Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 0
  • 0

Pas de répit pour le développement hôtelier à Bangkok

Vue de BangkokVue de Bangkok
Pixabay
Écrit par Luc Citrinot
Publié le 29 septembre 2015, mis à jour le 7 juillet 2021

L’attentat devant le lieu de pèlerinage Erawan qui avait fait 20 morts et 120 blessés le 17 d’août ne devrait pas affecter les investissements hôteliers. D’autant que le tourisme semble déjà repartir, après un léger fléchissement de quelques semaines.

Pourquoi Bangkok et généralement les grandes destinations touristiques de Thaïlande connaissent depuis plus d’une décennie un boom ininterrompu des capacités hôtelières ? La capitale thaïlandaise semble être un eldorado pour les investisseurs immobiliers, même si l’on peut se poser la question sur la bonne santé économique du marché hôtelier. Il tourne au dessus des 60% d’occupation en moyenne et reste en deçà de 70%. C’est un chiffre bien inférieur par exemple à ce qu’enregistre Singapour ou Hong Kong, où le taux d’occupation dépasse allègrement les 80%.

Certes, Bangkok est la première ville d’Asie du Sud Est en nombre de visiteurs internationaux - la capitale thaïlandaise accueille quelque 15 millions de voyageurs étrangers par an. Et si l’on y ajoute les voyageurs domestiques, on a tourné en 2013 autour de 37,5 millions de touristes annuels –dernière année disponible pour des statistiques complètes du ministère du Tourisme.

Près de 10% de chambres en plus en deux ans

Selon CB Richard Ellis, un cabinet de consultants immobilier et hôtelier, à la fin du second trimestre de 2015, Bangkok comptait dans son centre ville quelques 42.000 chambres d’hôtels, en hausse de près de 9% sur les deux dernières années. Sur toute l’aire métropolitaine de Bangkok, on recensait 97.547 chambres en 2014 avec un taux d’occupation moyen de 63,74%. Une chute de près de cinq points sur un an qui reflétait en réalité la situation politique mouvementée que traversait alors la capitale thaïe, et qui a tenu éloigné pendant quelques mois bons nombres de visiteurs potentiels, notamment asiatiques. Quant à la durée moyenne de séjour, là aussi, il n’y a pas de quoi pavoiser si on se fie aux statistiques. 1,79 jour par personne…

Alors qu’est ce qui fait que les Accor, Holiday Inn, Starwood, Marriott ou Hyatt –sans parler de ces nouvelles chaînes de "boutique hotel" - se précipitent toutes à la conquête de la capitale thaïlandaise ?

Une fois de plus il y a d’abord l’attrait – ou peut-être les attraits de la capitale thaïlandaise. Envers et contre tout, Bangkok s’est toujours relevée des situations de crise. Preuve en est l’année 2015, partie sur les chapeaux de roue après la difficile année 2014. Et, déjà, l’effet "attentat d’Erawan" sur le tourisme semble se dissiper selon les autorités touristiques, juste un mois après la tragédie.

Charme et petits prix

Le secret de Bangkok est certes son incroyable vitalité et l’excellence du service. Mais certains autres facteurs entrent certainement en jeu. Un ancien dirigeant d’Accor mettait l’inébranlable pouvoir d’attraction de Bangkok au compte d’une image de ville des plaisirs. Pour lui, le touriste revient toujours car il sait qu’on s’amusera toujours dans la capitale thaïlandaise… Une analyse empirique mais qui a certainement son lot de vérités !

Il y a surtout des prix dans l’hôtellerie plus compétitifs que n’importe où ailleurs en Asie. Qu’on en juge. Si l’on compare les prix d’une chambre d’hôtel d’un établissement cinq étoiles sur un moteur de recherche en ligne, l’écart de prix avec les autres métropoles asiatiques joue généralement en faveur de la capitale thaïe, qui, de plus jouit de la réputation d’excellence pour le service. Par exemple pour une nuit au Mandarin Oriental ou au Shangri-La le 1er octobre prochain –réservation au 21/09/2015, le site agoda.com donnait des prix respectifs de 334 dollars US et 197 dollars US ; à Singapour à la même date, le Ritz Carlton se négociait à 492 dollars la nuit et le Shangri-La à 338 dollars ; à Hong Kong, une nuit au Mandarin Oriental sur l’île de Hong Kong se vendait au minimum à 503 dollars tandis que le Island Shangri-La chargeait 477 dollars.

