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Marieke Huysmans-Berthou : ''L’Irlande est un pays de conteurs''

Marieke Huysmans-Berthou PianoceanMarieke Huysmans-Berthou Pianocean
Écrit par Julien Chosalland
Publié le 13 mai 2021, mis à jour le 14 mai 2021

Il est rare de découvrir un concept jamais vu. Marieke Huysmans-Berthou a créé "Pianocéan". Pianiste-chanteuse-navigatrice, avec un piano qui peut sortir de la cale du bateau et s'inviter sur le pont de son "Lady Flow", Marieke sillonne les mers avec son amie Anne-Lise Le Pellec.

Les deux jeunes femmes amènent ainsi la musique et l'art dans les ports européens depuis 2015, en y donnant des concerts. Passionnée par l'Irlande, Marieke participe en ce mois de mai 2021 à la "Fête de la Bretagne" qui se tient à Galway. Nous en avons profité pour lui poser quelques questions pour la connaître mieux. Nous vous invitons vraiment à découvrir cette artiste, ses chansons, ses vidéos et ses livres. Suivez l'aventure "Pianocéan", c'est beau et fascinant. 

LePetitJournal.com : D'où vient votre lien avec l’Irlande ? 

Marieke Huysmans-Berthou : J’ai beaucoup voyagé à partir de mes 12-13 ans avec mon père qui était fou d'Irlande et de pêche depuis toujours. Dans un petit van tout au long de la côte ouest irlandaise, plusieurs mois par an, chaque année. Lui pêchait à la mouche et moi je jouais du piano dans les pubs quand je trouvais de vieux pianos désaccordés ! Petit à petit, mes liens avec l’Irlande se sont affinés, vers 18 ans je jouais chaque été de la musique dans les rues de Galway avec ma meilleure amie Lily… "Busking" comme on dit ici. Puis, à force de barouder dans le Connemara et d’être proche de la mer, j’ai découvert les Galway hookers et le festival de Kinvara. Depuis ce jour, je me suis promise d’installer un piano sur un voilier, un voilier noir comme les hookers du Connemara et de continuer à "Busker", mais de port en port.
Dès lors, je me suis formée à la voile en parallèle de mes études de piano et j’ai trouvé Lady Flow des années plus tard...

D'où vient votre lien avec la langue gaélique irlandaise ?

Durant chaque voyage, j’essaie de découvrir et de m’inspirer des cultures locales que je rencontre…j’ai donc composé des chansons dans différentes langues et dialectes locaux (provençal, corse et catalan en Méditerranée, breton en Bretagne, gaélique en Irlande). Mon approche du gaélique se fait par le chant, notamment la tradition du chant oral a capella, les "Sean-Nós". Chaque langue a sa propre poétique, ses images propres et on le retrouve particulièrement à travers les chansons, qui transportent les histoires, des gens et des lieux. L’Irlande est vraiment un pays de conteurs, de chanteurs, de raconteurs d’histoires... J’ai appris pas mal de chants gaéliques, j’ai aussi fait traduire des textes à moi pour pouvoir les chanter en gaélique, comme le titre "FAOI ÍOCHTAR NA SPÉIRE » de mon dernier album. Je travaille avec des amis du coin pour la prononciation, ce n'est pas une mince affaire !

Pouvez-vous nous raconter un concert Pianocéan ?

En général, on arrive au port quelques jours avant pour rencontrer un peu la population du coin et parler du concert, voire même inviter des musiciens pour le concert. 

Le bateau est amarré au quai, je sors le piano sur le pont - il monte par une sorte "d’ascenseur" depuis la cabine arrière. Le public se regroupe sur le quai et je débute le concert…je raconte pas mal d’anecdotes sur le voyage et l’origine de chaque chanson pendant les concerts. Après, il y a toujours un moment de rencontres et d’échanges sur le quai avec le public.

