Dans cette seconde partie d’interview, Rémy Gastambide, né au Vietnam en 1969, nous raconte l’histoire de la recherche de ses géniteurs. D’indices en indices, de tests en tests, il est parvenu à retrouver son père biologique, ancien soldat américain pendant la guerre du Vietnam. Toutefois, la recherche de sa mère se poursuit encore aujourd’hui.


5 - Comment se déroulent les recherches autour de vos parents ? Quelles méthodes utilisez-vous dans vos recherches (archives, tests ADN…) ? Faites-vous cela seul ou en vous entourant de tiers ?
Un des premiers indices qui m’a été révélé concernant mes parents l’a été un peu par hasard. Lors d’une demande de passeport à la préfecture de Reims, une employée m’a donné une copie de la première page de mon dossier d’adoption (que je ne possédais plus), sur laquelle figurait le nom et l’adresse de l'orphelinat où j’avais été pris en charge. Ce premier indice m’a même permis de retrouver certains des fondateurs de cet orphelinat avant leur décès.
Ensuite, après de nombreux voyages, j’ai décidé, à partir de 2016, de pousser plus loin mes recherches en réalisant plusieurs tests ADN qui m’ont permis, de fil en aiguille, de retrouver ce soldat américain, Stuart Foster, vivant à Natchez dans le Mississippi et qui s’avérait être mon père biologique. Cette rencontre s’est déroulée grâce à des parents éloignés de mon père qui s’étaient d’abord prêtés à des tests avec moi, révélant un ADN commun, et qui m’ont ensuite mis en contact avec sa famille proche afin que je puisse le rencontrer en personne.
6 - Comment s’est déroulée la rencontre avec votre père biologique ? Quel regard vous a-t-il apporté ? Qu’avez-vous ressenti ?
En 2021, la première fois que je me suis déplacé pour rencontrer mon père biologique, j’étais accompagné par une équipe de TF1 qui me suivait dans le cadre d’un reportage. J’ai bénéficié d’un accueil incroyable de la part de la famille de mon père, même si ce dernier faisait preuve d’une certaine réticence.
Bien que me prenant pour un escroc au départ, la première rencontre avec lui s’est surprenamment bien déroulée, ce qui a contribué à me rendre fier de ce premier accomplissement. Cependant, le seul indice qu’il possédait sur ma mère biologique était une photographie qu’il avait gardée, sans se rappeler ni du nom ni de l’âge de cette femme.

7 - Que vous apporte votre engagement dans ces recherches sur vos origines et votre passé ?
La première chose que m’ont apporté ces recherches est un moment extraordinaire passé avec cette famille que je découvrais. Cela représentait un véritable accomplissement pour moi de retrouver ce géniteur que je cherchais depuis mes 16 ans, c’était comme la récompense de nombreuses années de recherche.
Cette rencontre avec mon père m’a encouragé à pousser encore plus mes recherches du côté de ma mère, même si les indices manquent. Aujourd’hui, ma quête est celle de ma mère, ce qui passe par de nombreux séjours au Vietnam afin d’essayer de récolter des informations sur place.
Toutefois, nombre de ces voyages se sont soldés par des échecs, des refus auxquels j’ai dû faire face sur place, car les personnes à qui je m'adressais pouvaient avoir peur des conséquences, du “qu’en dira-t-on ?”...
8 - Avez-vous eu le sentiment de subir un regard différent en France du fait de vos origines et de votre statut d’enfant adopté ?
J’ai grandi et me suis construit avec l’idée que je ne connaîtrais peut-être jamais mes parents biologiques. Qui plus est, mes origines vietnamiennes ont créé de grandes blessures jusque dans ma famille adoptive, où l’on me refusait parfois de voir certaines de mes cousines, me considérant comme un danger.
Le fait d’être un enfant adopté s’accompagne aussi d’un besoin constant d’expliquer mon histoire autour de moi afin d’être accepté et compris. Il y a tout de même pour moi une certaine fierté à faire partie de cette histoire et à continuer à l’écrire par la recherche de mes parents.
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