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Facebook sanctionne MyTel pour « désinformation commerciale »

Facebook scandale MyTel BirmanieFacebook scandale MyTel Birmanie
Photo : Source: @jean_leroux/DFRLab via Facebook
Écrit par Rédaction lepetitjournal.com Birmanie
Publié le 28 septembre 2020, mis à jour le 29 septembre 2020

C’est une première dans l’histoire des réseaux sociaux sur internet et cela se passe en Birmanie… Enfin, pas qu’en Birmanie, au Vietnam et en Birmanie : Facebook, le principal réseau social numérique, a annoncé le 12 février dernier avoir éliminé une vingtaine de faux comptes et fausses pages liées à « un des plus gros opérateurs télécoms d’Asie du Sud-Est » qui distillaient et publiaient des mensonges d’une part et des rumeurs malveillantes d’autre part à l’encontre de ses concurrents. Selon Facebook, « l’entreprise utilisait des tactiques typiques des trolls russes afin de discréditer ses rivaux dans une campagne raisonnée et coordonnée de désinformation commerciale ». Les victimes ? MPT, Ooredoo et Telenor. La crapule ? Mytel, et derrière MyTel, son actionnaire à 49% Viettel. C’est la toute première fois que Facebook prend ainsi des mesures de rétorsion contre des entreprises s’adonnant au mensonge et à la désinformation raisonnés afin d’en tirer un avantage commercial.

La méthode est désormais classique et rodée : des pages thématiques sont créées - ici il s’agissait « de plates-formes indépendantes d’information sur les télécommunications » - et elles propagent peu à peu leurs mensonges, jamais de manière massive au départ mais plutôt par des mesquineries et des fables choisies placées à côté de banalités, par exemple des « témoignages » de clients mécontents d’un opérateur qui obtiennent enfin le service qu’ils veulent… en rejoignant MyTel. Afin de brouiller les pistes, ces mêmes pages mettent même de temps en temps des informations positives pour leurs cibles, histoire de se donner un vernis d’objectivité et de renforcer leur force de dissimulation.

Et en croisant leurs messages, en simulant des vérifications de l’une vers l’autre, ces pages tissent une toile de désinformation afin de rebuter ou d’effrayer les clients et clients potentiels de leurs cibles. Cela passe par de faux messages de clients mécontents donc, mais il y a aussi eu des affirmations de banqueroute, la construction d’une rumeur qu’un opérateur allait quitter le marché birman, qu’un autre allait être sanctionné « pour des pratiques frauduleuses », un comble !... Exemple type de procédé crapuleux, l’histoire du « *31# ». Sur plusieurs de ces plates-formes le 19 octobre 2019 apparaît une publicité figurant les logos de MPT, Telenor et Ooredoo et encourageant les internautes à appeler le *31# afin de gagner 10GB de données. Tous ceux tombés dans le piège se sont alors retrouvés avec des capacités d’appels diminuées et de gros soucis avec leur téléphone. Comme par miracle, seul l’opérateur MyTel – qui ne participait pas à « l’opération » - avait « anticipé » le blocage et proposait une solution pour remettre en route les téléphones normalement : appeler le #31#. L’ensemble des manipulations s’est avéré efficace : les pages incriminées ont dépensé pour environ 1,2 millions de dollars étasuniens en publicité sur Facebook et quelque 265 000 internautes suivaient une ou plusieurs de ces pages/plates-formes et ont donc été nourris aux mensonges durant des mois…

Depuis 2016 et la polémique sur les mensonges répandus contre Hillary Clinton durant la campagne présidentielle étasunienne, Facebook a mis fin à des dizaines de campagne de désinformation, la plupart liées à trois pays : l’Arabie Saoudite, l’Iran et la Russie. En 2018 en Birmanie, l’entreprise avait fermé plusieurs centaines de comptes, dont celui du chef d’Etat-Major des armées birmanes, le général Min Aung Hlaing, afin d’éviter que le réseau social « soit utilisé pour alimenter les tensions ethniques et religieuses ». En août 2019, de nouveau plus de 200 comptes sont clos parce qu’ils « essayaient de manipuler et de corrompre le débat public ». Des mensonges relatifs au milieu économique ont aussi était sanctionné à travers le monde par le numéro Un mondial des réseaux sociaux.

Mais l’action entamée mercredi 12 février constitue une première : Facebook n’avait jamais jusque-là accusé nommément une entreprise d’avoir organisé une campagne de désinformation à l’encontre de ses concurrents commerciaux. Ici, la firme californienne détaille la manière dont MyTel/Viettel a procédé – notamment le rôle de la compagnie vietnamienne de relations publiques Gapit Communications, qui a orchestre tout ou partie de la campagne - livre tous les noms des plates-formes et déclare « avoir transmis tous les éléments à charges aux diverses agences en charge de la sécurité et du maintien de l’ordre », sans plus préciser de quelles agences il s’agit et dans quels pays. Ooredoo Myanmar a rapidement réagi en réclamant que « ceux qui sont derrière ces pratiques inacceptables soient poursuivis en justice », mais là encore sans donner directement de nom.

Une circonspection facile à comprendre puisque derrière Viettel et MyTel ce sont les militaires vietnamiens et birmans qui se tiennent. Et chacun sait qu’il est moins que probable que leurs gouvernements respectifs les poursuivent ou les sanctionnent pour de tels broutilles commerciales… Viettel, le principal opérateur de télécom du Vietnam, est une entreprise d’état qui appartient au ministère de la Défense. Elle est présente aujourd’hui dans 11 pays, dont la Birmanie puisque Viettel est actionnaire a 49% de MyTel. Les 51% restants sont le bien de Myanmar National Telecom Holding (MNTH), une compagnie qu’en août dernier les Nations-Unies ont mise sur une liste d’entreprises liées aux militaires birmans.

Sans surprise, Viettel a nié les accusations de Facebook, déclarant « que son groupe ne se livrait en aucune manière et de quelque façon que ce soit à des pratiques commerciales contraires à la loi et a l’éthique. Nous prenons très au sérieux les éléments fournis par Facebook et si jamais il était prouvé qu’un ou plusieurs employés ont eu de telles pratiques, nous en prendrions des mesures et en assumerions l’entière responsabilité ».

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