On l’avait pourtant répété à cor et à cri au point que cela devienne une expression toute faite, un concept balise incontournable pour qui évolue dans la sphère politico-médiatique. Et pourtant les manifestations contre le racisme menées par les indigénistes de ces derniers jours sont tout droit calquées sur celles qui ont eu lieu aux Etats-Unis. Dans la bouche des manifestants, tout se passe comme si la France avait une part de responsabilité dans le meurtre de Georges Floyd.
En réalité, comparaison n’est pas raison. Et la réaction mimétique à la fois dans les gestes et dans les slogans des manifestants en France est totalement décalée voire aberrante : les États-Unis ne sont pas la France. Exploiter les images du meurtre de Georges Floyd pour dénoncer des violences et un racisme policiers qui seraient systémiques en France, c’est nier à la fois toute la spécificité culturelle et toute la singularité historique de ces deux pays.
La fracture que vit la société américaine aujourd’hui est l’héritage d’une histoire difficile et douloureuse dont les étapes ont progressivement permis l’accès aux droits civiques pour tous les Américains. À ce titre, l’élection de Barack Obama à la présidence des États- Unis en 2008 a été perçue comme un symbole très fort, mais en réalité de nombreuses tensions raciales persistent.
Comment peut-on comparer la France et les États-Unis qui sont, certes, deux grandes démocraties occidentales, mais qui ont une histoire et une culture très différentes et qui sont séparées par ce que l’on a coutume d’appeler la « Big Pond » ? Comment, à l’occasion du drame de la mort de Georges Floyd, peut-on oser faire croire qu’il existerait une responsabilité partagée des États-Unis, de la France et du monde occidental en général ? La confusion est grotesque et d’autant plus dangereuse qu’elle est certainement voulue et entretenue.
Il est indispensable de remarquer que le danger auquel font face les forces de l’ordre américaines n’est pas de la même intensité qu’en France du fait notamment du port d’arme généralisé aux États-Unis et d’une violence récurrente qui exacerbe les tensions. Ainsi, en juillet 2016, lors d’une manifestation contre les violences policières à Dallas, un tireur isolé tue 5 policiers et en blesse 6 autres simplement parce qu’ils portent l’uniforme ! Si ces considérations n’excusent en rien les violences policières qui peuvent occasionnellement avoir lieu aux États-Unis, cela illustre à quel point la violence des arrestations et des accrochages avec la police américaine n’est en rien comparable à celle qui existe en France.
La structure policière n’est pas la même étant donné qu’il existe plusieurs polices en fonction des États et des villes (Police de la ville, de l’État, portuaire…). La seule police administrée au niveau fédéral aux États-Unis est le FBI (Federal Bureau of Investigation) contrairement à la France où la police est administrée au niveau national. L’accusation de violences et de racisme systémique au sein de la police nationale, émanation de l’État, c’est donc accuser l’État français de ces mêmes violences.
Pour toutes ces raisons et malgré l’absence d’analyse de la plupart des médias, il est clair que les manifestations des dernières semaines sont le fruit d’un opportunisme politique grossier auquel se laissent prendre des esprits certainement pétris de bonnes intentions mais aussi d’une très grande naïveté. Que ces personnes se souviennent qu’ils ont acclamé la police en 2015 après les attentats qui ont frappé la France, qu’ils se souviennent du sacrifice du Colonel Arnaud Beltrame, qu’ils se souviennent que nos forces de l’ordre sont capables d’héroïsme et qu’elles sont notre dernier rempart contre la barbarie au prix de plus de 20 000 blessés par an. Pour toutes ces raisons, je soutiens notre police nationale et nos forces de l’ordre, et je dénonce tout amalgame ou toute comparaison !
Damien Regnard est Sénateur des Français de l’étranger et vit depuis 24 ans aux États-Unis.