Lundi 5 mai, le réseau naissant « La Tech Hambourg » organisait son premier événement au consulat général de France. Le groupe, composé d'acteurs de l'innovation français basés à Hambourg, a réuni une cinquantaine de personnes lors d'une soirée destinée à mettre en lien six start-up françaises invitées au festival OMR, avec des représentants du secteur de la tech franco-allemand à Hambourg. L'occasion pour ce réseau de la ville hanséatique, animé par des bénévoles, de tester un format de rencontres destiné à se pérenniser. Avec, en ligne de mire, une labellisation French Tech en 2026, et la structuration d'une véritable communauté promotrice de l'innovation franco-allemande, à l'image de celles déjà existantes à Berlin, Munich et Düsseldorf.


Il est dix-sept heures trente passées, et à l'intérieur du Consulat général de France à Hambourg, l'effervescence est palpable. Quelques minutes plus tard, les premiers invités pénètrent dans l'enceinte diplomatique. Rapidement, la salle des fêtes est remplie d'une bonne soixantaine de personnes. Elles semblent déjà toutes se connaître, et si l'on entend majoritairement du français, quelques moin sonores trahissent la présence de convives allemands.
L'initiateur de la soirée est un tout jeune réseau, La Tech Hambourg. Officiellement créé en avril 2025, il rassemble certains membres d'un groupe précédent qui organisaient tous les mois des réunions pour des entrepreneurs français ou francophiles à Hambourg. S'y sont ajoutées d'autres profils, notamment des cadres dans de grosses entreprises hambourgeoises, et des avocats et fiscalistes franco-allemands.
L'objectif ? Créer une Communauté French Tech à Hambourg, c'est-à-dire un réseau franco-allemand ancré localement, pour aider les start-up et entreprises de la tech françaises à venir s'implanter dans la ville portuaire. Cela passe notamment par l'obtention du label officiel French Tech Community, pour laquelle le groupe va candidater.
La French Tech, qu'est-ce que c'est ?
En 2013, Fleur Pellerin, la ministre déléguée chargée du Numérique, et Louis Gallois, le commissaire général pour l'investissement, lancent le label « French Tech ». L'objectif est de mobiliser acteurs privés et publics autour de la croissance et du rayonnement international des start-up françaises. A l'origine, le label vient récompenser les agglomérations qui agissent en ce sens, et sert de marque commune pour les entreprises françaises. En 2017, la French Tech se mue en véritable administration publique, et s'installe dans la Station F (plus grand incubateur du monde). Sa mission est de soutenir la structuration et la croissance de l'écosystème des start-up françaises, en France, et à l'international. A l'étranger, ce sont des bénévoles qui forment les Communautés French Tech. Ils sont chargés de fédérer les acteurs de l'innovation au niveau local, et de bâtir des initiatives pour la promotion de la French Tech au sein de leur territoire.
Pour son premier événement, La Tech Hambourg collabore avec Hambourg Invest, agence régionale dédiée à favoriser les investissements et l'installation d'entreprises dans la région d'Hambourg. A l'occasion de la venue les 6 et 7 mai du festival OMR (Online Marketing Rockstars), grande messe internationale du marketing digital, Hamburg Invest a invité six start-up françaises à exposer dans l'espace « Jeunes Innovateurs » du parc des expositions de la cité portuaire.
A la marge de ce festival, La Tech Hambourg et Hamburg Invest ont donc imaginé une rencontre franco-allemande au Consulat, lors de laquelle les start-up françaises ont pu pitcher leurs entreprises devant un parterre d'invités comprenant notamment des investisseurs allemands.

