Les Français installés à l'étranger sont appelés aux urnes les 4 et 18 juin prochains afin d'élire les députés qui les représenteront à l'Assemblée nationale. Tous les jours jusqu'aux élections, lepetitjournal.com donne la voix à chaque candidat pour qu'il puisse se présenter aux Français d'Espagne. Ils sont 84.730 électeurs à être inscrits sur les listes électorales en Espagne, pour un total de 112.029 électeurs pour l'ensemble de la 5ème circonscription des Français de l'Étranger, correspondant aux citoyens français installés en Espagne, au Portugal, en Andorre et à Monaco.
Aujourd'hui nous rencontrons François Ralle Andreoli, le candidat du Mouvement citoyen Agissons Ensemble pour la 5ème circonscription des Français de l'étranger, soutenu par Europe Écologie Les Verts (EELV) et la France Insoumise.
Lepetitjournal.com : Pouvez-vous nous résumer votre parcours et nous préciser quelles ont été vos motivations pour entrer en politique ?
François Ralle Andreoli : "Après une classe préparatoire littéraire à Versailles, je suis entré à l'École Normale Supérieure en 1994. Puis, j'ai travaillé dans le cinéma documentaire, avant d'être chargé de mission au service culturel de l'Ambassade de France à Madrid en 2001. J'ai été par la suite enseignant des lycées français de Bilbao, Valence, et Madrid. Je connais bien l'Espagne et la circonscription où j'habite depuis 16 ans. Mon épouse est espagnole et mes 3 enfants sont binationaux, ce qui fait de moi un porte drapeau de la richesse du dynamisme des 2 millions de Français installés hors de France. Je suis entré en politique en 2012, lorsque j'ai constaté les terribles effets de la crise économique autant que des solutions néolibérales aveugles censées la juguler et qui n'ont fait qu'accentuer les souffrances que subissaient la société espagnole et beaucoup de nos compatriotes français d'Espagne. Relancer une Europe plus juste et solidaire, lutter contre les discriminations, ressourcer la démocratie et l'éthique en politique, mieux mettre en valeur le rôle stratégique des Français de l'étranger restent mes principaux engagements. Contrairement aux aventuriers qui reviennent tous les 5 ans chercher nos voix, je revendique pour ma part mon bilan de conseiller consulaire élu en 2014, au service des Français résidant hors de France. À l'heure des promesses électorales floues, non chiffrées, c'est cette garantie d'intégrité que je présente à mes concitoyens résidant dans cette circonscription : défense des familles boursières, des retraités en manque d'accompagnement, soutien aux associations d'entraide et de petits et moyens entrepreneurs?".
Être député de la 5ème circonscription, qu'est ce que cela représente pour vous? Quels sont vos liens avec cette circonscription/ avec l'Espagne ?
"Je suis implanté depuis longtemps dans cette circonscription. Enfant, je jouais dans les jardins de la Casa de Velazquez où mon père, historien de l'Espagne à la Sorbonne, poursuivait ses recherches. Aujourd'hui, j'observe mes propres enfants grandir en bénéficiant de l'excellent réseau scolaire français à l'étranger et des opportunités d'une Espagne en mutation. Je suis aussi inquiet pour eux, en raison de la pollution urbaine, du réchauffement climatique et de l'endurcissement des conditions pour réussir sa vie aujourd'hui dans une société moins solidaire. Voilà pourquoi il nous faut des représentants politiques engagés qui défendent la richesse de ce que nous apportons à notre pays en tant qu'entrepreneurs, étudiants, retraités, artistes, enseignants, installés à l'étranger. La France est le premier partenaire commercial de l'Espagne, les relations culturelles et migratoires entre les deux pays, tout comme avec Andorre, le Portugal et Monaco, font de cette circonscription un espace central de nos relations internationales. Les centaines de milliers de Françaises et de Français qui résident ici sont au coeur de ces échanges. Pourtant, ils sont chaque fois moins considérés par les gouvernements en métropole qui leur ont tourné le dos en fermant les consulats, en réduisant l'accompagnement social, les bourses scolaires, l'aide à la francophonie et à la culture. Les Français de l'étranger n'ont pas eu droit à la ?priorité éducation? mise en place en France, c'est représentatif du peu de considération qu'on leur porte. Cette orientation a été constante de Nicolas Sarkozy à François Hollande, dont de nombreux soutiens ou conseillers à l'image de notre député Arnaud Leroy restent dans les équipes de l'actuel président de la République.
On commet une grave erreur en méconnaissant l'apport de cette diaspora française que l'on réduit à des clichés de Français bénéficiant de ?privilèges? et de faveurs à l'étranger. On ne le dit pas assez, mais les résidents hors de France apportent autant qu'ils ne coutent à notre pays, si l'on s'en tient aux chiffres du ministère des Finances. D'ailleurs l'ancien ministre Cahuzac, coupable d'évasion fiscale, réside en France, alors qu'un sportif madrilène comme Karim Benzema a choisi de façon exemplaire de payer ses impôts dans notre pays. Voilà qui montre que les stéréotypes sont infondés. Il est temps de reconstruire une véritable stratégie d'accompagnement de la présence française dans notre circonscription et dans le monde. C'est pourquoi il faudra des députés déterminés pour éviter que cette même politique se poursuive à l'avenir alors que l'on nous propose la même ligne d'austérité budgétaire qui n'a donné aucun résultat concret pour notre pays depuis 15 ans".
