Un tribunal thaïlandais a condamné mercredi à 27 ans de prison un ancien ingénieur pour avoir placé une bombe dans un hôpital militaire, attentat qui fut l'une des rares ripostes à la prise de pouvoir par la junte il y a maintenant trois ans.
Au moins 21 personnes avaient été blessées – dont une sérieusement – lorsque l'engin rempli de clous a explosé dans la salle d'attente de l'hôpital King Mongkut à Bangkok le 22 mai dernier.
La date marquait le troisième anniversaire du coup d’État ayant démis le gouvernement civil de l'ancienne Première ministre Yingluck Shinawatra en 2014.
Après avoir été arrêté, Wattana Phumret, 62 ans, avait confié avoir placé la bombe en raison de ce qu'il appelle être sa "haine pour les gouvernements issus des coups d’État militaires".
Le tribunal a estimé que les preuves attestaient "sans aucun doute" de la culpabilité du suspect sur plusieurs chefs d’accusation, dont tentative de meurtre, mais il a évité la condamnation à vie grâce à ses aveux.
En Thaïlande, pays connu pour son histoire politique turbulente, les attaques à la bombe et au pistolet ne sont pas rares et sont souvent réalisées à l'occasion des anniversaires de coups d'Etat ou de répressions militaires.
Mais l'acte du loup solitaire Wattana n'a été qu'une rare manifestation de rébellion à l'encontre du régime militaire actuel, lequel a successivement contraint les critiques à se taire et consolidé son pouvoir.
Le putsch de 2014 a été le 12e coup d’État réussi en Thaïlande depuis 1932.
L'armée avait déclaré avoir été obligée de prendre le pouvoir pour mettre fin à l'aggravation du cycle de violence et d'instabilité qui saisissait le pays depuis 2006, lorsqu'un autre coup d’État avait démis le frère ainé de Yingluck – Thaksin Shinawatra – en tant que Premier ministre.
Les rues de Bangkok étaient devenues scènes de protestations violentes durant les années situées entre les deux coups – période surnommée la décennie « perdue » de la Thaïlande.
La junte actuellement en place – menée par l'ancien chef de l'armée Prayut Chan-O-Cha, qui est désormais Premier ministre – n'a rencontré que peu de résistance, puisque les éléments violents considérés comme anti-gouvernement ont été emprisonnés ou se sont exilés d'eux-mêmes.
Des élections sont programmées pour la fin de l'année prochaine, mais le calendrier originellement prévu pour retourner à un gouvernement civil a été constamment retardé.
Certains groupes de défense des droits de l'homme estiment que les militaires utilisent la menace de l'instabilité politique pour prolonger leur régime.
Le pays reste largement divisé entre les « Chemises rouges », qui supportent le clan Shinawatra, et une élite de Bangkok étant liée aux militaires.
Thaksin Shinawatra s’est volontairement exilé à Dubai depuis 2008 pour éviter de recevoir des condamnations qui selon lui seraient de motivation politique.
Yingluck a fui la Thaïlande en août pour échapper à une condamnation pour négligence criminelle présumée dans un programme de subvention du riz ayant été très couteux.
Un mois plus tard elle a reçu une peine par contumace de cinq ans de prison.