D'année en année, l'afflux des migrants à destination des villes augmente: ils sont plus de 300 millions aujourd'hui, impactant notablement l'économie et la société chinoises. Explications


Plus de 300 millions de migrants
Selon le dernier rapport du Bureau national des statistiques chinois (NBS) publié fin mars 2025, la Chine comptait en 2024 plus de 300 millions de travailleurs migrants. Parmi eux, 121 millions sont restés dans leur région d’origine tout en changeant de secteur d’activité (passant de l’agriculture à l’industrie ou aux services), tandis que 179 millions ont migré vers une autre ville. Ce phénomène concerne majoritairement les hommes, qui constituent 62,4 % des migrants et l’âge moyen des travailleurs migrants atteint 43,2 ans. La plupart occupent un emploi dans le secteur tertiaire, avec 54,6 % des migrants travaillant dans ce secteur. 44,7% de travailleurs sont employé dans le secteurs secondaires, notamment dans l’industrie manufacturière (27,9 %), la construction (14,3 %) et le commerce (13,6 %). Leur revenu mensuel moyen s’élève à 4 961 RMB, soit environ 614 euros.
Le système chinois du hukou
Ces migrations s’expliquent largement par le système du “hukou”, ou permis de résidence chinois, qui lie chaque citoyen à un lieu de naissance et à un statut rural/urbain. Instauré à l’époque maoïste, ce système visait à répartir la main-d’œuvre selon les besoins locaux et à empêcher l’apparition de bidonvilles en périphérie des grandes villes. Avec l’ouverture économique, les autorités ont autorisé progressivement la migration vers les villes, d’abord dans les agglomérations de taille modeste. Le taux d’urbanisation de la Chine a ainsi grimpé à 66 % en 2023, contre 20 % en 1980. Néanmoins, l’acquisition d’un hukou urbain demeure difficile : en 2023 seuls 74 % des résidents urbains disposaient d’un permis de résidence urbain correspondant à leur lieu de vie. En pratique, la réforme du hukou reste progressive et souvent limitée aux villes moyennes et petites.
Un atout pour l’économie chinoise
L’exode rural de centaines de millions de travailleurs a profondément remodelé la géographie démographique chinoise. Les migrations se dirigent majoritairement vers les très grandes métropoles. Cette main-d’œuvre bon marché reste un atout économique pour la Chine. Elle offre aux entreprises une main-d’œuvre flexible et à bas coût, ce qui « contribue à la compétitivité du modèle de croissance chinois » en maintenant le coût salarial global du pays à un niveau attractif.
Cette disponibilité abondante de main-d’œuvre à bas coût a été l’un des piliers de la compétitivité chinoise depuis les années 1990, en facilitant notamment l’implantation de nombreuses entreprises étrangères. Cela a aussi contribué à faire de la Chine "l’usine du monde", capable de produire à grande échelle et à bas prix. En outre, la flexibilité de cette population, souvent prête à migrer, à accepter des conditions de travail difficiles a facilité les ajustements économiques face aux crises et aux évolutions de la demande.
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