Quelles sont vos 3 priorités/propositions parmi les problématiques concernant les Français vivants à l'étranger (emploi, fiscalité, éducation, culture, représentation, administration...) ?
"Sur la base de mes engagements ces dernières années, je pourrais dire qu'elles concernent l'emploi, l'éducation/francophonie, et la transparence de la relation entre le député et ses concitoyens.
Pour l'emploi et l'entreprise, il faut mieux stimuler et accompagner les initiatives de mise en adéquation entre l'offre et la demande d'emplois à destination des Français de la circonscription. Est-il normal qu'un call center d'Alicante mette 6 mois à trouver un chargé de clientèle francophone avec de bonnes conditions économiques ? Il faut fédérer les énergies dans le monde de l'entreprise en rapprochant les initiatives des services diplomatiques, des chambres de commerce et des associations d'entrepreneurs de façon à ce qu'elles couvrent les attentes de conseils et d'actions dans toute la circonscription.
Dans l'éducation, il faut protéger nos écoles, en particulier celles qui sont menacées de fermeture comme à Benidorm, refuser les dé-conventionnements que nous avons vécus à Palma, Las Palmas, Saragosse, qui font porter les risques et les coûts sur les familles. Il faut augmenter la dotation de l'AEFE, ce qu'aucun des candidats ne propose et mieux accompagner les programmes FLAM/CNED pour ceux qui n'ont pas leurs enfants dans nos lycées.
Enfin, pour mieux impliquer nos compatriotes dans les décisions de leurs élus, je propose que l'essentiel de la réserve parlementaire soit distribué sous la forme de projets participatifs, comme le propose Manuela Carmena, la maire de Madrid avec qui je collabore depuis son élection. Des projets éducatifs, d'aide sociale ou aux entrepreneurs, après sélection par un jury citoyen composé des élus consulaires et des responsables d'association, seront proposés aux votes".
Quel bilan portez-vous sur l'action du député sortant? Sur quel(s) plan(s) auriez-vous agi différemment ?
"L'actuel député Arnaud Leroy qui a rejoint En Marche a littéralement abandonné sa circonscription et ses engagements de 2012, contrairement aux députés des Français Amérique latine et d'Afrique du Nord qui me soutiennent activement et avec qui j'ai collaboré pendant cette période pour défendre les gens d'ici. Avec Sergio Coronado et Pouria Amirshahi, j'ai ainsi lancé plusieurs initiatives de remise en cause de la baisse des bourses scolaires et des services consulaires en tant qu'élu consulaire local. À leurs côtés, j'ai obtenu des victoires, comme l'annulation du re-découpage de notre circonscription en 2015 dont personne ne voulait. Arnaud Leroy n'a jamais participé aux discussions budgétaires sur le budget de la DFAE (consulats, bourses) et de l'AEFE (écoles et lycées) au Parlement. C'est sur les décisions et les votes à l'Assemblée qu'il faut dresser un bilan, pas sur des choix personnels qui le regarde. Il a justifié toutes les suppressions d'agences consulaires, de postes d'enseignants qui provoquent la montée des frais de scolarité. Il a dit à chaque réunion des élus et consuls de la circonscription, que ces sacrifices étaient nécessaires et qu'il faudrait en faire plus à l'avenir. Voilà ce qui me préoccupe alors qu'il a piloté la campagne d'En Marche dans notre circonscription".
Quelle est votre réaction à l'élection d'Emmanuel Macron ? Si vous êtes élu, allez-vous soutenir son travail ou être dans l'opposition ?
"Je pense que ce sont les Français qui vont décider de la réponse à cette question. D'abord, ceux de notre circonscription s'ils veulent soutenir notre vaste rassemblement citoyen rejoint par des personnes sans étiquette, les écologistes, les Insoumis, l'ensemble des progressistes y compris des élus socialistes critiques. C'est une unité exemplaire que l'on aurait du promouvoir aussi en France pour changer vraiment de cap face a la dérive libérale du triumvirat Hollande/Valls/Macron. L'ensemble des Français ont l'occasion d'envoyer au Parlement un groupe important de progrès écologiste et social.
Je souhaite être un député d'action en cas d'attaques aux nôtres, aux Français de l'étranger, mais aussi un député qui sache faire des propositions et des amendements en particulier sur les thèmes qui nous concernent directement, sur la transition écologique ou la lutte contre les inégalités. Pour autant, je n'attends pas grand chose d'un gouvernement dont les postes clés sont tenus par ceux qui nous gouvernent depuis 20 ans. Je suis très attristé par l'annonce du maintien d'une politique d'austérité classique et libérale, celle là même qui n'a pas donné grand chose, ni emplois ni croissance depuis des années en France. Celle la même qui a accentué les effets de la crise en Europe du Sud. Celle qui nourrit la déception et la précarité sur laquelle le Front National construit sont essor démagogique. Mais, il faut aller de l'avant et penser à notre pays positivement. Voilà pourquoi, il faut envoyer des députés de terrain, écologistes, pour permettre une meilleure orientation. Sur la base de mon travail local au service des gens, je m'y engage".
Propos recueillis par Perrine LAFFON (www.lepetitjournal.com - Espagne) Mercredi 31 mai 2017
Inscrivez-vous à notre newsletter gratuite !
Suivez nous sur Facebook et sur Twitter
Téléchargez notre application pour téléphone mobile via Itunes ou via Google Play