“I have a lodge in Zambia” et non, ceci n’est pas une (mauvaise) parodie de la voix susurrante de Meryl Streep / Karen Bilxen dans “Out of Africa” mais pourrait bien être l’adage de Jayesh Taylor, un homme d’affaires anglais d’origine kenyane, personnage haut en couleurs et tellement attachant !
Sur un coup de cœur, en 2004, il choisit d’investir une bonne partie de son argent – et de son temps - auprès d’une communauté zambienne : celle de Siankaba Islands. La communauté se situe à une cinquantaine de kilomètres de Livingstone et des Chutes Victoria : un village composé d’environ 150 âmes, d’une église que se partagent plusieurs cultes, un lodge sur une petite île et sur pilotis surplombant le Zambèze, une crèche avec trois classes…
Laissez-vous bercer par le murmure de l’eau, faites connaissance avec Siankaba, sa population, son lodge niché sur une île du mythique fleuve Zambèze et laissez le charme opérer…
C’est ce que nous avons fait le temps d’un week-end légèrement prolongé juste après Pâques. Partis de Johannesburg dans la matinée un vendredi, nous atterrissons à Livingstone rejoints par notre ami anglais Jayesh Taylor, arrivé de Londres spécialement pour nous faire découvrir SON lieu de prédilection.
A peine descendus de l’avion, nous grimpons dans le minibus conduits par Christopher. Au seul croisement de la ville qui comporte un feu rouge (!), on tourne à droite et on file droit au travers de la plus petite réserve de Zambie, « Mosi Oa Tunya » qui abrite les fameuses Chutes !
Tout au long de la route, nous gardons les yeux rivés sur cette nouvelle partie de l’Afrique que nous explorons pour la 1ère fois… Un peu déstabilisés par l’absence quasi totale de panneaux de direction (du moins officiels) et par les chemins en terre difficilement praticables, nous arrivons en une petite heure à notre lieu de destination : Siankaba.
Accueillis par la gracieuse Eunice, à la réception, nous pensions être arrivés, mais non, pas encore… ils savent ménager le suspense ! Nous voici désormais à bord d’un bateau à moteur en vogue sur un petit canal du Zambèze. Au détour d’un buisson, devant nous, le Zambèze, majestueux, énorme et chahutant ! A son flanc, l'île la plus importante de Siankaba où se logent de jolis chalets au milieu des arbres.
Nous débarquons sur la terre ferme, accueillis cette fois par le reste de l’équipe dont Ryan, qui assure la relation client et la promotion du lodge. Quel choc ! Une salle commune pour accueillir les convives, un boma, une piscine, vue imprenable sur le Zambèze, une décoration raffinée, mélange d’Afrique et de « British » : fauteuils clubs, statuettes africaines, tables sculptées en bois, bar fort bien achalandé en whisky, of course !
Il est désormais temps de partir à la découverte – plutôt à l’exploration – du lodge. Ponts suspendus et chemins en bois sur pilotis mènent les espaces communs vers les sept chambres qui sont en fait des tentes sur pilotis avec des vues imprenables sur le fleuve. Elles se fondent dans la forêt indigène assurant à chacun une parfaite intimité et le sentiment d’être en totale communion avec le fleuve… le roulis de l’eau sans le mal de mer !!!
Vers 17 heures, départ pour le « sunset boat cruise » : le capitaine Brighton, seul maître à bord, a pris le soin de faire des provisions pour tous les goûts : boissons alcoolisées ou non, cannes à pêche, petits canapés, table pliante... il surfe littéralement malgré le courant, incroyablement fort cette année, et nous mène d'île en île. Quand le niveau de l’eau le permet, ce qui n’était pas le cas, il peut même débarquer les apprentis pêcheurs sur une île au sable blanc pour taquiner le tigerfish ou le poisson chat… Au détour d’un îlot, nous rencontrons des hippos, des aigles et même des crocos. Capitaine Brighton nous assure qu’il voit parfois des félins (lions et léopards) de l’autre côté de la rive ! Le plus jeune d’entre nous s’essaie à la pêche pour la première fois et … y prend tellement goût que ce sera désormais son activité favorite sur place, qu’il renouvellera matin et soir sous l’œil amusé et bienveillant du Capitaine jusqu’à la prise d’un joli tigerfish lors de la dernière pêche ! Évidemment, ce poisson a été rendu au fleuve !