Egalement au programme de la soirée, une prise de parole de la consule générale de France, Valerie Luebken, mais aussi de Heike Tipmonta, représentante de Hamburg Invest, qui se définira comme une grande admiratrice de l'écosystème français des start-up, et enfin de Florence Gautrais, conseillère du commerce extérieur de la France.
"La coopération franco-allemande est essentielle", Valerie Luebken, consule générale de France à Hambourg
Pour Hamburg Invest, l'événement de ce lundi et l'invitation des entreprises innovantes françaises à l'OMR sont une manière de signaler la ville hanséatique comme un pôle d'attractivité pour les start-up internationales.
Car les membres de La Tech Hambourg, pour la plupart installés depuis plusieurs années voire plusieurs décennies dans la région, le disent : Hambourg est la grande oubliée des petites entreprises françaises bien qu'elle soit la deuxième ville allemande avec un très important tissu industriel. Celia Pégeot-Möller, présidente de La Tech Hambourg, le souligne : « L'écosystème d'Hambourg est moins connu que celui de Munich ou Berlin, mais la concentration de start-ups est déjà très élevée, avec une grande motivation des acteurs locaux de faire croître l'écosystème ». Du côté des start-up invitées, même son de cloche : la plupart connaissent mal la ville et son milieu innovant. Sans l'OMR, ils ne se seraient sans doute pas spontanément tournés vers Hambourg.
Pourtant, Hambourg ne manque pas d'atouts : deuxième ville d'Allemagne par sa population, c'est également le premier port du pays, et le troisième en Europe. « En termes d'industrie, c'est vraiment très développé, notamment dans tout ce qui est énergies renouvelables, hydrogène... Il y a aussi tout ce qui est aviation, maritime, transport logistique, mais aussi les médias, les industries créatives. Le gaming par exemple est très développé à Hambourg. Et aussi la fintech ! », énumère Celia Pégeot-Möller.

L'invitation adressée aux six start-up françaises vise à faire découvrir les atouts de la ville de Hambourg. « C'est pour leur donner envie, leur montrer le dynamisme, le type d'institutions, d'acteurs locaux, de réseaux de start-up, qu'on peut trouver à Hambourg », explique Celia Pégeot-Möller. Elle ajoute que, le label French Tech étant très connu des entreprises françaises, son obtention pourrait attirer de nouveaux innovateurs français en renforçant la crédibilité.
Mais au-delà d'Hambourg, c'est le dynamisme même de la coopération économique franco-allemande qui est en jeu. La première barrière mentionnée, c'est la langue. Manque d'intérêt pour l'apprentissage de la langue de l'autre, mauvais niveau des Français en anglais, attachement des Allemands à leur langue...Diverses explications sont évoquées, toujours est-il que pour Gary Abitan, cofondateur de la start-up Smile Wanted, c'est l'une des raisons qui rend l'accès au marché allemand particulièrement difficile. Ludovic Ciannarella, membre de La Tech Hambourg, et chef d'équipe des ventes DACH et Europe de l'Est chez Lemonway, souligne les nombreuses différences culturelles dans le travail. Les représentants des start-up Wonder People et Deep Reach, la dernière cherchant à s'implanter en Allemagne depuis deux ans, relèvent enfin la décentralisation des entreprises allemandes, qui ont des bureaux dans de nombreuses villes, ce qui rend difficile l'identification des bons interlocuteurs.
Autant d'obstacles que La Tech Hambourg et ses partenaires veulent écarter, en aiguillant, grâce à un solide réseau franco-allemand, les entrepreneurs français vers les bonnes personnes et institutions, et en se constituant en véritable point d'entrée vers le marché allemand. Derrière La Tech Hambourg, on trouve des Européens convaincus, qui ont vécu et travaillé dans plusieurs pays et connaissent bien les contraintes que cela peut poser, mais qui ont également éprouvé l'émulation intellectuelle propre au multiculturalisme. La coopération franco-allemande leur est chère, et plusieurs d'entre eux soulignent l'urgence d'une collaboration plus approfondie entre les deux pays, notamment face à l'instabilité du partenaire états-unien.
Un contexte géopolitique tendu dans lequel certains voient l'occasion de renforcer le partenariat franco-allemand, à l'image de Celia Pégeot-Möller, qui considère notre époque comme « un super moment pour continuer à construire ces ponts entre la France et l'Allemagne ».
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