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Industrie et durabilité : le Vietnam face au défi de l’ESG

Le Petit Journal s’est rendu au Green Industries Summit 2025, organisé par NordCham Vietnam, qui s’est tenu le 19 Juin dernier au Sofitel Saigon Plaza à Hô Chi Minh-Ville. Cet évènement a mis à l’honneur les secteurs de la fabrication, de la construction et des technologies climatiques, au cœur du processus de transition durable. L'événement a également exploré des thèmes comme l'économie circulaire, la construction verte ou encore la transmission des savoirs.

Industrie et durabilité : le Vietnam face au défi de l’ESGIndustrie et durabilité : le Vietnam face au défi de l’ESG
Écrit par Gaultier Mezergue
Publié le 24 juin 2025, mis à jour le 27 juin 2025

Face à la pression des marchés internationaux et à l’émergence d’une conscience écologique globale, le Vietnam est poussé à transformer ses infrastructures industrielles et logistiques. Mais entre ambitions environnementales, réalité économique et manque de régulation, la transition verte du secteur reste parfois difficile et est sujette à de nombreux obstacles. 

 

Une mutation industrielle à grande vitesse

Le Vietnam s’est imposé comme une puissance industrielle et logistique majeure en Asie du Sud-Est. Mais ce développement rapide soulève de nouveaux enjeux. Aujourd’hui, la plupart des multinationales (notamment dans le retail, la distribution ou l’agroalimentaire) imposent des critères stricts en matière d’environnement, de gouvernance et de responsabilité sociale (ESG) à leurs fournisseurs et partenaires commerciaux.

Pour des acteurs comme SLP (Sea Logistics Partners), qui développe des entrepôts de nouvelle génération dans le pays, cette mutation est désormais une réalité quotidienne. “Certains de nos clients nous demandent explicitement d’intégrer des panneaux solaires, des systèmes de ventilation naturelle ou encore des récupérateurs d’eau de pluie”, explique un représentant de l’entreprise. Ces exigences ne représentent plus des exceptions, mais au contraire, deviennent la norme dans les appels d’offres internationaux.

 

De réelles ambitions de durabilité mais freinées par les coûts 

Si la volonté de rendre plus “vertes” les infrastructures existe bel et bien et se répand toujours plus, elle se heurte encore à une réalité économique. Beaucoup d’entreprises vietnamiennes, notamment les petites et moyennes structures, reconnaissent l’importance de la durabilité, mais hésitent à en assumer les coûts. “Tout le monde veut du vert, mais personne ne veut le payer”. 

La construction de bâtiments certifiés ESG implique des investissements plus importants en matériaux, en technologie et en ingénierie. Or, ces surcoûts ne sont pas toujours compensés par les bénéfices à court terme, en particulier pour les acteurs locaux qui n’exportent pas encore à grande échelle.

 

Une régulation encore floue et peu incitative

Un autre frein important est l’absence de standards réglementaires clairs au niveau national. Les entreprises engagées dans des projets durables doivent souvent s’auto-réguler, ou bien recourir à des référentiels étrangers pour encadrer leurs ambitions en matière de durabilité. Cela crée un vide qui rend difficile l’harmonisation des pratiques.

Le Vietnam a bien adopté un plan d’action pour l’économie circulaire et plusieurs feuilles de route environnementales à horizon 2050. Mais dans la pratique, les incitations fiscales, les certifications locales ou les mécanismes de soutien technique restent pour le moment insuffisants.

De plus, la pénurie de main-d’œuvre qualifiée dans les domaines liés à la construction durable ralentit les projets. En effet, il manque encore des ingénieurs formés à l’éco-conception, des artisans capables de travailler avec des matériaux durables, ou des cadres familiarisés avec les audits ESG.

 

IKEA : un modèle de chaîne de valeur durable

À l’inverse, certaines entreprises montrent qu’une transition ambitieuse est possible, même dans un contexte émergent. C’est le cas d’IKEA, très actif au Vietnam depuis les années 1990. L’entreprise suédoise applique les mêmes standards ESG dans tous ses pays fournisseurs, sans faire de distinction selon l’implantation locale.

 

Usine de meubles et accessoires IKEA en bois, dans la Province de Tuyen Quang.
Usine de meubles et accessoires IKEA en bois, dans la Province de Tuyen Quang. (Photo : Cong Dat / VNP). 

 

Pour IKEA, la durabilité n’est pas un simple atout supplémentaire, mais elle représente un pilier de sa stratégie industrielle. Les représentants locaux du géant suédois expliquent que l’accompagnement de leurs fournisseurs se fait sur le long terme, avec des partenariats de plusieurs décennies. La relation est construite sur la confiance, la transparence, et une montée en compétences progressive.

On peut illustrer cette idée avec des exemples concrets : le passage du bois importé au bois de caoutchouc local, plus respectueux de l’environnement et plus compétitif,  ou encore l’amélioration des conditions de travail dans les ateliers domestiques des zones rurales, avec l’accès à l’eau potable, à la ventilation et à la sécurité de base.

Transmettre les savoir-faires

IKEA organise régulièrement des forums de rencontre entre fournisseurs vietnamiens, où les entreprises échangent leurs connaissances, mais aussi leurs erreurs (comme l’incendie d’une usine, par exemple). Un programme de “buddy suppliers” permet également aux fournisseurs expérimentés d’en parrainer de nouveaux, créant ainsi un terrain fertile à l’apprentissage sur le long terme.

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