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Les NFT décodés par la crypto-artiste helvético-thaïlandaise Pailin Mirault

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Courtoisie - A 21 ans, l'artiste Pailin Mirault a déjà vendu quatre oeuvres NFT pour 320.000 bahts
Écrit par Secret Art Night
Publié le 14 février 2022, mis à jour le 23 août 2022

En seulement six mois, Pailin Mirault a déjà vendu quatre œuvres NFT pour près de 320.000 bahts. Rencontre avec la crypto-artiste helvético-thaïlandaise pour comprendre les NFT. 

L’épidémie du coronavirus a bouleversé les études d’illustrations de Pailin Mirault, une jeune helvético-thaïlandaise de 21 ans. Partie étudier à Hong Kong en 2020, Pailin est revenue à Chiang Mai après seulement un an alors qu’elle aurait dû y rester pour un cursus complet de quatre ans. Face à l’impossibilité d’exposer ses œuvres dans des galeries ou des expositions, Pailin s’est lancée, comme beaucoup d’autres artistes à la même période, vers les plateformes digitales de vente d'œuvres d’art sous forme de NFT.

“Il y a encore quelques mois, je ne connaissais rien aux NFT et aux cryptomonnaies, mais je me suis dit que cela pourrait me donner plus de visibilité à l’international”, explique Pailin Mirault.

NFT signifie en anglais non-fungible token, soit jeton non fongible en français. Un objet non fongible est un objet unique qui n'est pas interchangeable. En ce sens, l’argent est fongible, on peut échanger des euros ou des cryptomonnaies. Par contre, une œuvre d’art est unique et donc non fongible. 

Pour assurer le côté unique de l'œuvre et donc créer un NFT, on attache au fichier numérique un certificat d’authenticité numérique. Plus exactement, le NFT est un jeton cryptographique stocké sur une blockchain. Le fichier numérique seul est fongible, qu'il s'agisse d'une photo, d'une vidéo ou autre, le NFT associé est non fongible. 

De 40 millions à 40 milliards de dollars en trois ans

Le premier NFT a été créé en 2014, mais ce n’est qu’en 2017 qu’ils ont commencé à toucher le public. Depuis, le marché des NFT a pris une ampleur considérable, passant de 40 millions à 40 milliards de dollars entre 2018 et 2021. 

En 2021, l'œuvre Everydays - The First 5000 Days, par l'artiste Mike Winkelmann, plus connu sous le pseudonyme de Beeple, s'est vendu 69,3 millions de dollars. C'est à ce jour l'œuvre d'art numérique la plus chère de l'histoire. 

En Thaïlande, Thanathorn Juangroongruangkit, leader du parti politique Progressive Movement, a organisé une vente aux enchères de trois de ses œuvres NFT en janvier 2021 qui sont parties pour une somme totale de 3,3 millions de bahts.

Du 5 au 20 mars 2022 se tiendra le "Thailand Digital Arts Festival 2022" (TDAF 2022), la première foire d’art numérique de Thaïlande avec plus de 1.300 œuvres de 130 artistes thaïlandais. L’événement aura lieu à IconSiam en collaboration avec le musée Baandam, la plateforme Coral lancée par Kasikorn Bank et Plan B Media Public Company Limited. 

Le journal anglophone Bangkok Post s’apprête à lancer prochainement une exposition de ses photos d’archives qui retracent 75 ans d’actualité en Thaïlande et dans le monde sur la plateforme singapourienne EastNFT. 

