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MICRO-TROTTOIR - Comment c'est, être jeune à Casablanca ?

Écrit par Parler Darija
Publié le 20 avril 2014, mis à jour le 23 avril 2014

Lepetitjournal.com s'est demandé à quoi ressemble aujourd'hui la jeunesse des français à Casablanca ? Pour avoir une réponse, nous avons investi les sorties de classe du Lycée Lyautey afin d'avoir l'avis des jeunes qui s'adressent aux jeunes.

Nayla, franco-marocaine, est en seconde, elle a 16 ans.
Globalement on va chez les copains. On sort le week-end, mais rarement la semaine, même le vendredi soir c'est calme ! On va dans des boîtes de nuit, des bars, des restaurants,... dehors ! Il y a quelques adresses où on aime se retrouver, comme le Gossip Beach ou le Sun Beach, sur la côte. Mais nos parents ne veulent pas trop qu'on sorte dans Casablanca même, surtout le soir : ma mère est inquiète. Il y a moins de sécurité ici qu'à Paris ou à Bordeaux. On ne peut pas tout faire, et cette insécurité fait que j'ai un peu moins de liberté ici qu'en France. C'est pourquoi on se déplace les week-ends, surtout à Marrakech car certains d'entre nous ont de la famille pour nous loger, certains même ont des maisons secondaires sur place. Il y en a qui prennent des hôtels parce que c'est plus simple. A Marrakech on aime bien aller au Théatro, au Paris-Paris ou au Rose Bar.


Adly, franco-croate, est en seconde, il a 16 ans.


Cela fait 8 ans que je suis à Casablanca. Le Lycée Lyautey, c'est comme à Paris, c'est vraiment pareil. Par contre, à l'extérieur du lycée, c'est très différent de la France : les avantages, c'est qu'on se déplace plus facilement, et qu'on a plus de liberté. Je préfère quand même Paris parce qu'il y a plus de choses à faire, mais ici on est plus libre. Par exemple, à Paris il y a beaucoup plus de boîtes de nuit, d'un meilleur niveau que celles de Casablanca, avec plus de choix et plus de variantes : mais on ne peut pas rentrer quand on est mineur... Alors qu'ici, on peut rentrer quasiment partout où l'on veut, mais il y a moins de choix, et c'est moins intéressant. C'est un peu le cas avec tous les loisirs en fait : il n'y a rien d'exceptionnel, tout est basique. Il y a des boîtes de nuit histoire de dire qu'il y en a, mais c'est vraiment ordinaire. Du coup, on se retrouve au Mégarama, à la plage. Je dois bien avouer que la proximité de l'océan, c'est cela le vrai grand point fort de Casablanca : le surf, les plages, le soleil, le sable, l'océan. La ville parfaite pour moi, ce serait Paris au bord de mer : du coup, j'aimerais vivre en Croatie plus tard !

Yassine et Ghali sont en première S, ils ont 17 ans.
Il y a quelques semaines, on est allés à Madrid et on s'est rendu compte qu'il y a beaucoup plus de liberté en Espagne qu'ici. Cela se voit car ils peuvent sortir la nuit, être un peu ivres sans être forcément arrêtés par la Police : il y a beaucoup moins d'insécurité, et donc de règles. Ici au Maroc, ce ne sont vraiment pas le même genre de soirées auxquelles on participe : nos parents s'inquiètent beaucoup, alors ils font toujours en sorte de nous laisser faire à la maison le week-end. C'est super, on passe vraiment des bons moments entre nous, mais chez nous. Quand on a le temps ! On travaille vraiment beaucoup au lycée Lyautey, alors la semaine, on ne sort pas : on travaille le soir. Bien sûr, on aime sortir, aller au restaurant, à la plage avec nos amis, et on peut le faire sans soucis, mais ce n'est pas pareil. Clairement, on n'a pas la même jeunesse que dans les autres pays.

