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Gilles Jeronymos et son atelier d'écriture: les plumes de la sirène

Gilles Jeronymos anime l'atelier d'écriture les plumes de la sirène à CopenhagueGilles Jeronymos anime l'atelier d'écriture les plumes de la sirène à Copenhague
Gilles Jeronymos
Écrit par Jean Valery Ponrouch
Publié le 8 novembre 2021, mis à jour le 9 novembre 2021

Je gravis quatre à quatre les marches des cinq étages qui me séparent de mon hôte et interlocuteur. J’ai rendez-vous avec Gilles Jeronymos, il anime à Copenhague l’atelier d’écriture « Les plumes de la sirène ».

 

Il m’accueille dans son appartement d’Østerbro, le regard empreint tout à la fois d’un brin de malice et de bienveillance. L’homme est affable et dès l’évocation de son parcours, son attachement profond à la langue française se fait ressentir :

 

GJ: Je me souviens, tout petit, d’avoir perçu le fait de savoir lire comme un super pouvoir, une ouverture vers d’autres mondes... Mon grand frère savait lire et il ne voulait pas raconter les histoires.

De cette frustration est né un vrai désir : lire et écrire. J’ai appris très tôt et très vite ! 

D’autre part, mon père qui écrivait des poèmes, a toujours mis un point d’honneur à nous parler français avec beaucoup de justesse. Il était fils d’immigrés. Né en France de parents grecs, la maitrise du français a été pour lui un vrai facteur d’intégration et d’émancipation.

Les récits de la mythologie grecque ont aussi bercé mon enfance. Je lui dois l’amour des histoires et surtout de la langue.

 

J’avais beaucoup d’imagination et à l’école, j’ai très vite utilisé la narration et l’expression comme une force, une arme…tout comme l’humour !

J’ai grandi à Avignon où j’ai fait des études de communication. Je me faisais de l’argent de poche en rédigeant une rubrique sur la vie étudiante dans le journal La Provence.

Puis j’ai rejoint le milieu du photojournalisme, en montant à Paris pour l’agence Gamma.

J’y ai trouvé beaucoup d’intérêt, l’image est une autre façon de raconter des histoires.

Par la suite, que ce soit dans l’évènementiel ou le tourisme, j’ai toujours intégré un élément narratif au sein de mes projets.

J’aime raconter des histoires. 

L’oralité est la plus vieille activité humaine. Elle est source de savoir et de transmission. Elle fait trace. 

C’est cette identification qui me touche dans l’écriture, une forme d’universalité qui fonde notre humanité.

 

Un rayon de soleil vient éclairer notre conversation et nos cafés fumants sur la table. J’enchaîne, interrogeant Gilles plus précisément sur les motivations d’un tel atelier en langue française ici à Copenhague.

GJ: Lors de la crise du Covid, j’étais en panne de sens. 

Je me suis d’abord réfugié dans les livres, du fait de la perte de contact avec les autres. Les auteurs sont d’excellents compagnons de solitude, leurs mots sont des révélateurs : tout est déjà là, même ce qu’on a pu ressentir pendant cette pandémie qui nous a semblé si inédite ! 

Au cours de cette période, j’ai ouvert une boite d’archives qui prenait la poussière ou j’avais gardé tous les textes d’un précédent atelier auquel je participais activement, à Paris, il y a une vingtaine d’années. 

J’y ai trouvé de la lumière, de l’espoir… A partager !

Je me suis dit que ne devais pas être le seul dans cette quête de partage.

L’atelier est devenu viscéral et nécessaire avec une connotation particulière du fait d’être expatrié. 

La langue est un gros marqueur de notre identité. A l’étranger elle passe au second plan et on devient forcément une autre personne, on en vient à la vandaliser par des abréviations, des anglicismes... On perd ses mots !

 

Quel peut bien être le déroulé d’un tel atelier à la recherche des mots perdus ?

GJ: Au départ, il y a toujours une consigne d’écriture, souvent ludique. 

Le jeu permet de désacraliser les mots et de les utiliser comme un matériau, de se désinhiber, de s’exprimer. On est souvent notre propre censeur et cette approche ludique permet de se mettre dans une posture plus bienveillante face à sa propre écriture. 

Cette première partie tient de la recherche lexicale, on se constitue une boite à outils sémantique en vue de produire un texte. 

Puis vient un temps d’écriture où il faut se lancer. Je suis là pour aider et encourager en cas de faux départ ou de crise de la page blanche.

Enfin arrive le temps de la lecture, du partage... du merveilleux !

Cela révèle les singularités de styles, d’univers et des correspondances. 

Pour les participants, c’est le plus intéressant. On rit beaucoup et on se régale des trouvailles de chacun.

Tout le monde est capable de produire un texte. Des textes peuvent se répondre, se ressembler, il y a des gémellités de cœur, de terroir…

 

L’atelier amène à se dévoiler. Le cadre, la bienveillance du groupe, et la grande liberté que confèrent la fiction et l’imaginaire permettent de s’aventurer sur le terrain du sensible avec un fort sentiment de protection.

 

Actuellement, l’activité a lieu dans un cadre très chaleureux, Paris 90, la vinothèque de Victor Monchamp sur Classensgade. Ce lieu a du sens pour moi, le vin fait partie de notre culture et est synonyme de convivialité. 

 

- Le café refroidit, il me reste quelques questions : quelle est ta lecture du moment ?

GJ: Je lis « Vivre avec nos morts », de Delphine Horvilleur. C’est un témoignage très humaniste qui remet la mort à sa place et permet de s’ancrer dans le vivant avec la narration comme consolation. 

 

-  Des projets ? 

GJ: Effectivement, les retours positifs de l’atelier m’incitent à poursuivre mon idée et à la développer... J’aimerais pouvoir proposer un tel atelier à un public plus jeune ou à des publics francophiles pour qui le français n’est pas la langue maternelle. 

 

- Comment participer à l’atelier ?

 

GJ:  L’atelier est ouvert à tous. Il n’y a pas de niveau : Nous nous réunissons de 18 à 20h deux mardis par mois et la participation est de 80 DKK par personne.  Il y a toujours de la place, de quoi grignoter et boire, de l’encre et des idées ! Contactez-moi à l’adresse : lesplumes2lasirene@gmail.com

 

 

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