A l'approche de la Fête de la musique, ce samedi 21 juin, lepetitjournal.com/pekin vous propose cette semaine d'aller chaque jour à la rencontre d'un musicien ou d'un groupe, chinois ou français, connu ou moins connu. Après 冬子 Dongzi et Byga, voici le jeune groupe néo-international 浮沙 Fu Sha.
Avec une moyenne d'âge de 23 ans et des visages encore juvéniles, on pourrait voir dans les 4 membres de Fu Sha le reflet d'un groupe adolescent. Ce serait ignorer la démarche artistique pleine de maturité de son leader éponyme, et la conception responsable de la musique par un groupe qui n'a pas choisi la facilité. Quand l'accordéon rencontre le chant de la minorité Dongzu, le cocktail, nimbé de guitare et de percussions camerounaises, est tout sauf banal.
Au départ, Fu Sha est d'abord l'histoire d'une amitié. Quand le leader arrive à Pékin il y a deux ans après des études à l'académie des arts du Hunan, il décide, pour pouvoir interpréter les chansons qu'il écrit et compose, de constituer un groupe avec Gu Yu, son ami du lycée, guitariste. C'est ce dernier qui trouvera l'accordéoniste Lin Yun, comme eux originaire du Guizhou. C'est lui aussi qui rencontrera le percussionniste camerounais Willy Eyango il y a quelque 2 mois, faisant de ce groupe un quatuor international de folk expérimental aux accents world. "Avant l'arrivée de Willy, nous n'étions pas complets, il y avait un manque, explique Gu Yu. Mais Willy, ce n'est pas seulement une personne ou un instrument en plus, il vient aussi avec une compréhension musicale et culturelle différente." La symbiose musicale prend.
Le déclic
Il faut d'ailleurs ici faire une digression sur le parcours atypique de Willy Eyango. Aujourd'hui inscrit à Pékin dans des cours de chinois, il ne s'est jamais vraiment rêvé comme musicien. Il explique, parfois en chinois dans le texte, qu'il se destinait plutôt, avec le soutien de ses parents, à être footballeur. La musique, c'était plutôt un hobby, mais aujourd'hui, l'expérience aidant, il se verrait bien approfondir l'aventure.
L'accordéon
"Créations", le terme a aussi son importance, car avec les morceaux de Fu Sha, le public n'entendra pas une simple restitution de chants folkloriques dans leur version originale. Comment cela pourrait-il l'être avec les percussions de Willy Eyango ou l'accordéon de Lin Yun ? Pour ce dernier d'ailleurs, ne pas y voir d'influence française : le piano à bretelles est un vestige de l'amitié avec la Russie. "Quand j'étais petit, l'instrument était très populaire, il apparaissait toujours dans les vieux films russes. Moi, vers 3 ans et demi, je n'étais pas bon pour le dessin, ni pour apprendre les caractères. Mais un jour, un professeur de musique est venu avec une voiture pleine d'accordéons pour ses élèves. Ma mère a réussi à s'en emparer d'un pour moi. Et ça m'a plu."
Devoir et modestie
On devine déjà ici la conception qu'a le groupe de place de la musique dans la société, à savoir "un moyen de diffusion de culture ou d'informations à travers l'émotion" pour Fu Sha, "un moyen de changer les mentalités" pour Willy Eyango. C'est une responsabilité qu'ils endossent en toute modestie, refusant en choeur de se qualifier de 音乐家 yinyue jia, musicien, pour préférer celui de 音乐人 yinyue ren, musicien aussi, mais sans la connotation artistique. C'est un devoir qu'ils se feront un plaisir d'exercer pour la Fête de la musique, même si encore une fois, les parents de Fu Sha ne seront pas là, refusant de le voir exercer cette profession. Justement, pour Willy Eyango, la Fête est là pour partager leur musique avec d'autres personnes qui peut-être, ne la comprennent pas. "C'est pour ça que tu dois te donner à fond". On vous aura prévenu, Fu Sha est en mission, prêt à vous piéger dans leurs Fu Sha (sables mouvants).
Joseph Chun Bancaud (lepetitjournal.com/pekin) Mercredi 18 juin 2014
Pratique.
Fu Sha jouera le samedi 21 juin au 2Kolegas, vers 14h.
Le site de la Fête de la musique à Pékin
Précédemment dans notre série Fête de la musique :