Lutter activement contre la pauvreté, c’est possible ? Quoi qu’il en soit, c’est ce à quoi aspire l’entrepreneur social Bernard Kervyn lorsqu’il s’installe au Vietnam et fonde Mékong Quilts et Mékong Plus.
Le 12 avril 2022, Oxfam International – une confédération d’organisations caritatives – publie un rapport alarmant sur le taux de pauvreté auquel s’attendre d’ici la fin de l’année 2022. En se fondant sur des recherches de la Banque mondiale, elle estime que 860 millions de personnes dans le monde pourraient se trouver dans un cas d’extrême pauvreté, c’est-à-dire vivant avec moins de 1,90 dollars par jour.
En développant son ONG Mekong Plus, le Brugeois Bernard Kervyn souhaite alors à éliminer cette pauvreté croissante. Pour se faire, il rejoint le Vietnam et étend aujourd’hui ce projet au-delà même des frontières du pays.
Le Petit Journal l’a rencontré et a souhaité en apprendre plus sur cette organisation et son fondateur.
Si vous avez manqué les deux premiers invités de la série d'interviews d'entrepreneurs au Vietnam, retrouvez l'interview de Jean-Luc Voisin et son aventure éco-responsable ainsi que Jean-Marc Brutus et ses glaces italiennes.
Interview de Bernard Kervyn au Vietnam
Le Petit Journal (LPJ) : Bernard Kervyn, pouvez-vous vous présenter et nous parler de ce que vous faisiez avant de lancer votre ONG. Qu'est-ce qui vous a amené au Vietnam ?
Bernard Kervyn : Je suis né à Bruges, en Belgique. Je suis diplômé de l'Université Catholique de Louvain (UCL) (Master of Business Administration), puis suis parti au Bangladesh où j'ai travaillé 9 ans pour des projets de développement. De retour en Europe, j'ai travaillé comme journaliste développement pour une ONG, avant de rejoindre GE-Medical Systems en tant que chef-produit. Mais j'ai un fort sentiment pour l'Asie et j'ai suivi ma femme au Vietnam en 1993.
LPJ : Pouvez-vous présenter votre ONG Mekong Plus lancée dans la région et nous en dire un peu plus sur vos projets récents ?
Bernard Kervyn : Mekong Plus se concentre sur l'élimination de la pauvreté. Nous considérons le facteur humain comme essentiel. Nous répondons à tous les besoins de base à condition que les villageois unissent leurs forces et participent intensément.
Aujourd'hui, nous travaillons dans près de 1000 villages au Vietnam et 50 au Cambodge. Microfinance, bourses, formation des enseignants, santé et hygiène, petites infrastructures, artisanat…
LPJ : Mekong Quilts fournit des couettes, des oreillers, des vêtements fabriqués au Vietnam par les minorités et les familles que vous aidez. D'où viennent ces produits au Vietnam ? Sont-ils faits à la main ?
Bernard Kervyn : Les produits Mekong Quilts proviennent tous des projets soutenus par Mekong Plus. Principalement dans le delta du Mékong et dans la province de Binh Thuận. Tous les produits sont fabriqués à la main et utilisent des matériaux disponibles localement. Outre le coton, nous utilisons de la jacinthe d'eau, du bambou, du papier usagé, etc.
LPJ : Vous venez d'ouvrir un magasin à HCM City, rue Pasteur. Quelles informations les visiteurs peuvent-ils obtenir dans votre nouveau magasin ?
Bernard Kervyn : Les vendeuses ont une longue expérience et ont toutes été dans les villages. Elles peuvent ainsi raconter l’histoire de chaque produit, l’importance des quilts pour les quilteuses et leurs enfants.
ONG Mekong Quilts et Mekong Plus au Vietnam
LPJ : D'où proviennent vos fonds ?
Bernard Kervyn : Mekong Plus est l’ONG mère de l’entreprise sociale Mekong Quilts. La recherche de fonds est notre souci permanent. Des fondations privées sont la source principale, mais aussi des dons individuels privés. Mekong Quilts organise des tours à vélo qui sont l’occasion de prendre l’air dans les villages, de mesurer l’impact des actions de développement et de Mekong Quilts pour les quilteuses. Chaque visiteur fait aussi un petit don pour soutenir les projets visités.
Nous travaillons aussi avec un certain nombre d’entreprises (BNP PARIBAS, Air Liquide, DIROX…) car c’est seulement ainsi que le travail d’une petite ONG peut rayonner.
LPJ : La transparence est importante dans une ONG. Comment contrôlez-vous ces chiffres et comment gérez-vous votre personnel pour vous assurer que tous les dons sont utilisés correctement ?
Bernard Kervyn : Mekong Plus a près de 200 personnes locales sur les projets, certaines à temps partiel. Surtout nous ne soutenons que les actions où les villageois sont fortement impliqués. Par exemple dans le delta du Mékong, nous aidons à la construction de ponts, mais les 2/3 des coûts sont couverts par les villageois eux-mêmes : ils ne permettent aucun gaspillage ! Enfin nos comptes sont audités et les rapports publiés intégralement sur notre site Internet.
LPJ : Vous proposez des circuits à vélo dans la campagne vietnamienne pour visiter les familles et les projets sur lesquels vous travaillez. Pouvez-vous nous en dire plus sur ces excursions ?
Bernard Kervyn : Tous nos projets sont dans des régions assez éloignées car c’est là que la pauvreté est la plus cruelle. Or nous tenons à témoigner : la pauvreté peut être éliminée ! Nous invitons les personnes intéressées à venir voir sur place. Les tours à vélo ont 3 dimensions : prendre l’air dans des campagnes magnifiques, auprès de villageois extrêmement chaleureux, en faisant un peu d’exercice – à vélo.
Mais la vitesse est décidée par chaque groupe : certains aiment le sport, d’autres prendre leur temps et des photos ! Secundo une dimension culturelle. Selon les lieux : visiter les villages Chams, un marché flottant ou les temples d’Angkor au Cambodge. Enfin bien sûr, la dimension développement : microcrédit, bourses scolaires, biogaz, recyclage des déchets, potagers bio, etc.
Nous proposons une demi-douzaine de circuits différents, tous disponibles dès qu’un groupe de 5 personnes est formé. Les enfants sont invités ! Nous avons eu des bébés (dans un porte-bébé) et des enfants de 5 et 7 ans qui souvent pédalaient plus vite que leurs parents. Le vélo, c’est vraiment une promenade.
Pour en savoir plus :
- Mekong Quilts : site internet
- Mekong Plus : site internet