Le gouverneur de la province thaïlandaise de Chiang Mai a engagé des poursuites contre un magazine local pour avoir posté sur Facebook une peinture jugée "blasphématoire" représentant d’anciens rois portant des masques anti-pollution dans le cadre d’une campagne de protestation contre le smog saisonnier qui pollue la ville chaque année.
Le gouverneur de la province thaïlandaise de Chiang Mai a engagé des poursuites contre un magazine local pour avoir posté sur Facebook une peinture jugée "blasphématoire" représentant d’anciens rois portant des masques anti-pollution dans le cadre d’une campagne de protestation contre le smog saisonnier qui pollue la ville.
Tout ce qui touche à la monarchie revêt un caractère très sensible en Thailande, un pays ou les rois sont vénérés comme des divinités et sont protégés par l’une des lois de lèse-majesté les plus sévères au monde.
Le délit très largement interprétable de diffamation royale -qui peut entrainer des longues peines de prison- a contribué à ancrer une culture de l’autocensure parmi les intellectuels, les medias, et le milieu des arts dès lors qu’il s’agit de la royauté.
L’illustration des risques encourus à outrepasser ces limites s’est révélée vendredi lorsque le magazine en langue anglaise CityLife Chiang Mai s’est vu attaqué en justice pour avoir posté sur le réseau Facebook une image des fameuses statues des trois rois, un monument connu de Chiang Mai, portant des masques anti-pollution.
Le tableau, réalisé par une élève de collège, a été postée sur la page Facebook de CityLife Chiang Mai pour annoncer une manifestation intimant les autorités de s’attaquer plus sérieusement au problème des fumées toxiques qui polluent chaque année la Rose du Nord et mettent en danger la vie de milliers de personnes.
Le gouverneur de la province a qualifié l’œuvre d’"acte blasphématoire" et a envoyé un de ses collaborateurs déposer plainte contre le media en vertu du Computer Crime Act.
Cette loi sur les délits informatiques, qui prévoit jusqu’à cinq ans de prison pour la publication sur l’Internet de fausses informations, est régulièrement utilisée contre les détracteurs de la monarchie sur les réseaux sociaux, même si elle n’est pas aussi sévère que la loi de lèse-majesté qui prévoit, elle, jusqu’à 15 ans de prison par chef d’accusation.
"J’ai assigné mon préposé pour porter plainte à la police hier par rapport à cette image qui semble violer le Computer Crime Act par son côté inapproprié," a expliqué le gouverneur de Chiang Mai, Pawin Chamniprasart.
"Les statues des trois rois sont très sacrées et respectées par les habitants de Chiang Mai, ils sont nos ancêtres," a-t-il ajouté.
Dans une lettre officielle a la police, le gouverneur a dit que la peinture "risquait d’entacher l’image de Chiang Mai et son tourisme, et d’entrainer l’instabilité économique de la ville".
Chiang Mai est l’une des villes plus développées de Thaïlande ainsi qu’un pôle touristique majeur. Mais la Rose du Nord se débat aussi chaque année avec des taux de pollution atmosphérique record pendant la saison des brulis.
Pendant la saison sèche de janvier à mars, divers facteurs combinés, parmi lesquels la culture sur brûlis, générèrent une forte pollution de l’air (Smog) par les microparticules dans certaines provinces du nord.
La police a confirmé qu’elle enquêtait sur le dossier, tandis que le magazine a annoncé que sa manifestation intitulée "Droit de respirer" avait été annulée.
Dans un message sur Facebook, la jeune artiste qui a réalisé la toile a déclaré qu’il était "dommage que les gens soient choques par une image et non par l’air pollué qu’ils respirent".
Le journal Khasodenglish, qui a lui aussi publié ladite image dans un article consacré à l’affaire CityLife, rappelle que Chiang Mai affiche les taux de pollution les plus élevés du royaume et que dimanche, avec un Indice de Qualité de l’Air mesure à 151, la Rose du Nord figurait même parmi les 12 villes les plus polluées du monde.