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PORTRAIT - Peter Magubane, photographe de l’apartheid

Rencontre avec Peter Magubane, un photojournaliste de l'apartheid. Récompensé par plusieurs prix de la photographie notamment le prix Robert Capa Gold Medal et le prix Erich Salomon, il a été le premier photographe noir sud africain à obtenir une récompense photographique en 1958

( Crédit Photo : Asmaa Botmi )

Lorsque nous arrivons au domicile de Peter Magubane, celui-ci ne manque pas de nous rappeler qu'il pensait que les Français étaient ponctuels, alors que nous arrivons 15 minutes en avance. Avant l'heure ce n'est pas l'heure, pour ce célèbre photographe de l'apartheid !

Un photographe passionné

A 78 ans, Peter Magubane est toujours aussi vif et passionné par la photographie. Aujourd'hui, ce qu'il capture avec son appareil photo, c'est la beauté de son pays, dit-il.  Terminées les horreurs de l'apartheid.  Ces photos de la domination des blancs sur les noirs, qui l'ont rendu célèbre, font partie de l'histoire, son histoire, son combat. « Grâce à la photographie, nous avons gagné le combat contre l'apartheid » dit-il.

Sa carrière de photographe a commencé en 1954 avec ses début au magazine Drum. Il y fait ses premiers reportages en 1955. « Quand j'ai commencé à Drum, raconte-t-il, je n'avais pas de weekends, je travaillais tout le temps. Je prenais mon appareil photo et j'allais photographier les gens dans la rue. Ça c'était l'adrénaline que j'avais à l'époque ».  Cette adrénaline lui a permis de toujours être au bon endroit au bon moment. Il a ainsi capturé les événements de Sharpeville en 1960, le procès de Nelson Mandela en 1964 ou encore les révoltes de Soweto en 1976.

L'histoire de l'Afrique du Sud illustrée par ses photos

Ces émeutes du 16 juin 1976 ont été le tournant qui a mis fin à l'apartheid selon lui. « Notre démocratie est née des révoltes du 16 juin, quand les responsables du gouvernement se sont rendus pour la première fois dans les townships pour voir pourquoi les populations noires étaient en colère. Pieter Willem Botha (NDLR à l'époque chef des armées, il sera élu président de la République d'Afrique du Sud en 1984) et sa femme sont venus à Soweto. Le 16 juin a poussé  le gouvernement à négocier avec ceux qu'ils appelaient des terroristes » raconte-t-il.

Le titre de « terroriste », il l'a aussi porté en tant que photojournaliste. En 1969, Peter Magubane est envoyé pour photographier une manifestation devant la cellule de Winnie Mandela. Il est arrêté, interrogé et mis en cellule d'isolement. « Quand j'ai été arrêté, j'avais plus peur de perdre mes photos que d'avoir le nez cassé. On m'a tiré dessus 17 fois en dessous de la taille. Je n'avais plus de prendre de photos » se souvient-il. Les charges contre lui furent abandonnées en 1970, mais Mugabane a été interdit de photographier pendant cinq ans. En 1971, il fut à nouveau emprisonné pendant plus de neuf mois.

Peter Magubane a abandonné le photojournalisme et se consacre aujourd'hui à la photographie d'art. Il se concentre sur des documentaires relatifs aux coutumes ancestrales dans l'Afrique du sud de l'après-apartheid.

Asmaa Botmi - (www.lepetitjournal.com/johannesbourg.html) - mercredi 29 septembre 2010

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Publié le 29 septembre 2010, mis à jour le 8 octobre 2023
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