La Haute Cour de Hong Kong a statué que le manque de moyens alternatifs pour la reconnaissance des unions de même sexe par le gouvernement était une violation du droit constitutionnel à la vie privée. Cette décision historique marque un tournant dans la région en approuvant partiellement la demande pour la reconnaissance des mariages homosexuels célébrés à l'étranger, invitant ainsi à la création d'un cadre juridique alternatif pour légitimer les besoins sociaux fondamentaux des couples de même sexe.
Une longue bataille juridique
Cette décision, qui intervient à l'issue d'une bataille juridique de cinq ans menée par l'activiste démocrate et pour les droits LGBTQ Jimmy Sham, marque la première fois que la Cour de Dernière Instance de Hong Kong se prononce directement sur la question du mariage homosexuel. Jimmy Sham, qui s'était marié à New York en 2013, avait initié cette démarche en 2018, cherchant à faire reconnaître son mariage à Hong Kong, mais avait subi des revers auprès des juridictions inférieures.
La Cour, composée du Chef de la Justice Andrew Cheung, des juges permanents Roberto Ribeiro, Joseph Fok, Johnson Lam, et du juge non permanent Patrick Keane, a indiqué que les libertés matrimoniales stipulées dans la Loi Fondamentale de Hong Kong (constitution de facto de la Région Administrative Spéciale) étaient réservées aux mariages entre sexes opposés. Toutefois, les juges ont souligné le besoin vital pour les couples de même sexe d'avoir accès à une structure juridique alternative qui répondrait à leurs exigences sociales fondamentales, éliminant ainsi toute notion d'infériorité ou de non-reconnaissance de leurs relations stables et engagées.
Une étape majeure vers la reconnaissance
Par cette décision de justice, les autorités législatives sont priées d'élaborer un cadre officiel pour la reconnaissance des unions entre personnes de même sexe, une tâche qu'elles doivent accomplir dans un délai de deux ans selon ce jugement.
La communauté LGBTQ de Hong Kong accueille ce développement avec optimisme, y voyant un espoir dans leur quête d'égalité et de justice. Les experts en droit et les activistes LGBTQ anticipent que ce jugement pourrait inciter le gouvernement et les institutions de la ville à apporter des modifications notables, conduisant à l'établissement d'un nouveau régime juridique. Un tel régime faciliterait les procédures d'héritage, offrirait des options d'assurance plus fluides, et favoriserait l'obtention d'allocations, entre autres.
Pour donner suite à cette décision, les juges ont suspendu la déclaration stipulant que l'absence d'un cadre juridique alternatif par le gouvernement avait violé les droits de Jimmy Sham, accordant un délai de deux ans au gouvernement pour présenter de nouvelles propositions. A ce stade, le militant aujourd'hui emprisonné dans le cadre de la Loi de Sécurité Nationale n'a pas obtenu gain de cause mais le ton est donné pour que le gouvernement produise un cadre juridique adapté à la large reconnaissance des unions de même sexe.
Le précédent de Taiwan
Esther Leung, responsable de campagne du groupe Égalité de Mariage à Hong Kong, a déclaré que bien que cette décision représente un "pas majeur en avant", elle ne satisfait pas pleinement l'enjeu principal du dossier, à savoir une "inclusion complète dans le mariage". Il est à noter que Jimmy Sham est l'un des 47 démocrates accusés en vertu de la loi sur la sécurité nationale imposée par Pékin, en rapport avec une élection primaire non officielle tenue en 2020, et est détenu depuis mars 2021.
L’affaire semble en effet similaire à celle de la Cour Suprême taiwanaise qui le 24 mai 2017 avait jugé contraire à la constitution l'impossibilité pour les couples de même sexe de se doter d'une protection légale de même nature que les couples hétérosexuels, et qui donna deux ans à celle-ci pour légiférer l'extension des droits de ces derniers aux couples homosexuels. Passé ce délai, soit le 24 mai 2019, et en l'absence de nouvelle législation, la légalisation devenait de facto effective. Le 17 mai 2019, avant la fin du délai fixé par la Cour Suprême, le Parlement taïwanais a voté le projet de loi le plus favorable au mariage homosexuel, et le premier d’Asie.
Reste à savoir si Hong Kong suivra la même direction.