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10 ANS EN THAILANDE - Myrtille Tibayrenc “J’ai envie de continuer à innover”

Écrit par Lepetitjournal Bangkok
Publié le 2 mars 2016, mis à jour le 8 février 2018

Arrivée en Thaïlande pour des vacances, Myrtille Tibayrenc est à Bangkok depuis 10 ans déjà et l’une des personnalités clés pour la promotion et le développement de l’art dans la capitale entre sa galerie Toot Yung et un festival d’arts urbains grandissant qu’est le Bukruk, une énergie qui pourrait s’étendre prochainement jusque Chiang Mai.

Dans le cadre des dix ans de son édition Bangkok, Lepetitjournal.com a demandé à Myrtille Tibayrenc de faire le point sur l’évolution durant ses dix années de son secteur d’activité et du milieu de l’art.

Pouvez-vous nous décrire brièvement l’évolution de votre parcours depuis votre arrivée en Thaïlande?

Mon père m’avait invitée pour des vacances, c’est grâce à lui que j’ai atterri à Bangkok fin 2005, un diplôme des beaux-arts en poche. Je trouvais Bangkok étonnante, je voulais la découvrir plus en profondeur. J’ai commencé par un stage à l’Alliance Française dans le département culturel avant d’y être engagée pour 3 ans. Sur cette période, j’ai arpenté en long et en large la scène artistique locale, j’ai appris à connaître beaucoup de monde dans ce milieu, dont mon mari Haritorn Akarapat, sculpteur thaïlandais, en 2006.

Entre 2008 et 2012, je me suis lancée dans le commissariat d’exposition, j’ai organisé pas mal d’expositions d’artistes thaïlandais, à Bangkok pour la galerie Tang, mais aussi en Europe. C’était des expériences enrichissantes mais trop aléatoires et épuisantes.

En 2010, j’ai fait la connaissance de Laudine Dubeaux, nous avions envie de nous lancer dans un projet commun. Elle a ouvert alors un bar/librairie non loin de Democracy Monument et sur son invitation, j’ai ouvert ma galerie Toot Yung, ou “Cul de Moustique” en français. Un espace de 30m2 environ au dessus d’un bar littéraire ou des ados poètes, musiciens, artistes buvaient allègrement jusqu’à l’aurore. Aujourd’hui ça semble monnaie courante, mais à l’époque nous étions vraiment des pionniers. Si nous faisions quelques ventes, il a fallu se rendre à l’évidence, ce n’était pas viable et nous avons décidé de fermer en 2012.

Je ne savais pas exactement comment rebondir, lorsque j’ai rencontré Jean paul Veyrat et Henri Pierre Wirth qui m’ont proposé de créer un petit centre d’art que la famille Wirth financerait. J’ai sauté sur l’occasion, c’était trop beau pour être vrai ! J’ai travaillé sans relâche en 2012 sur le projet de Toot Yung Art Center, un petit centre d’art qui comprenait une galerie, un atelier d’artiste avec presse à graver, une résidence d’artiste, un café et un espace boutique. Epaulée de ma collègue Marine Caillat, nous avons organisé d’innombrables expos, résidences d’artistes, performances, concerts, soirées... Un peu avant d’ouvrir la galerie, avec Nicolas Dali, nous avons lancé la première édition du festival d’arts urbains Bukruk, un succès.

Mais toutes les bonnes choses ont une fin, et c’est avec un regret amer qu’à la demande de Jean Paul Veyrat, l’un des partenaires, Marine et moi-même avons rendues notre tablier après deux années de travail acharné pour la galerie.

Je ne me suis pas (totalement) démontée pour autant. Je l’ai continué en mode nomade. Pendant un an j’ai occupé des lieux sous l’enseigne éphémère Toot Yung pour organiser expositions et évènements culturels. Nous nous sommes aussi relancés avec Nicolas Dali dans la préparation d’une nouvelle édition du Bukruk festival qui a eu lieu en janvier dernier et dont le prochain aura lieu en 2018.

Que pouvez-vous nous dire sur l’évolution de votre secteur en Thaïlande ces 10 dernières années?

