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Face au fléau des algues sargasses, un couple français déploie un océan d’ingéniosité

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Le système The Ocean Cleaner, en action. Crédits : The Ocean Cleaner
Écrit par Capucine Taconet
Publié le 3 avril 2023, mis à jour le 5 juin 2023

Amoureux du grand large, Denis et Christine Jimenez ont consacré une grande partie de leur vie à la navigation. En arrivant au Mexique en 2015, le couple français découvre les invasions d’algues sargasses qui défigurent la côte. Denis met alors au point un système innovant pour arrêter la prolifération désastreuse de goémon : The Ocean Cleaner.  

 

Inconnus à leur arrivée au Mexique en 2015, Denis et Christine Jimenez ont rapidement su se faire un nom auprès des locaux. Alors que les accumulations de sargasses désespèrent les acteurs du tourisme, Denis conçoit un bateau capable d’endiguer ce fléau, le Sargaboat. Une invention révolutionnaire que nous présentent Christine et Denis. 

 

denis et christine jimenez marchent sur une plage de sargasses
Denis et Christine Jimenez au Mexique, sur une plage envahie par les sargasses. Crédits : Al Jazeera America

Quand avez-vous pris conscience du problème des algues sargasses ?

Denis : À notre arrivée au Bélize puis au Mexique en 2015, la mer n’était pas aussi jolie que nous nous y attendions. La faute à une invasion d’algues sur les plages. Les locaux nous ont dit que c’était ponctuel, mais avec notre expérience de la mer, nous avons tout de suite compris les dégâts que cela allait engendrer dans le futur. Le plus frappant, c’était de voir des personnes en voyage de noces, en train de se prendre en photo devant des plages envahies par les algues. 

 

Christine : Le problème des sargasses, c’est que lorsqu’elles s’échouent sur une plage, elles continuent à pomper l’oxygène de l’eau et bloquent la lumière pour les fonds marins. Elles mettent trois jours à entrer en décomposition, et lorsqu’elles meurent, elles tuent les coraux en coulant. 

 

Denis : Les dégâts sont considérables, d’un point de vue environnemental, mais aussi économique et sanitaire. Les pêcheurs ne peuvent plus pécher parce que les déchets s’agglutinent aux goémons et se décomposent ensemble. Les touristes ne viennent plus sur les plages à cause de l’odeur d'œuf pourri que dégage la décomposition des sargasses. Et des tests menés dans les Antilles ont montré que celle-ci provoque également des problèmes respiratoires chez les femmes enceintes. 

 

bateau qui ramasse les algues sargasses
Le Sargaboat nettoie la côte mexicaine. Crédits : The Ocean Cleaner

Quel a été votre déclic pour agir, dans un pays où vous êtes étrangers ?

Christine : Je suis tombée sur un article de presse dans lequel les locaux se disaient impuissants face au phénomène. Or, le problème ne concerne pas uniquement le Mexique, mais nombre d’autres pays où la chaleur du Gulf Stream fait proliférer les algues. Nous nous sommes mis à réfléchir à une solution globale pour freiner le phénomène, en nous appuyant sur notre expérience.

 

Denis : Les moyens employés jusque-là n’étaient pas satisfaisants car en enlevant les algues avec des machines, on entraîne immédiatement l’érosion des plages. D’abord, nous avons convaincu les locaux d’installer de petites barrières pour arrêter les algues avant qu’elles ne s’échouent sur la côte. Puis, nous avons eu l’idée d’un bateau pour ramasser les sargasses. Il nous a fallu deux mois pour construire notre prototype. Le bateau Sargaboat est conçu sur une base de catamaran, avec un tapis roulant qui récupère les algues, et les dépose sur la remorque. Celle-ci est ensuite déchargée, et une nouvelle, vide, la remplace. 
 

Quelle est votre plus grande récompense depuis que The Ocean Cleaner est né ?

Denis : Nous sommes très fiers de voir l’efficacité de notre système. Auparavant, un des hôteliers que nous aidions employait 160 personnes pour nettoyer sa plage tous les matins. Aujourd’hui, il n’a plus besoin que de six personnes. Avec les barrières et le bateau, nous arrêtons 95% des algues. Cela fonctionne aussi pour le plastique. Les hôteliers, comme les clients, revivent : ils peuvent retourner sur les plages. 

 

Christine : Nous sommes très attachés à la mer et c’est une fierté personnelle de pouvoir la protéger. Nous avons traversé l’océan Atlantique à deux reprises en famille, et c’est grâce à notre expérience de navigation que nous avons pu créer le Sargaboat. 

 

Êtes-vous optimistes quant à la préservation de l’océan dans le futur ?

Christine : Je suis plutôt optimiste, à condition de continuer les bonnes pratiques. Si le sujet des algues a été étouffé dans un premier temps, les pays commencent à se réunir et à partager leurs informations. Nous sommes très contents d’avoir aidé à cette prise de conscience. 

 

Denis : Le défi principal à présent, est de trouver une manière de recycler les sargasses. Nous n’avons pas encore trouvé de solution miracle. Cela demande un investissement conséquent pour les gouvernements, et tous ne sont pas prêts à le faire. 

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