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Philippe Jacq : « Le théâtre est un grand vecteur de culture »

Philippe Jacq théâtre Philippe Jacq théâtre
Philippe Jacq, Photo © Thomas Piechowski
Écrit par Emie Irion
Publié le 25 septembre 2020, mis à jour le 28 septembre 2020

Ses apparitions remarquées sur le petit écran et au théâtre en France et en Allemagne ne nous ont pas laissés indifférents. Réalisateur, acteur de séries télévisées, mais aussi de théâtre, Philippe Jacq est un artiste français complet. Il incarne le personnage d’Alexandre dans « Le Bonheur » de Eric Assous les 6 et 7 octobre 2020 à Wiesbaden et les 9 et 10 octobre 2020 à Francfort, une pièce qui traite de l’amour et du bonheur après 50 ans. Entretien.

 

Lepetitjournal.com/francfort : vous avez été acteur en France dans la série « Sous le soleil » et en Allemagne dans la série « Ein Fall fur zwei » ou encore « Tatort », des séries très médiatisées et connues du grand public, mais aussi acteur de théâtre, réalisateur… Comment vous définiriez-vous ?

Philippe Jacq : je me définis comme un professionnel du métier, par le fait de faire des mises en scène, de jouer d’un autre côté en tant que comédien au théâtre, au cinéma et à la télévision. Je crois que dans ce domaine, on est contraint de toucher à tout, surtout quand on crée soi-même sa propre structure. Je me définis comme un homme de théâtre, tout simplement.

 

Vous êtes né à Sisteron dans le sud de la France, vous vivez entre Paris, Berlin et Wiesbaden. Qu’est-ce qui vous a amené en Allemagne ?

J’ai fait un double parcours, j’ai fréquenté une école de théâtre à Paris, j’allais à New York faire des stages et parallèlement j’ai fait des études d’anglais.

J’ai eu un poste de lecteur à Leipzig et je me suis donc retrouvé à l’époque de la RDA à enseigner à l’université de Leipzig. Après la chute du mur de Berlin, je me suis installé à Wiesbaden suite à mon mariage car ma femme médecin y avait trouvé un poste. Je travaillais au théâtre anglophone à Wiesbaden et à Francfort, mais après notre divorce, je suis retourné m’installer à Paris. Puis j’ai recommencé à me rendre en Allemagne pour rencontrer des amis que je m’étais fait là-bas. Au fil des années mon allemand s’est amélioré, ce qui m’a permis de travailler en Allemagne.

Actuellement je vis à Paris et Wiesbaden, mais plus à Berlin. Il fut un temps où j’étais souvent à Berlin mais ça fait des années que ce n’est plus le cas. Je m’en suis détaché il y a une dizaine d’années et je crois que beaucoup de comédiens font le choix de revenir dans les provinces allemandes. 

 

Philippe Jacq interview théâtre
Philippe Jacq, Photo © Thomas Piechowski

 

J’ai rencontré Daniel Cohn-Bendit qui est comme moi un Européen convaincu, je lui ai parlé de ce projet, et il est maintenant parrain de « Das europäische Theater » à Wiesbaden.


Vous faites partie de l’équipe du théâtre européen « Das europäische Theater e.V. » qui regroupe des acteurs et metteurs en scène professionnels à Wiesbaden. Comment est né ce projet de théâtre ? Pouvez-vous nous en dire plus ?

Le théâtre « Das europäische Theater » est une association à but non lucratif basée à Francfort et fondée en 2019, mais c’est un projet qui à commencé à germer en 2015 environ. L’idée est venue avec l’ouverture des frontières en Allemagne, lorsque beaucoup de migrants, francophones pour la plupart, sont arrivés sur le territoire allemand. Ces gens-là n’ont pas une vie facile et on voulait leur proposer quelque chose pour leur faire passer un bon moment. Le projet est aussi né du fait que je passe mon temps entre Paris et l’Allemagne. Ma compagne qui est allemande évolue aussi dans le milieu artistique et on s’est rendu compte tous les deux qu’on pouvait faire ça. De plus, en Allemagne, les théâtres anglophones ne manquent pas mais il y a très peu de théâtres francophones, italiens, espagnols, etc.

J’ai rencontré Daniel Cohn-Bendit qui est comme moi un Européen convaincu, je lui ai parlé de ce projet, et il est maintenant parrain de « Das europäische Theater » à Wiesbaden.