Seuls Kuala Lumpur et Ho Chi Minh City proposaient des prix similaires, voire même inférieurs à Bangkok aux mêmes dates. La crise économique en Malaisie et l’effondrement du Ringgit de 20% pèse sur les prix en Malaisie tandis que le marché des hôtels de luxe s’est singulièrement affaibli au Vietnam au cours des derniers mois…

"Trop plein d’hôtels"

La pression sur les prix vient de cette irrésistible poussée de l’hôtellerie dans la métropole thaïlandaise. Quelque 4.500 chambres supplémentaires dans le segment luxe et quatre étoiles sont venus grossir cette année le parc hôtelier selon CBR. Et l’on parle encore de 4.800 chambres supplémentaires prévus d’ici 2018, probablement plus dans la réalité. Un bon tiers des projets se concentrera dans le segment du quatre/cinq étoiles.

"Il y a un trop plein d’hôtels. On recense plus d’établissements à Bangkok que la combinaison des parcs hôteliers de Singapour et Hong Kong", indiquait il y a quelques années Chanin Donavanik, PDG de Dusit International, l’une des principales chaînes hôtelières thaïlandaises. "Et il ne s’agit pas seulement que d’hôtels à proprement parler. Il faut inclure les résidences hôtelières, qui en fait offrent les mêmes types de service que les établissements traditionnels", décrit-il.

Dans les faits, l’hôtellerie apparaît souvent comme une danseuse pour de nombreux investisseurs, notamment ceux travaillant dans le secteur immobilier. "Je ne sais pas pourquoi mais l’hôtellerie a gardé une aura glamour pour de nombreux propriétaires immobiliers. Il semble, pour bon nombre d’entre eux, que de posséder un hôtel est une marque de reconnaissance", décrit Chanin Donavanik. La concentration est particulièrement grande le long de Sukhumvit Road, où les projets de prestige alternent avec les résidences hôtelières et "boutique hotels".

Parmi les futurs développements de l’hôtellerie, on peut citer Park Hyatt à Central Embassy, Well Hotel sur Sukhumvit 20, Lancaster Hotel sur Petchaburi Road et une flopée d’établissements le long du fleuve Chao Phraya, comme le futur nouveau Four Seasons, le Avani Riverside Hotel, face au centre commercial et de loisirs ASIATIQUE the Riverfront ainsi qu’une résidence hôtelière battant pavillon pour le Peninsula. Le projet devrait faire partie du futur nouveau centre commercial ICONSIAM, dans le district de Thonburi.

Le seul groupe Accor compte par exemple inaugurer quatre nouvelles propriétés dans la capitale thaïlandaise d’ici 2017, soit près de 1.200 chambres. Après plusieurs années sur le segment des quatre/cinq étoiles, le groupe se concentre désormais sur le segment moyen de gamme avec l’ouverture prévue d’ici 2016-2017 d’un Ibis Style sur Sukhumvit 50, un Ibis Classique à Impact Muang Thong Thani, un Mercure à Makassan et un Novotel sur Sukhumvit 20.

Lié à l’absence de planification urbaine à l’échelle municipale, le développement d’hôtels peut s’attendre encore à de belles heures. CBRE évoque, il est vrai, dans sa dernière note de conjoncture un possible ralentissement des investissements dans l’hôtellerie, à la suite de l’attentat, mais le cabinet de consultants ne semble pas y croire. Les groupes hôteliers et les propriétaires immobiliers non plus.

Luc CITRINOT jeudi 24 septembre 2015

Flash infos