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HUMAN – Mia Sfeir : “L’humain m’intéresse”

Écrit par Hélène Boyé
Publié le 25 octobre 2016, mis à jour le 26 octobre 2016

La première assistante-réalisatrice du film ?Human' de Yann Arthus Bertrand était de passage au Liban pour présenter l'?uvre qui compile les témoignages bouleversants d'êtres humains à travers le monde. Nous l'avons rencontré.
Photos : Mia Sfeir au Maroc, dans la forêt de Selouane avec des migrants subsahariens lors du tournage

Lepetitjournal.com/Beyrouth : Parlez-nous un peu de vous?
Mia Sfeir : j'ai passé les 10 premières années de ma vie au Liban où je suis née. A la base, j'ai une formation scientifique. J'ai fait Dauphine et un DESS à la Sorbonne en économie. J'étais donc très loin du journalisme que j'ai rejoint plus tard.

Comment êtes-vous arrivée à travailler avec Yann Arthus Bertrand ?
Je l'ai rencontré il y a 10 ans lorsque je travaillais pour l'émission Secrets d'Histoire de Stéphan Bern, produite par la boîte de production qui avait produit La Terre vue du ciel. Parallèlement, j'avais également rencontré le compositeur Armand Amar qui compose tous les films de Yann Arthus Bertrand. C'est lui qui m'a informé qu'il recrutait des journalistes pour un grand projet de film qui devait s'appeler Human.

Qu'est-ce qui vous a attiré dans ce projet ?
L'humain m'intéresse. J'ai participé à ce film dans l'idée, certes naïve, de contribuer à quelque chose, de changer le monde. J'ai interrogé Yann Arthus Bertrand sur ce sujet. Il m'a expliqué qu'il faudrait de nombreuses initiatives comme celle-là mais qu'il fallait bien commencer par quelque chose.

HUMAN, les chiffres

- 16 journalistes    - 
3 ans pour faire le film
- 2020 interviews   - 2 ans et demi d'interviews 

Quel était le message que Yann Arthus Bertrand voulait faire passer ?
Il s'est toujours demandé pourquoi des femmes et des hommes, qu'ils soient réfugiés de guerre syriens ou maliens, ou alors des travailleurs philippins, pouvaient tout quitter. Il voulait comprendre cette idée du sacrifice qu'il y a derrière. Plus que des journalistes, Yann Arthus Bertrand cherchait, pour monter son équipe, des personnes qui avaient la même sensibilité que lui, la même idée du film que lui. Human porte des valeurs : amour, tolérance, vivre-ensemble, solidarité, engagement. Yann Arthus Bertrand voulait de l'émotion, des moments forts, que le message atteigne les gens. 

Comment se sont déroulés vos entretiens ?
Ma façon de procéder était très intuitive. Nous n'étions pas enfermés dans un carcan de questions/réponses classiques. Nous avions un canevas de questions mais il fallait essayer de tisser un lien avec la personne en face pour ouvrir une fenêtre.
Parfois, je pouvais rester deux heures avec quelqu'un parce que ça coinçait mais je sentais qu'il y avait quelque chose. En même temps, nous n'étions pas là pour les ?analyser' même si certains nous prenaient pour des psys. Ils nous ont souvent dit : 'vous savez, je ne l'ai jamais dit, ni à mon frère, ni à ma mère'. On se sentait utile même si, au final, la personne n'allait pas être dans le film.

Certains personnages vous ont-ils marqué ?
Je me souviens d'un vétéran américain qui était très sombre, il passait des rires aux larmes en parlant de tout et de rien. Je me souviens surtout d'un réfugié malien, qui n'est pas dans le film, qui essayait d'aller en Europe et que j'ai rencontré au nord du Maroc. Il avait un regard lourd et noir, et une vraie rage contre les Touaregs. L'interview a tout fait ressortir en lui. A un moment, il me demande de stopper net l'interview, me disant : ?là, j'arrête car je vais devenir dangereux'.

Comment sort-on d'une expérience comme celle-ci ?
Quand on rentrait de tournage, tout le monde paraissait insipide. Dans les bidonvilles de New Delhi, j'ai trouvé que la pauvreté des villes était encore plus terrifiante que celle des campagnes. Quand vous rentrez à Paris, il vous faut un temps pour récupérer. Mais vous devez travailler les images que vous venez d'enregistrer. Il m'est arrivé de pleurer.

Prenez-vous encore des nouvelles des personnes que vous avez interrogées pour Human ?

Je continue à prendre des nouvelles de certains via les ONG comme pour Ekami, cette femme indienne de la campagne qui crie sa colère aux dirigeants du monde. Dans le film, elle en perd son voile. Elle m'avait complètement bouleversée lors du tournage et elle m'avait consolée à la fin de l'interview. Un moment dur mais magique. Pour d'autres, on continue à s'appeler, même à se voir. On se WhatsApp avec certains, notamment avec des réfugiés qui ont réussi à s'installer en France ou en Angleterre. Il y a un qui vient d'avoir une petite fille !

Hélène Boyé / La Rédaction (www.lepetitjournal.com/Beyrouth) mardi 25 octobre 2016

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Hélène Boyé, directrice de la publication de LPJ Beyrouth
Publié le 25 octobre 2016, mis à jour le 26 octobre 2016

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