Je fréquente et je m’intéresse au milieu de l’art contemporain en Thaïlande depuis mon arrivée en 2006. J’ai ressenti au fil des ans une véritable transfiguration de ce milieu. En 2006, Bangkok ne comptait que quelques galeries, surtout universitaires et institutionnelles et très peu de galeries privées.

Depuis que j’ai ouvert la galerie Toot Yung en 2010, j’ai vu s’ouvrir pas moins d’une vingtaine de galeries, mais aussi des lieux plus alternatifs, galeries/café, centres d’art, galeries d’art conceptuel, galeries spécialisées dans le street art... Le BACC a ouvert ses portes après presque 10 ans d’indécision de la part des gouvernements successifs. De nombreux artistes locaux se sont fait connaître à l’international dans des foires d’art contemporain, des musées, des biennales d’art contemporain, la Documenta de Kassel et autres. Dans le secteur privé aussi les plus grands collectionneurs se sont motivés et un musée a ouvert le MOCA et deux autres musées privés sont en construction l’un à Bangkok pour abriter la collection de Petch et un autre à Chiang Mai à l’initiative des collectionneurs Jean Michel Beurdeley et Eric Booth.

La scène contemporaine s’est vue s’étendre et prendre une ampleur très conséquente à Chiang Mai, où je vais installer mon prochain projet. De plus en plus de collectionneurs internationaux passent par Bangkok et se penchent sur l’art contemporain thaïlandais, mais aussi j’ai eu la chance de rencontrer de nombreux collectionneurs locaux qui investissent de plus en plus dans des collections d’artistes locaux émergents ou déjà installés.

Lorsque je suis arrivée, l’art thaïlandais était considéré comme un art traditionnel et décoratif, mais à présent les artistes contemporains thaïlandais exposent aux côtés d’artistes comme Ai Wei Wei.
Je souhaite que les turbulences politiques et économiques du pays n’affectent pas cette ascension exceptionnelle.

Le gouvernement commence aussi à sponsoriser des initiatives d’envergure dans le secteur des arts, nous avons par exemple eu un gros support financier de Tourism Authority of Thailand (TAT) pour notre dernier festival d’arts urbains BUKRUK qui s’est déroulé fin janvier 2016 pendant lequel une vingtaine d’artistes d’Asie et d’Europe on peint des fresques murales gigantesques dans le quartier de Bangrak.

Sur le plan personnel, comment avez-vous vécu ces dix dernières années, où en êtes-vous par rapport à vos débuts en Thaïlande?

J’ai le sentiment de vraiment avoir été adoptée par les Thaïlandais dès mes premiers jours. J’ai tout de suite été charmée par leur douceur, leur politesse, le fait aussi qu’ils aiment et défendent leur pays et leurs coutumes. Ils sont particulièrement accueillants et généreux. C’est un bonheur de travailler aux côtés des artistes locaux mais aussi de leur faire découvrir la France et l’Europe à chaque fois que j’en ai l’occasion.

Parfois tout ce que j’ai réalisé depuis dix ans me donne le vertige ! Mais surtout l’envie irrépressible de continuer, d’aller plus loin, d’innover. Je compte bien rester encore longtemps.

Après ces dix ans de travail intense et d’une vie tout aussi intense, je commence à vouloir m’installer durablement quelque part. Je suis de plus en plus intéressée par la scène artistique de Chiang Mai, où j’ai des amis de longue date. Je vais donc certainement aller m’y installer et travailler pour un nouveau centre d’art qui présentera dans un cadre magnifique, bâtit par Udom Dansakchai, les œuvres des artistes thaïlandais que je représente depuis plusieurs années.

Je songe aussi de plus en plus a me remettre à ma passion d’origine, la peinture, car depuis 10 ans je m’occupe plus des autres que de moi !

Toot Yung Art Center
Adresse : Ekkamai 2 Alley, Phra Khanong Nuea, Watthana, Bangkok 10110, Thaïlande
Téléphone :+66 2 714 3766
http://tootyunggallery.com/
(http://www.lepetitjournal.com/bangkok) Jeudi 3 mars 2016
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Publié le 2 mars 2016, mis à jour le 8 février 2018

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