Le cœur de « Das europäische Theater » est davantage francophone pour le moment, mais notre vocation est internationale. Notre objectif est de nous ouvrir à d’autres nationalités et de créer des coopérations avec d’autres troupes. D’ailleurs, notre équipe correspond à la vision de notre engagement européen. En effet, on compte une actrice anglaise, une actrice luxembourgeoise, un metteur en scène breton, un cameraman allemand, un décorateur japonais, une accessoiriste anglaise, une maquilleuse germano-américaine etc. Pour nous, être européen c’est un choix, ça n’a rien à voir avec la religion ou les origines ethniques.

 

L’objectif de « Das europäische Theater » est aussi d’être un miroir de ce que peut être la société européenne.

Nous sommes des Européens convaincus et je suis persuadé que l’Europe sera culturelle avant d’être politique. On a bien vu pendant la crise de la Covid-19 que les frontières ont été fermées et qu’au niveau politique il n’y avait pas d’Europe. L’idée européenne n’est pas encore bien ancrée dans les esprits.

L’objectif de « Das europäische Theater » est aussi d’être un miroir de ce que peut être la société européenne, un miroir de ce qu’est l’Europe au-delà de la pensée religieuse ou politique.


« Das europäische Theater » reçoit des subventions du « Hessisches Ministerium für Wissenschaft und Kunst », du service culturel de Wiesbaden, du « Amt für multikulturelle Angelegenheiten » de Francfort, fondé par Daniel Cohn-Bendit, et tout cela nous permet de payer les décors, les salles, les acteurs et proposer un théâtre de qualité, professionnel et pas amateur.

Pour le choix des pièces, on ne joue pas de pièce à thèse pour le moment, on préfère proposer des moments de divertissement, faire passer un bon moment aux spectateurs, en français par exemple comme pour la pièce de Eric Assous « Le Bonheur » que nous jouons bientôt.

Le théâtre européen de Wiesbaden se veut davantage culturel au sens de notre programmation. Nous nous attachons à jouer des pièces contemporaines, nous ne voulons pas être un théâtre de répertoire, c’est-à-dire qu’on ne fait pas de Feydeau ou de Molière par exemple. Même si nous sommes des Européens convaincus, nous restons apolitiques, on ne fait pas de théâtre engagé. Notre engagement se situe davantage au niveau de notre démarche, de notre volonté de véhiculer une culture européenne, d’être un vecteur de culture transfrontalier car justement le théâtre est un grand vecteur de culture.

 

Dans la comédie « Le Bonheur » de Éric Assous qui sera présentée les 6 et 7 octobre à Wiesbaden ainsi que les 9 et 10 octobre à Francfort, il est question d’amour et de bonheur passé un certain âge et de la peur de finir seul. Dans notre monde moderne où il n’est plus tabou de tomber amoureux à n’importe quel âge, qu’est-ce qui selon vous représente le plus grand obstacle à une relation réussie ?

Selon moi, ce qui représente le plus grand obstacle à une relation réussie, c’est de ne pas accepter l’autre tel qu’il est et d’essayer de le changer. Si on cherche à changer l’autre, c’est qu’on aime plutôt une idée de ce qu’on se fait de la personne, que la personne elle-même. On aime son idéal, un schéma que l’on s’est forgé. Il faut ouvrir son cœur, accepter et aimer l’autre tel qu’il est et être prêt à faire des compromis. Je pense aussi que le fait de ne pas apprendre des échecs de la relation précédente est un obstacle à une relation réussie.

Dans a pièce « Le Bonheur » de Eric Assous, il y a une très belle phrase à ce sujet. Quand Alexandre veut venir s’installer chez Louise et qu’elle luit dit qu’elle n’est pas prête, il lui répond : « Aujourd’hui à l’âge qu’on a, les trains se font rare. En journée quand tu rates un train, tu prends le suivant, mais passé une certaine heure… ».

Ce qui veut dire qu’à partir d’un certain âge, on en a plus derrière nous que devant nous, alors il vaut mieux être prêt à faire des compromis, saisir sa chance avec la personne, la prendre et la garder telle qu’elle est !

 

« Das europäische Theater » ici.

Pour réserver vos places aux représentations de la pièce « Le Bonheur » les 6 et 7 octobre à 20 h au « Galli Theater » à Wiesbaden c'est par ici et les 9 et 10 octobre.à 20 h au « Kulturhaus » à Francfort c'est par là.



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