Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--

Bénédicte Joan : « Stop au chat noir, c’est dire stop à la culture du viol »

Bénédicte Joan, présidente de l'association "Stop au chat noir"Bénédicte Joan, présidente de l'association "Stop au chat noir"
Écrit par Anne-Claire Voss
Publié le 19 septembre 2021, mis à jour le 28 août 2023

La présidente de l’association « Stop au chat noir » Bénédicte Joan aborde les évolutions des violences basées sur le genre en Côte d’Ivoire. Elle revient sur l’histoire de son association à Abidjan et informe de la future mise en place d’un centre accueil pour les survivantes.

 

 

En pratique, si une femme souhaite porter plainte pour viol, son dossier n’ira pas très loin

 

Pourriez-vous nous parler de la situation de la femme en Côte d’Ivoire ?

La Côte d’Ivoire est un pays où les choses évoluent fortement comparé à d’autres pays d’Afrique. Nous bénéficions de nombreux droits et les lois sont écrites dans un sens égalitaire. Cependant, l’application de ces lois est différente.

En théorie, la loi interdit tout viol au sein du mariage. En pratique, si une femme souhaite porter plainte pour viol, son dossier n’ira pas très loin.

 

Il existe des normes qui veulent que le viol au sein d’un mariage ou les incestes soient impossibles. On va encourager la survivante à régler ces drames à l’amiable. Souvent, un leader religieux du quartier fait en sorte qu’il y ait une entente au sein de la famille.

 

 

Le gros de notre travail sont nos activités de sensibilisation liées aux groupes de parole, débats très crus ou tabous sur la culture du viol

 

Pourquoi avez-vous créé votre association « Stop au chat noir » ?

Je suis une survivante d’un « chat noir ». Cette expression est utilisée lorsque quelqu’un, le plus souvent l’homme qui est au pouvoir dans le foyer, erre tard la nuit, rentre dans une chambre, prend au dépourvu et abuse sexuellement d’une femme.

Le soir où cela m’est arrivé, j'ai eu la chance, mais surtout le courage de me sortir de cette situation. Lorsque j'en ai parlé autour de moi, les personnes en riaient. C’était tout à fait normal pour elles. L’association est née de ce constat. « Stop au chat noir », c’est dire stop à la culture du viol.

 

Pour lutter contre toutes les violences basées sur le genre, nous proposons des ateliers d'art thérapie et des consultations avec des psychologues principalement sur Abidjan. Une application mobile est par ailleurs disponible en version beta sur l'App Store et Play Store.

Le gros de notre travail sont nos activités de sensibilisation liées aux groupes de parole, débats très crus ou tabous sur la culture du viol.

 

 

 J’espère que cela servira de bonne leçon auprès d’autres présentateurs

 

Quel est votre regard sur l’affaire d’Yves De M’Bella? 

Cette affaire de prise de parole d’un violeur à la télévision sur une chaîne Ivoirienne a rapidement été prise en main par la justice. Il y a eu des peines avec sursis, il ne sera donc pas en prison. J’espère que cela servira de bonne leçon auprès d’autres présentateurs. Dans notre pays, la culture du viol est présente et on rigole encore du corps de la femme.

 

 

Nous sommes toujours à la recherche de volontaires pour nous épauler

 

Vous avez déclaré que depuis la médiatisation de l’affaire, une quinzaine de personnes vous contactent par jour. Est-il envisageable de les accueillir au sein de votre association ?

Oui, des quinzaines de personnes ont été sensibilisées à travers nous et souhaitent rejoindre notre équipe de bénévoles. Nous sommes une jeune association de 3 ans seulement. Certains d'entre nous sont des professionnels, des psychologues par exemple.

Si des personnes souhaitent rejoindre l'association, nous sommes totalement ouverts ! Nous sommes toujours à la recherche de volontaires pour nous épauler sur nos activités.

 

Auriez-vous des futurs objectifs pour « Stop au chat noir » ?

Nous aimerions ouvrir un centre d'accueil afin de créer un lieu de parole et d’hébergement pour les survivantes que nous accompagnons.

En attendant, nous préparons un festival sur le consentement, « Avec ou Sans Accord », le 27 novembre à Abidjan. Des étudiants prendront la parole et organiseront des activités de sensibilisation.

Flash infos

    Pensez aussi à découvrir nos autres éditions