La banque centrale thaïlandaise a relevé mercredi son taux d’intérêt directeur pour la première fois en près de quatre ans pour contrer la forte inflation, signalant d’autres hausses progressives à venir à mesure que la reprise économique s'accélère.
La Banque de Thaïlande (BoT), qui figurait parmi les banques centrales les moins agressives d'Asie, a finalement rejoint la plupart de ses pairs mercredi, en augmentant son taux de rachat à un jour de 25 points de base, portant ce dernier à 0,75% alors que l'inflation a atteint le niveau de la crise de 2008.
Le taux directeur de la BoT était à 0,50% depuis mai 2020, son niveau le plus bas jamais atteint, et cela faisait quasiment quatre ans qu'il n’avait pas connu la moindre hausse.
Le comité de politique monétaire (MPC), qui a voté l’augmentation à 6 voix contre 1, a déclaré que de nouvelles hausses seraient effectuées mais "de manière progressive et mesurée, en tenant compte des perspectives de croissance et d'inflation".
La seule voix contre vient d’un membre qui a en fait voté pour augmenter le taux de 50 points de base, affirmant que cela aurait permis de réduire le risque d'un resserrement agressif plus tard sans pour autant affecter de manière significative la reprise économique.
Un taux encore très bas
Le directeur du département de la Stabilité financière de la Banque de Thaïlande, Don Nakornthab, a souligné que le taux actuel restait encore très bas si l’on considère qu’il s’est situé en moyenne à 2% au cours des deux dernières décennies, ajoutant qu’"il faudra par conséquent un certain temps avant d’atteindre ce niveau".
La deuxième économie d'Asie du Sud-Est a ces derniers temps axé sa politique monétaire sur le soutien à la reprise économique, la Thaïlande ayant pris du retard sur ses voisins en raison principalement de sa politique sanitaire chaotique durant la pandémie de COVID-19 qui a laminé le tourisme et ralenti plus qu’ailleurs une grande partie de l’économie. La fréquentation touristique commence tout juste à reprendre des couleurs avec la levée des restrictions sanitaires sur le voyage.
Poussés par les prix de l'énergie, les prix à la consommation ont augmenté de 7,61 % en juillet par rapport à l'année précédente, bien au-dessus de la fourchette cible de 1 à 3 % de la BoT.
La Banque de Thaïlande a déclaré qu'elle s'attendait à ce que l'inflation reste élevée sur le reste de l'année mais prévoit qu’elle revienne progressivement dans sa fourchette cible en 2023, à mesure que la pression sur les prix du côté de l'offre s'atténue.
Le tourisme fait mieux que prévu
"L'économie thaïlandaise devrait continuer à se redresser avec une forte dynamique" à la faveur d’une activité touristique internationale plus importante que prévu, a déclaré Piti Disyatat, secrétaire du MPC, dans un communiqué.
Selon lui, l'économie devrait retrouver un niveau pré-pandémique d'ici la fin de l’année "et continuera à accélérer".
Il d’ailleurs affirmé que la BoT pourrait bien, le mois prochain, revoir à la hausse ses prévisions de croissance économique pour 2022 -actuellement à 3,3 %-, alors que le nombre de voyageurs étrangers visitant le royaume est supérieur au prévisionnel qui pointait jusqu’ici sur 6 millions de touristes sur l’année. En 2019, la Thaïlande a accueilli près de 40 millions de touristes.
Le PIB thaïlandais a progressé de 1,5 % l'an dernier, l'un des taux de croissance les plus faibles d'Asie du Sud-Est.
"Si l'inflation continue de s'affaiblir comme nous le prévoyons et que la croissance nécessite des efforts, la banque centrale adoptera une approche progressive dans sa politique de resserrement monétaire. Nous pensons que les taux culmineront à 1,5% l'année prochaine", a déclaré Gareth Leather de Capital Economics.
Miguel Chanco, économiste en chef pour l'Asie émergente chez Pantheon Macroeconomics, a déclaré que la hausse de mercredi était "inévitable et attendue depuis longtemps" et sera suivie d'une autre augmentation de 25 points de base le mois prochain.
"Cela dit, si le MPC décide de faire une pause en septembre, une hausse en novembre devrait probablement être exclue, car le tableau de l'inflation se sera en principe considérablement amélioré."