Retour et apéritif autour du feu, dîner fort bien cuisiné par les deux chefs qui instillent entre eux une saine et stimulante compétition : un régal pour nos papilles ! Je n’aurais jamais imaginé dîner aussi bien dans un endroit aussi reculé !
Le lendemain, pour rejoindre la terre ferme, encore un nouveau moyen de locomotion : le Mokoro. Cette barque traditionnelle en bois est toujours utilisée par les habitants des villages alentours pour se déplacer. Pour nous, européens, mieux vaut nous asseoir mais nos guides restent debout et tiennent le cap !
Nous voici partis en direction de Livingstone où nous rencontrons trois adolescents Peter, Elijah et Kebbie et la maman de deux d’entre eux, qui sont nés au village et que Jayesh et sa compagne Sarah accompagnent et soutiennent notamment dans la poursuite de leurs études. Ils viennent visiter les chutes Victoria avec nous ! Cool !
Vous le savez bien sûr ! C’est aux Chutes Victoria que la terre se divise et engloutit le Zambèze. Lorsque l’eau heurte les profondeurs, un nuage de brume s’élance vers le ciel, qui se voit jusqu’à plus de 30 km à la ronde, donnant aux chutes leur nom local « Mosi Oa Tunya » (la fumée qui gronde). Inscrites au patrimoine mondial de l’UNESCO, les Chutes Victoria forment une frontière naturelle entre le Zimbabwe et la Zambie.
Les chutes peuvent être observées depuis l’un ou l’autre des deux pays et bien que la plupart des activités se situent côté Zimbabwe (depuis la petite ville de Vic Falls la biennommée), impossible d’ignorer le côté zambien qui permet d’être exceptionnellement proche des cascades. Notre petit groupe de huit a le cœur qui bat à l’unisson pendant la traversée du pont Knife Edge qui permet de rejoindre le bouillonnement, un bain à remous situé aux pieds des Chutes… nous nous contenterons de l’entendre gronder car la quantité d’eau est tellement importante que, déjà sur le pont, nous avons le sentiment d’être au milieu du Lochness à la poursuite du monstre …. Quelle aventure ! Quelle force ! Quel bruit ! Nous en ressortons tous grisés, totalement trempés et … conquis par la fulgurance de Dame Nature !!!
Après un déjeuner bien mérité à Livingstone avec tout le monde, les garçons rentrent chez eux et nous traversons la frontière pour avoir le point de vue du Zimbabwe sur les chutes ! Très beaux panoramas, on a plus de recul sur les chutes, les arcs en ciel en nombre sont magiques ! C’est moins sauvage qu’en Zambie, plus aménagé ! N’hésitez plus entre les deux pays, faites les deux !
De retour au lodge dans l’après-midi, nous apprécions sa quiétude… le dimanche sera plus calme, déjeuner très chic à l’Elephant Café, toujours au bord du Zambèze où nous pouvons approcher de très près des éléphants qui étaient maltraités dans leur région d’origine, et qui ont été recueillis et soignés sur place. Ce n’est pas du tout un zoo, plutôt un refuge… Les éléphants qui le veulent, et seulement ceux-ci, viennent rencontrer les touristes qui y déjeunent : pas de show, pas de pattes levées…
Notre séjour se poursuit tranquillement au lodge, paisible et romantique au bord de l’eau, à l’écart du tumulte des chutes et loin de la foule…
Avant notre départ lundi midi, nous faisons une petite marche dans Siankaba Village où les personnes qui nous ont si bien accueillis et si bien reçus sont fières de nous montrer leurs maisons, leurs cultures de maïs et leur bétail, le ferronnier qui confectionne leurs outils agricoles et leur crèche qui compte trois classes, une très jolie cour, un coin cuisine où les mamans se relaient pour préparer à manger pour tous les enfants issus d’au moins quatre villages alentours ! Parce que ce lieu magique, ce n’est pas à Jayesh qu’il appartient en fait, ni à sa compagnie, mais bien à ses habitants ! A ce jour, 36 personnes de la communauté sont employées… Jayesh aime à dire qu’il se « contente » de mettre de l’huile dans les rouages pour former et accompagner les communautés de Siankaba Islands aux métiers de l’hospitalité : la gestion du lodge leur appartient et il met un point d’honneur à s’en mêler le moins possible…
Texte : Carole Sudrow
Photos : Carole Sudrow et Islands of Sankiaba Lodge