un mot de sa langue ou de son ethnie, je t’avoue que je ne sais pas bien quel vocable choisir. Le Pinjara. Malheureusement dans tout cet apprentissage je n’en ai que peu retenu de mot, seulement un « Paia guru » qui veut dire « all good ». Ce mot que j’ai appris à la toute fin de mon séjour de plus d’un mois avec mes copains de l’outback, après avoir chargé des centaines de panneaux de clôtures dans un camion, ou sans nous parler, Brian et moi travaillions de concert, en duo, en équipe, dans cette chaleur et cette poussière fil conducteur de cette vie. Avec un large sourire, lui qui du haut de son expérience est encore plus avare de mots, me lance ce « Paia guru » ! Pour être honnête, j’ai failli chialer, mais ça ne se fait pas ici !

Cow Boy Kimberley

Brian, c’est aussi celui qui m’apprend les gestes de la vie de cow-boy, il ne me demande pas de le regarder, il me montre, il m’enseigne. Brian, ce type en or, ce coeur énorme, toujours à me demander de le photographier, prenant la pause, cette putain de gueule de cow-boy, le clopiot toujours à la bouche.

Tristan, c’est la rudesse, je connais peu sa vie. Sa passion c’est la pêche, il part des jours seuls au milieu de nulle part. Il fait le vide comme pour oublier sa souffrance. Laquelle, je ne sais pas ... probablement l’éloignement de son enfant...

Revenons au mustering. Cette fois encore, nous partons dés l’aube, après le traditionnel breakfast à la lumière du feu. Toute l’équipe s’affaire autour des chevaux... des chevaux ? Oui, je m’apprête à vivre un mustering assez incroyable. Imagine, les « bull catchers » - ces 4WD sortants tout droit d’un épisode de Mad Max - l’hélicoptère, ainsi que les chevaux pour conduire le bétail. Là encore, un mélange des genres tout à fait hétéroclite, à l’image de l’Australie ! Rien n’est commun, tout est un mélange de différentes cultures, finalement je pense que c’est ce que j’aime. Ce melting-pot géant !

Pour les australiens, ce grand ramdam annuel est tout ce qu’il y a de plus commun. Pour nous, béotiens, c’est un spectacle grandeur nature.

Daylight, notre convoi s’élance au travers des plaines. L’excitation te disais-je est palpable. Il faut voir les cow-boys, ils ont fières allures sur leurs destriers, jeans, boots, bandanas et leurs chapeaux far west vissés sur la tête - Australian made of course , un Akubra !

Ils galopent, s’élancent après le bétail et petit à petit, rassemblent le troupeau pour le conduire tranquillement de paddock en paddock jusqu’au cattle yard, enfin. Mais, si

excitation il y a, toute cette action se passe aussi dans le calme, dans la réflexion, les gestes sont précis et assurés. Car ici, les chevaux sont les rois. Le bétail est craintif, fougueux, alors chaque action est emprunte de minutie. Au moindre écart, c’est la panique, il suffit qu’une seule bête ne s’échappe pour donner le « LA » à toutes les autres. Et je peux t’assurer que si les moutons sont panurgiens, les vaches et Bulls le sont aussi.

De temps en temps, un cheval se lance à la poursuite d’un égaré ou encore d’un évadé. Les autres eux, patiemment, lentement et surement conduisent le troupeau.

Et bientôt le « chopper » fait son apparition, dans le bruit et la poussière, il conduit les bêtes qu’il a rassemblé dans cette immensité. C’est incroyable de voir le pilote à la manoeuvre, il rase la cime des arbres, n’hésite pas à faire des figures de voltige pour contenir le bétail. D’un simple mouvement il guide le troupeau, récupère lui aussi un égaré ou part à la poursuite d’échappés. Du back trailer d’un bull-catcher, agrippé aux arceaux, je voltige moi aussi dans tous les sens, mon appareil photo à la main, essayant de capturer cette folie qu’est le mustering. Je n’en crois pas mes yeux, les boys à dos de cheval, les bêtes, la poussière, les courses poursuites, les bulls... voila on y est, la vie sauvage !

Cette frénésie s’étend jusqu’à la nuit. Le pas des chevaux donne le rythme au bétail, qui avance dans le calme. Approximativement 1000 têtes sont conduites jusqu’au cattle yard. Le soleil disparait, mais nous sommes toujours là, dans la poussière virevoltante, le bétail s’agglutine dans le yard, les portes s’ouvrent, se ferment, ça beugle - fort, très fort d’ailleurs.

