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Le caricaturiste Stephff passe au crayon fin les Farangs en Thaïlande

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Pierre QUEFFELEC (archives)
Écrit par Catherine Vanesse
Publié le 17 mars 2020, mis à jour le 24 juin 2023

Depuis plus de 25 ans, le caricaturiste français Stephff croque l’actualité internationale et thaïlandaise, mais aussi la vie des expatriés au Pays du sourire, thème sur lequel il sort un premier recueil de caricatures “Farang Affairs”. 

Figure bien connue de la communauté francophone en Thaïlande, le caricaturiste Stéphane Peray, alias Stephff, s’apprête à sortir un premier recueil de dessins de sa série “Farang Affairs” dans laquelle il croque avec un second degré inimitable les aventures et mésaventures des touristes et expatriés occidentaux en Thaïlande. 

Installé à Bangkok depuis 1989, Stephff a démarré comme photoreporter avant de commencer à proposer des dessins politiques à différents médias de la région en 1993 et d’entamer une carrière de caricaturiste à temps plein en 1997 pour un journal de Dubaï. En 2003, il est embauché par le journal anglophone The Nation pour lequel il travaillera pendant un peu plus de quinze ans jusqu’à ce que la direction décide de supprimer la version papier en 2019. Mais loin de se morfondre -non sans avoir lâché quelques “coups de gueule” sur Facebook- le dessinateur a décidé de ressortir des cartons un vieux projet de recueil de dessins : "Farang Affairs". Le premier tome s’apprête à sortir ce 20 mars 2020 dans une édition limitée à 1.000 exemplaires. Stephff nous en parle

Couverture-Farang-Affairs

Lepetitjournal.com : À quand remonte votre série de caricatures “Farang Affairs” ? 

Stéphane Peray : J’ai démarré avec le magazine Gavroche en 1995 sous une forme très rudimentaire et en français qui s’appelait “Culture-Shake”, le choc des cultures. L’idée m’est venue après être tombé amoureux des dessins de Lat - Mohammad Nor Khalid - auteur malaisien de bande dessinée. Des dessins que je découvrais à chaque fois que je passais à Penang pour mon “visa run”. A l’époque, j’étais un expat sans le sou et sans permis de travail, un “white trash” comme on dit de nos jours, une situation qui a duré pendant 10 ans. 

Quels commentaires avez-vous en général ? Recevez-vous parfois des critiques virulentes ? 

En général, au sein de la communauté francophone, les retours sont bons. Les Italiens et les Espagnols sont réceptifs également, les histoires de bars et de massages passent plus facilement auprès des Latins, auprès de ceux qui vivent ici depuis un bout de temps et auprès des hommes bien sûr! Le public anglo-saxon est plus mitigé parce que l’hypocrisie est souvent de mise et on ne rigole pas de certaines choses. Les nouvelles générations, les “woke generation” - cette jeune génération qui se croit plus éveillée, plus consciente que la précédente -, les millenials, adorent s’offusquer pour un oui ou pour un non et ils en profitent pour me “pourrir” sur les réseaux sociaux. Mais il y a aussi plein d’Anglo-saxons, des jeunes et des femmes, qui adorent ce que je fais. 
Il n’y a pas vraiment de règle sur comment est perçu une caricature, si ce n’est d’avoir une culture de la bande dessinée ou une connaissance de mes dessins. Et pour cela, les Belges et les Français ont rarement un problème avec mes dessins puisqu’ils sont habitués à bien pire! 
Après, il y a aussi des gens qui ne comprennent pas le second degré et ils se bloquent sur le premier degré avec une interprétation raciste ou sexiste. Pour moi, c’est soit un malentendu soit de la mauvaise foi. C’est un peu comme Coluche, certains disaient qu’il était grossier, car ils s’arrêtaient à la première impression alors que Coluche était justement dans une parodie de la grossièreté.

Au final, si des caricatures n’énervent pas les imbéciles, c’est qu’elles ne sont pas assez efficaces, non ?

Farang-Affairs-Caricature-Stephff

Vous n’y allez pas par quatre chemins dans vos dessins, pratiquez-vous tout de même une forme d’autocensure ? 

Bien sûr, nous sommes quand même en Thaïlande et il y a des sujets qui restent impossibles à traiter sans risquer de graves ennuis. Par exemple, si je veux faire un dessin d’un “farang”, d’un étranger qui va pour la première fois au cinéma en Thaïlande et où il doit se lever pour rendre hommage, je rentre dans une zone très périlleuse. C’est dommage, car c’est une situation qui pourrait être amusante à traiter en dessin, mais bon… non, non et non! Par contre, l’armée, les flics, l’administration thaïlandaise et la corruption, je ne me gène pas! 

Pourquoi sortir un livre maintenant ? 

L’année dernière, j’ai perdu mon boulot au quotidien anglophone The Nation et donc je me suis retrouvé du jour au lendemain avec presque aucun revenu, mais avec beaucoup de temps libre. Depuis plusieurs années, je ne cessais de reporter ce livre. Il avait déjà été question de sortir un livre avec Philippe Plénacoste au Gavroche il y a un quart de siècle! Perdre mon boulot a finalement été une chance et m’a permis de terminer une oeuvre qui fait l’objet de 25 ans de procrastination. 
Je suis perfectionniste et donc ce n’est pas qu’un bête recueil de dessins déjà publiés, c’est un projet plus réfléchi, plus travaillé, avec des dessins inédits (qui vont surprendre même ceux qui me suivent depuis longtemps !), des vieux dessins que j’ai retravaillés, etc.
J’ai fait le choix de le sortir en 1.000 exemplaires parce que cela donne de la valeur, ce sera un livre “collector”. 

Farang-Affairs-Caricature-Stephff

Pourquoi avoir choisi de l'autopublier ? 

C’est une pure question économique. Si je passe par un éditeur, et on m’a fait des propositions, celui-ci va me vendre 1.000 exemplaires et j’en aurais 100 bahts par bouquin maximum. Ce qui fait 100.000 bahts en tout pour les six derniers mois de travail, ce n’est pas rentable. Donc j’ai décidé de le faire avec mon argent et de le distribuer uniquement à mes fans sur Facebook. Au moins, je contrôle tout et j’apprends quelque chose. J’en ai un peu marre de dépendre des autres - avec les médias, cela fait 25 ans que je dois publier les dessins que le rédacteur en chef choisit pour ne pas avoir d’ennuis alors que le choix devrait se faire en fonction de ce qui fera rire le lecteur. 

Je pense que nous arrivons aussi dans une ère où il n’y a plus d’intermédiaires, où celui qui crée va vendre directement son produit à celui qui profitera de cette création : plus de maisons de disques, plus de journaux, plus d’éditeurs, plus de galeries d’art. C’est le modèle économique de demain. Je connais d’autres cartoonistes qui publient eux-mêmes leurs recueils de dessins, cela se fait beaucoup aujourd’hui. 

Quels sont les caricatures que le lecteur pourra découvrir ? 

Au total, il y aura 150 dessins, dont 40 inédits (qui n’ont même jamais été publiés sur Facebook) et aussi une vingtaine de vieilles caricatures que j’ai complètement redessinées pour le livre. Les inédits sont à mon sens les meilleurs. La sélection s’est faite en essayant de réfléchir à des sujets que je n’avais pas encore traités et en éliminant les dessins qui parlaient exactement de la même chose. 

Prévoyez-vous un deuxième tome ? 

Oui, je pense en publier un deuxième d’ici un an, en 2021. 

Où peut-on se procurer votre livre ?

Sur ma page Facebook 'Stephane Peray' ou par email : stephff.cartoonist@gmail.com  

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