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Piang Ngaih Don, 24 ans, morte de s’être expatriée à Singapour

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Piang Ngaih Don (DR)
Écrit par Rédaction lepetitjournal.com Birmanie
Publié le 24 juin 2021, mis à jour le 24 juin 2021

C’est un de ces drames de la misère, de l’ignorance et du mensonge, ce cocktail délétère qui frappe chaque année de nombreux Birmans qui émigrent plein de rêves et d’espoir pour sortir de l’indigence en travaillant dur et en économisant assez pour pouvoir s’offrir qui une boutique, qui une maison, qui un taxi à leur retour.

La misère, Piang Ngaih Don est née dedans, à Dimpi, dans l’état de Chin, le plus pauvre et le plus abandonné de la Birmanie. Son statut de mère célibataire – courant mais peu enviable dans un pays dont la société a peu de complaisance pour celles venant de milieux modestes qui se retrouvent enceintes sans être mariées ou qui se séparent de leur compagnon alors qu’elles ont des enfants – semblait la condamner à demeurer dans un grand dénuement et la jeune femme essayait tant bien que mal de joindre les deux bouts comme ouvrière du bâtiment afin de subvenir aux besoins de son fils d’un an et du reste de sa famille.

Morte de faim et des violences subies

L’ignorance l’a rattrapée lorsqu'un agent de recrutement lui a proposé de devenir domestique à Singapour, lui promettant monts et merveilles. Sans savoir vraiment à quoi elle s’engageait, Piang Ngaih Don a sauté sur l'occasion, convaincue, comme tant de ses compatriotes, que la vie ailleurs ne peut être que meilleure et qu’un emploi dans la cité-état lui garantissait un revenu tel que son enfant et sa famille ne seraient plus jamais dans le besoin.

Le mensonge l’a tuée, car Piang Ngaih Don est morte de faim et des violences invraisemblables que son employeur lui a fait subir. Arrivée à Singapour le 28 mai 2015, la jeune femme rendait l’âme 10 mois plus tard, 26 juillet 2016, sans que jamais quiconque à Singapour ne s’inquiète de son sort, sans qu’elle ne puisse jamais contacter quiconque ou trouver le moindre secours malgré les promesses de sécurité que le système officiel à travers lequel son embauche s’est déroulée lui promettait.

Tragiquement, les employeurs de la jeune femme étaient un policier et son épouse, Kevin Chelvam et Gaiyathiri Murugayan, et le représentant de la loi avait installé des caméras de surveillance dans son appartement qui ont enregistré le calvaire quotidien de la jeune Chin sous les coups de Mme Murugayan. Les images montrent Piang Ngaih Don se faire étouffée, être aspergée régulièrement d’eau glacée, se faire frapper et piétinée ou brûlée avec un fer à repasser chaud. La jeune domestique ne recevait que peu de nourriture, toujours froide, elle était obligée de se laver ou d’aller aux toilettes avec la porte ouverte – l’employeur a invoqué le « manque d’hygiène » de la jeune femme comme une des raisons à toutes ces tortures – et la nuit Piang Ngaih Don était attachée à la grille d’une fenêtre et dormait à même le sol. Elle pesait 39 kg lorsqu'elle a commencé à travailler, 24 kg à sa mort.

« La cruauté abjecte et la conduite épouvantable de l'accusée »

Le 22 juin 2021, Gaiyathiri Murugayan a été condamnée à 30 ans de prison pour 28 chefs d'accusation, le plus grave étant celui d'homicide volontaire, pour lequel elle a été condamnée à 20 ans de prison. En prononçant la sentence, le juge a évoqué « l'un des pires types d'homicide volontaire », insistant sur « la cruauté abjecte et la conduite épouvantable de l'accusée ». Il a toutefois pris en compte que Mme Murugayan, aujourd’hui 41 ans, souffrait à l’époque des faits de troubles obsessionnels compulsifs et de dépression depuis son accouchement. L’époux – aujourd’hui divorcé - et la mère de la condamnée, qui séjournait souvent avec le couple, attendent actuellement d’être jugés.

Ce faits divers tragique a bien sûr suscité des commentaires ad hoc des dirigeants singapourien, tant du ministre de l'Intérieur et du Droit que de la ministre de la Main d'œuvre, qui ont regretté le fait divers. Choqués, de nombreux Singapouriens ont aussi souhaité apporter leur aide à la famille de la victime et plus de 200 000 dollars singapouriens (environ 125 000 euros) ont été donné à un organisme chargé de les redistribuer à la famille de Piang Ngaih Don afin que son fils bénéficie de l’existence dont sa mère avait rêvé pour lui.

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