Marieke Huysmans-Berthou

Vous disiez récemment que c'est important que les spectateurs achètent vos CD et photos à la fin des concerts. En effet, ils ne paient pas leur place. Comment arrivez-vous à financer votre métier ?

En effet, les concerts de Pianocéan sont gratuits pour le public, tout le projet est financé par la vente des concerts (villes, ports, festivals, divers organisateurs…) et également par la vente des albums. J’enregistre les albums pendant chaque voyage dans la cabine arrière, dans mon petit studio flottant. Le public comprend bien qu’acheter les albums est un véritable soutien pour nous et c’est grâce à cela que nous pouvons poursuivre le voyage.

Qui sont les musiciens qui jouent avec vous à Galway pour ce concert de la Fête de la Bretagne ?

Liz Coleman et Michael Chang. Deux supers violonistes de la scène trad de Galway. On s’est rencontré avant le concert, on a joué 3 morceaux ensemble et c’était bon, pas besoin de répéter plus…ils ont un super feeling ! (NDLR: Retouvez le streaming du concert sur ce lien)

Dans quel port rêvez-vous de jouer un jour ?

A peu près tous les ports insulaires du monde ! Donc il y a de quoi faire ! Rien que sur la tournée de cet été 2021 presque toutes nos escales sont sur des îles, il y en a 700 environ en Ecosse, on ne pourra pas toute les faire. Mais à vrai dire, début Juin 2021, je vais réaliser un vrai rêve, c’est d’arriver avec "Lady Flow" pour un concert à Tory Island, petite île du Nord-Ouest de l’Irlande que j’aime tellement. J’ai passé du temps sur l’île il y a des années, je leur ai promis de venir un jour quand mon projet sera réalisé…là je peux enfin tenir ma promesse. Je regrette simplement que le roi, Patsy Dan Rodgers, qui était un ami et mon seul roi, ne soit plus là pour voir ça.

On a l'impression que votre rencontre avec votre bateau a quelque chose de magique car c'est un bateau qui permet d'avoir le piano qui s'élève sur le pont et il n'y a pas tant de bateaux que ça qui le permettent. Pouvez-vous un peu parler de votre bateau "Lady Flow"?

En effet, il y a un peu de magie là-dedans. Quand je me suis mise à la recherche d’un bateau, un ancien moniteur de voile m’a téléphoné pour me parler de ce bateau au port de Lorient. Il m’a dit "y’a un bateau qui ressemble à ton tatouage -j’ai un Galway hooker tatoué dans le cou - sur le port de Lorient, viens voir !". J’y suis allée et c’était elle, la "Lady Flow". Avec même le nom parfait !

le Lady Flow
Le Lady Flow

Pour des infos plus "technico-techniques", c'est une goélette à mâts égaux de 1983, un Freedom 40 pour être exact, avec cockpit central et mâts en carbone et fibre de verre auto-portés. Un bateau assez rare par ici…et qui ressemble un peu à un bateau pirate !
Je n'ai pas cherché plus loin - ayant pris les mesures du piano et vérifié qu’il rentrerait bien en cabine arrière. Je n’ai visité aucun autre bateau et depuis que je suis sur les mers, je n’ai jamais croisé un autre bateau dont j’aurais pu dire qu’il aurait été aussi bien. C’était elle, voilà. Et puis il y a eu une belle histoire de passation avec l’ancien capitaine Mikaël Le Berre, qui est devenu un ami et un grand fan de Pianocéan.  

C’était important pour lui que le bateau ait une belle histoire à vivre. Comme elle nous l’a encore prouvé aujourd’hui lors de notre première navigation de la saison, "Lady Flow" est un super bateau de voyage…un bateau lourd et stable, pas une bête de course mais un bateau qui va loin et longtemps. 

 


Interview réalisée par Julien Chosalland

Crédits Photos: Anne-Lise Le Pellec 

Retrouvez le site internet de pianocéan

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