Les cow-boys pas peu fiers de cette première journée, s’assoient sur les barrières de l’enclos et regardent le bétail. L’ambiance est indescriptible, les couleurs orangées puis rouges - signe indicateur d’une chaude journée le lendemain. Sur les collines, la poussière qui vole au vent créant une sorte de brouillard coloré. Ils jaugent les bulls, car au fond c’est çà qui les intéresse, se confronter aux mâles en pleine puissance !

Ce soir, nous dormirons dans nos lits. Demain s’annonce être une journée aussi trépidante.

Daylight, one more time ! Les boys sont observateurs, nous sommes là, nous les novices, à faire attention à tous nos gestes, pour ne pas les décevoir, voire anéantir le travail que nous sommes en train de produire tous ensemble, comme une équipe. C’est le mot, comme une équipe qui petit à petit se forme.

Si le travail de mustering est intense, stressant ou encore long, le travail dans le yard est une autre paire de manches. Je m’explique. As-tu déjà vu des spectacles de rodéo ou des choses dans le genre ? Lorsque tu es béotien comme moi, ce job y ressemble à s’y méprendre, mis à part le fait bien sûr que tu montes pas sur les bêtes.

Je vais te passer ici les détails, sache simplement que pour « processer » l’intégralité de ce premier troupeau - oui je ne te le cache pas plus longtemps, il y en aura d’autres... - nous avons travailler 5 jours d’arrache pieds, sans répit !

Alors « processer », c’est quoi ?
Imagine un immense yard, découpé en plusieurs sous-yards, un immense couloir permettant d’un côté de faire entrer le bétail vers un « sas » de triage, une sorte de grand rond comportant plusieurs portes.

Tu vas vite comprendre, c’est assez simple. Depuis les sous-yards, et notamment celui d’attente, tu fais transiter le troupeau dans l’immense couloir conduisant au centre de triage. Inutile de de te préciser que ce triage s’effectue bête par bête... tu commences à comprendre... c’est long, fastidieux et tu dois travailler dans une cadence soutenue.

Des cow-boys poussent le bétail dans l’immense couloir, vers la première porte de triage. Chaque bête est ensuite orientée vers un autre yard au moyen d’une autre porte, qui elle va être comme toutes les autres, ouverte et fermée manuellement. Je crois que je commence à te perdre ! Les bulls à castrer, les bêtes à marquer, celles à vendre ou encore les nourricières sont ainsi parquées dans des yards différents.

Cow Boy Kimberley

Je suis en charge de la porte des « Sale », les bêtes qui sont destinées à être vendues tout de suite ! Inutile de te dire que nous avons la pression, car tout va vite, très vite, et chaque mauvaise orientation coute de l’argent à Roderick, le propriétaire. Ce que nous faisons, c’est un peu comme la récole une fois par an.

La tension est palpable chez chacun d’entre nous. Ouvrir, fermer, faire attention de ne pas prendre une ruade, activer le bétail qui ne veut pas avancer... éviter les cornes qui te frôlent à chaque fois que tu ouvres cette maudite porte, et surtout, surtout faire attention qu’une de ces traitresses ne viennent te charger alors que tu es de dos.

C’est intense. 5 jours plus tard, l’équipe est soudée plus que jamais. Nous avons tous fait nos preuves, nous marchons comme un seul homme. Et alors que j’imaginais en avoir terminé avec ce travail, Roderick et les boys m’annoncent que nous allons remettre çà dans quelques jours. Ce ne sera pas la même chanson, car oui, cette fois-ci c’est le grand ramdam, 5 jours dans l’outback en autonomie.

Quand tu y penses, c’est juste fou ! Imagine, la scène. 15 personnes, une dizaine de chevaux, 2 camions de matériel, 2 bulls catchers, un ute, un trailer... c’est une petite ville qui se déplace ainsi !

Rien n’est au hasard, afin de ne pas perdre de temps, ce temps si précieux. Nous devons pallier à toute éventualité. Nourriture, matériel, premiers secours pour les humains et les chevaux, swags, tentes, réservoirs d’eau... j’en passe, impossible d’être exhaustif. La tension remonte d’un cran, l’excitation pour ma part, car je suis encore loin d’imaginer ce que l’on va vivre une fois de plus.

Une semaine plus tard, nous avons consolidés le vieux yard à plus d’1h30 de route en voiture depuis la maison, achevé de préparer le matériel, le deuxième round peut commencer.

L'aventure se termine la semaine prochaine. En attendant vous pouvez retrouver Sam sur instagram et Facebook

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