L’écrivain grec Dimitris Sotakis s’est prêté au jeu du questionnaire « Ligne de réponse » proposé par la librairie Lexikopoleio.
La librairie Lexikopoleio se propose de faire (re)découvrir des auteur(e)s à travers un questionnaire identique pour tous. Le défi est de taille : dire le plus possible en un minimum de mots !
Dimitris Sotakis est né à Athènes en 1973. Son œuvre a reçu de nombreux prix et ses livres sont traduits dans plusieurs langues. Après L’argent a été viré sur votre compte (prix Athènes de Littérature, 2010), réflexion sur la futilité des désirs et sur la conception du bonheur de l’homme moderne, puis Comment devenir propriétaire d’un supermarché sur une île déserte, interrogation sur la solitude et les illusions vers lesquelles nous entraîne le besoin de paraître, Dimitris Sotakis publie son troisième roman, Une famille presque parfaite, aux éditions Intervalles.
Extrait de L’argent a été viré sur votre compte :
Je ne pouvais que respirer, rien d’autre. J’entendais mon souffle me transpercer le crâne puis me revenir dans les entrailles, un filet d’air. Je respirais. Encore. Encore. Je ne me souviens plus de rien. Qu’était-il donc advenu de cette maison ? J’espérais que l’avance avait été versée, nous ne trouverions pas mieux, du côté de la porte du Nord. Il faisait nuit. Je ne pouvais pas vérifier, mais j’en étais sûr. Le responsable et ses employés avaient disparu. Cela me plaisait, que ce soit la nuit. J’étais le diable. Oui, le diable. Je portais sur mon dos toute la peine des hommes, les hommes qui m’avaient précédé et ceux à venir. J’étais un symbole pour l’humanité. Dehors, la ville brûlait. L’espérance et le rire avaient disparu. Je ferais quelque chose, je ne laisserais pas le mal prendre racine. Les cris se faisaient de plus en plus fréquents, d’ici peu plus personne ne serait debout. Seulement moi, preuve qu’il y avait eu autrefois de la vie sur la planète. J’étais vivant, je respirais. Cette nuit-là fut la nuit la plus importante de ma vie. Je voulais la vivre de toutes les forces qui me restaient. Je souris et le coton se colla à mes lèvres. Rien n’était perdu. Tous les rêves que j’avais faits, tout ce pour quoi mon cœur avait battu, tout cela un jour serait à moi. J’avais toutes les raisons de le croire. Dehors, les gens périssaient dans l’incendie, mais moi, j’étais vivant. Même s’ils envahissaient l’appartement, il y avait peu de chance qu’ils me retrouvent, sous cette masse de meubles, ma cachette, jour après jour, était plus sûre. J’étais fort. Quand viendrait le jour béni où je me lèverais et je sortirais de nouveau dans les rues, j’aurais sous les yeux un monde en ruines, étouffé sous le chagrin et la culpabilité. Je n’étais qu’un simple observateur. Les observateurs n’agissent pas.
Questionnaire « Ligne de réponse » avec Dimitris Sotakis
Lequel de vos livres a eu le plus de succès ?
Le prochain
Quelle est votre devise de vie ?
Préservez la vivacité de vos sensations
Votre incipit préféré ? (citez le titre du livre et l’auteur)
Caractère paradoxal maîtrisé (Cronopes et Fameux, Julio Cortazar)
Le piège de l’écrivain novice ?
L’illusion d’une grande Œuvre
Votre plus grande difficulté quand vous écrivez ?
La perte de rythme
L’écrivain français que vous aimeriez rencontrer ?
Victor Hugo
L’écrivain grec que vous aimeriez rencontrer ?
Emmanouil Roïdis
La question que vous n’aimez pas qu’on vous pose ?
D’où est inspiré votre livre ?
La réponse à cette question ?
Je n’en ai aucune idée
Le voyage de vos rêves ?
Toujours en Chine
Votre héros / ïne de fiction ?
Le cinquième duc de Portland du roman L’homme souterrain de Mick Jackson
Le don que vous souhaiteriez avoir ?
Devenir invisible
Trois romans grecs incontournables ?
Lettre au Greco, Un mari de Syros, Cassandre et le loup
Trois romans français incontournables ?
Les misérables, La chute, L’éducation sentimentale
Trois poètes grecs incontournables ?
Dionysios Solomos, Kostas Karyotakis, Constantin Cavafy
Trois français incontournables ?
Molière, Victor Hugo, Louis Pasteur
Le meilleur livre de science-fiction ?
En terre étrangère de Robert Heinlein
Le grand classique que vous n’avez pas encore lu ?
L’amour au temps du choléra
Trois mots pour la France d’aujourd’hui
Intensité, Fougue, Espoir
Trois mots pour la Grèce d’aujourd’hui
Décision, Honte, Demain