 

Alia, 17 ans est en terminale ES.
Ici on sort beaucoup : on va au cinéma, au Mégarama, à Anfa Place, au Mall, au Venezia Ice aussi, bref sur la côte. Au final, il y a peu d'endroits différents auxquels on peut se retrouver, car on ne se ballade pas beaucoup. Mais je suis mieux à Casablanca qu'ailleurs : c'est une question de mode de vie. Ici il y a une ambiance très particulière qu'on ne retrouve nulle part ailleurs : les gens sont gentils, aimables, tandis qu'en France, ils sont égoïstes et racistes. Je n'aime pas aller en France, où je suis considérée comme une étrangère, et où il m'arrive d'être ignorée, voire insultée. Je vais retourner en France pour mes études, et je suis assez contente car c'est une belle expérience ; mais si j'avais eu la possibilité de faire ce que je voulais comme école au Maroc, j'aurais évidemment choisi de rester.

Shemsi, marocaine, est en 1ère ES, elle a 16 ans.


Je viens de Casablanca, j'ai toujours vécu ici et cela me déplait. Il y a des fortes disparités sociales, et une exposition à outrance de richesses : la proximité des riches villas et des bidonvilles est indécente à mes yeux. L'insécurité grandissante me force à avoir un chauffeur, et cela m'horripile. J'aimerais intégrer Sciences Po en France, mais ce qui me plairait davantage serait de faire ma place dans un pays anglo-saxon, afin d'échapper notamment à la montée de l'extrême-droite dans le pays des droits de l'homme. Ma famille pense comme moi, seulement leurs attaches sont ici. Mes amis sont à Mohammedia et j'essaie de les voir le plus souvent possible, mais je me sens un peu en marge dans cette jeunesse marocaine. Cependant je n'y vois pas d'inconvénient. J'ai des activités variées comme le skate, le surf et je suis bénévole dans des associations caritatives. J'ai l'impression d'être une des seules à me préoccuper d'autre chose que de moi-même ici. Au Lycée Lyautey, les gens ne se mélangent pas, il y a beaucoup d'individualisme, et je crois que j'ai perdu un peu espoir. Je ne me sens pas à ma place dans cette ville, mais ce n'est pas le cas pour tout le Maroc car malgré tout j'aime beaucoup mon pays.

Hayatdounia est suisse, a 17 ans et elle est en terminale STMG.
Nous faisons beaucoup d'activités extra-scolaires : moi je fais de l'équitation à Dar Bouazza. J'habite à Mohammedia, alors c'est difficile pour moi de sortir le soir, mais nous faisons beaucoup de soirées ou d'après-midi chez les copines. Je vais faire mes études à Rouen, j'ai hâte de pouvoir profiter de cette expérience. J'aime beaucoup Casablanca, mais je pense que c'est une ville dans laquelle on peut pleinement vivre seulement autour de la trentaine. Ce n'est pas une ville pour les jeunes, c'est un endroit parfait pour s'installer, s'épanouir, mais pas pour grandir. Nous sommes confrontés tous les jours à l'insécurité, aux problèmes d'agressions. Je suis contente de pouvoir aller dans une ville française pour la suite de mes études, même si j'ai un peu peur de quitter ma famille.

(photo: Hayatdounia et Kawtar)

Kawtar, marocaine de 18 ans, est en terminale STMG.
Je trouve que nous sommes beaucoup trop influencés par la mondialisation : nous écoutons beaucoup plus de musiques américaines que marocaines, et nous nous habillons comme les européens. En outre, nos centres d'intérêts sont pareils que ceux des autres jeunes: nous avons les mêmes activités, les mêmes goûts, nous organisons les mêmes évènements, sorties : on se retrouve dans des endroits similaires... Définitivement, je ne vois pas de différences entre notre jeunesse et celles des lycéens de n'importe quelle autre grande ville. Nous partons souvent en week-end à Marrakech où nous dormons dans des hôtels. Nos parents nous laissent la liberté de partir le week end car ils préfèrent nous savoir en dehors de Casablanca pour sortir la nuit. Cela ne nous empêche pas d'aller dans des boîtes de nuit ou des bars ici. Pour l'instant, je n'attends qu'une seule chose : c'est de retourner en France. Je vais faire mes études à Lyon, là où je suis née et où j'ai tous mes amis. Je compte les jours avant de partir : il en reste 52 !

Manon Kole et Louise Favel (www.lepetitjournal.com/casablanca) Lundi 21 avril 2014

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Publié le 20 avril 2014, mis à jour le 23 avril 2014

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