Gagner en visibilité

En parallèle, de nombreux artistes thaïlandais, connus ou moins connus, se sont également mis au NFT, parfois avec succès. Pailin Mirault a déjà vendu quatre œuvres sur la plateforme exclusive Foundation pour une somme totale de 2,35 Ethereum soit près de 320.000 bahts. 

plateforme Foundation NFT
Certaines plateformes comme Foundation ne sont accessibles que sur invitation, une manière de garantir la qualité du travail des artistes. Capture d'écran

“J’ai commencé par mettre mes œuvres sur OpenSea, une plateforme accessible à tout le monde. Ensuite j’ai été repérée par l’artiste américain Anthony Sims et il m’a invité sur la plaforme Foundation, une plateforme exclusive où tu ne peux rentrer que si tu as une invitation et où tu ne peux inviter d’autres artistes qu’à partir du moment où tu as vendu au moins une oeuvre. C’est un peu comme une galerie pour les NFT, mais avec une certaine qualité puisque tout le monde ne peut y avoir accès”, détaille en français la jeune femme née à Genève d'un père Suisse et d'une mère Thaïlandaise, mais ayant grandi à Chiang Mai. 

Ethernity, Foundation, Binance NFT, SuperRare, Rarible ou OpenSea font partie des plateformes de NFT les plus populaires, car elles offrent l’avantage de pouvoir y créer directement un NFT à partir de n’importe quel fichier numérique, que ce soit une peinture digitale, une vidéo, une photographie, un ticket pour un événement, un film, un brevet, une chanson, etc. Le NFT peut ensuite être vendu soit via un prix fixe décidé par le vendeur, soit aux enchères. L’une des grandes différences par rapport à l’art traditionnel, vu que chaque NFT est accompagné d’un certificat numérique, à chaque revente d’un NFT, l’artiste touche une commission. 

“Avec le Covid-19, c’était difficile d’organiser des expositions dans des galeries, de plus de manière générale, pour un artiste thaïlandais, s’il n’y a pas de touristes c’est difficile de se faire connaître à l’international. Les NFT permettent de se faire connaître en dehors des frontières, c’est vraiment un outil supplémentaire intéressant pour un artiste”, s’enthousiasme Pailin Mirault. 

Art digital versus art conventionnel 

On peut s’interroger sur la pertinence d’acquérir une œuvre digitale qui reste quelque part dans le ‘cloud’ virtuel alors qu’un tableau peut s’exposer sur un mur, dans une galerie, un musée ou simplement chez soi pour observer à l’infini sa beauté. 

“Les NFT cassent la représentation classique de l’art où les acheteurs acquièrent ton travail parce qu’ils aiment l’art. Je pense que les NFT ne touchent pas les gens qui aiment l’art, c’est plus pour les investisseurs, ils achètent tes oeuvres parce qu’ils savent que ton travail va prendre de la valeur”, commente Pailin Mirault. 

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A côté de ses oeuvres digitales, Pailin Mirault continue de travailler de manière plus conventionnelle comme pour son tableau "Unsaid Things" réalisé au fusain. 

L’artiste rappelle également que les NFT se payent en cryptomonnaies, ils touchent surtout une autre catégorie de personnes orientées vers les nouvelles technologies, le travail en ligne, le jeu en ligne et les investissements dans les cryptomonnaies. Dès lors, nous sommes loin des collectionneurs habituels. 

“J’ai remarqué que ceux qui achètent des NFT le font plus pour l’argent ou le retour sur investissement, d’autant plus que les cryptomonnaies sont très volatiles et que leur valeur peut changer très vite. En tant qu’artiste, il faut en être conscient et faire attention à ne produire des œuvres que dans un but financier, car c’est tentant”, précise-t-elle. 

Du haut de ses 21 ans, Pailin Mirault garde les pieds sur terre et continue de développer son art dans les deux formes, digital et sur papier, en cherchant avant tout à prendre les bons côtés de chaque. 

“Mes œuvres sur papier sont assez abstraites et très sombres. En fait, j’avais peur de sortir de ma zone de confort, il y a l’angoisse de la page blanche ou la peur de faire une erreur dans l’utilisation des couleurs. Quand j’ai découvert l’art digital, je me suis sentie plus libre, car tu peux vite effacer et recommencer, j’ai gagné en confiance. Pour autant, je ne prévois pas de lâcher le papier”, conclut celle qui a organisé sa première exposition à Chiang Mai au Lida Art Space du 27 janvier au 4 février 2021. 


Catherine Vanesse

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