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Retour contraint en Birmanie pour les femmes girafes

Les photos avec les touristes représentent un vrai revenu pour les femmes-girafesLes photos avec les touristes représentent un vrai revenu pour les femmes-girafes
Les photos avec les touristes représentent un vrai revenu pour les femmes-girafes
Écrit par Julia Guinamard
Publié le 6 août 2020, mis à jour le 6 août 2020

Des centaines de femmes Kayan Lahwi – plus connues sous l’appellation de femmes girafes car elles se parent de colliers en métal qui allongent leur cou - qui travaillaient aux alentours de Chiang Mai sont rentrées en Birmanie à la suite de l’effondrement du tourisme en Thaïlande. Depuis des décennies, les femmes du groupe ethnique Kayan Lahwi, aussi parfois appelé Padaung, font du commerce dans le nord du royaume chakri en y vendant des vêtements traditionnels, des objets artisanaux et surtout leur image, en posant sur les photos des touristes. C’est bien sûr cette image qui constitue la principale attraction pour les touristes, au point d’ailleurs que cela a parfois suscité questions ou protestations de la part d’organisations ou d’agences internationales qui considéraient qu’il y avait là une exploitation d’êtres humains. En effet, dès l’âge de cinq ans, les petites filles commencent à porter les colliers à spirales qui allongent leur cou. Il s’agit d’une tradition très ancrée et ancienne mais qui relève également aujourd’hui de l’enjeu touristique et économique.

Rentrées dans leurs villages natals, majoritairement dans les circonscriptions de Loikaw et Demoso, dans l’État de Kayah, les femmes au long cou sont contraintes d’accepter des emplois moins rémunérateurs. Celles qui ne sont pas trop encombrées par leurs spirales travaillent dans les champs où elles touchent environ 6 000 kyats (de l’ordre de 4 euros) par jour pour un travail « très laborieux et épuisant », selon ce que confie l’une d’elles à Radio Free Asia (RFA). Avec ce type d’ornement autour du cou, celui-ci ne peut plus se plier, ce qui rend les travaux agricoles encore plus pénibles. Cette femme explique son parcours : « Avant, je travaillais dans les fermes. Je suis allée en Thaïlande parce que je ne gagnais pas beaucoup d'argent ici, dans le Kayah. Maintenant, je suis revenue de Thaïlande à cause de la pandémie ». Mais toutes n’ont pas la possibilité de travailler : « Actuellement, je ne fais rien et je reste à la maison. Je veux retourner en Thaïlande si je le peux quand la situation s'améliorera car je n'ai plus de revenus », explique une autre Kayan de 70 ans, âge auquel ces femmes-girafes ont de nombreuses spirales autour du cou. Elle atteste qu’en Thaïlande elle touche entre 20 et 30 bahts (la devise thaïe, ce qui représente entre 50 et 80 centimes d’euro) pour une photo. À cela s’ajoutent les subventions du gouvernement thaïlandais, qui vont de 1 000 à 5 000 bahts (approximativement entre 27 et 135 euros) par mois, précise RFA.

L’activité touristique liée aux femmes au long cou n’est pas exclusive à la Thaïlande. Dans le village de Pan Pet, dans la circonscription de Loikaw, 50 % des femmes Kayan Lahwi dépendent du tourisme, secteur aussi à l’arrêt en Birmanie. Le responsable du tourisme communautaire du village de Pan Pet constate : « Beaucoup de commerces d'artisanat local sont fermés en ce moment. Même le secteur agricole est lié au tourisme, ce qui met tout le monde à l’épreuve ». Malgré la situation délicate pour les travailleurs, le ministre régional des Affaires ethniques a déclaré qu’il n’y aura pas d’aide pour les Kayan Lahwi rapatriées. Seule bonne nouvelle pour elles, le 22 juillet 2020 le Centre d’administration pour la Covid-19 thaïlandais a annoncé que certains travailleurs étrangers seront bientôt autorisés à revenir. La mesure concerne pour le moment les travailleurs qualifiés, mais le ministère du Travail thaïlandais se penche actuellement sur le cas des travailleurs non qualifiés birmans, laotiens et cambodgiens.

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